Un meurtre politique va remettre en cause le fragile édifice bâti par le président Allende. Edmundo Perez Zujovic (démocrate-chrétien, ancien ministre du gouvernement Frei) est abattu dans une rue de Santiago, le 8 juin. L'émotion est considérable.

Il faudra cinq jours à la police pour cerner dans une maison isolée les frères Arturo et Ronald Rivera Calderon, meurtriers présumés de l'ancien ministre ; ils seront mortellement blessés au cours du siège.

Leur appartenance au VOP (Avant-garde ouvrière populaire), mouvement gauchiste dans lequel militent, dit-on, des éléments d'extrême droite, provoque un profond mécontentement chez les démocrates-chrétiens. Ils reprochent au gouvernement Salvador Allende « sa faiblesse ». Le 15 juin, les démocrates-chrétiens votent avec l'opposition pour renverser le bureau de la Chambre. Un fossé s'est ouvert entre les alliés de la veille.

Colombie

20 463 000. 18. 3,2 %.
Économie. PNB (67) 319. Production (65) : A 32 % + I 26 % + S 42 %. Énerg. (*68) : 576. C.E. (67) : 8 %.
Transports. (*68) : 351 M pass./km, 1 125 M t/km. (*68) : 141 100 + 123 200.  : 206 000 tjb. (*68) : 1 561 682 000 pass./km.
Information. (67) : 25 quotidiens ; tirage global : 1 021 000. (68) : *2 210 000. (68) : *500 000. (67) : 437 900 fauteuils ; fréquentation : 85,4 M. (68) : 817 423.
Santé (67). 8 654.
Éducation (66). Prim. : 2 408 489. Sec. et techn. : 513 398. Sup. : 49 930.
Institutions. République présidentielle. Constitution de 1886. Président et chef de l'exécutif : Misael Pastrana Borrero, élu le 19 avril 1970 ; succède à Carlos Lleras Restrepo.

État de siège

L'accession au pouvoir du président élu Pastrana Borrero, conservateur, le 7 août 1970, est précédée par une série d'incidents qui ne sont pas tous dus aux partisans de l'ex-dictateur Rojas Pinilla, concurrent malheureux du nouveau chef de l'État. Le 19 juillet, lors de l'installation du Parlement issu des élections présidentielles, le gouvernement décrète l'état de siège en raison des « troubles de l'ordre public » provoqués par l'Alliance nationale populaire (ANAPO), le parti de Rojas Pinilla. Cette dernière formation ne cache pas son intention de mener la vie dure à la nouvelle équipe dirigeante.

Cependant, grâce à un impressionnant déploiement de forces militaires, Pastrana Borrero peut prêter serment et former son gouvernement dans un calme relatif. Le nouveau cabinet, composé davantage de politiques que d'experts, est loin de rallier tous les suffrages. Pour l'ANAPO, ce n'est qu'une « combinaison formée par l'oligarchie ». Les tâches qu'il doit remplir, pourtant, sont immenses.

Chômage

La gravité du problème du chômage et du sous-emploi en particulier vient d'être mise en lumière par les travaux d'une mission de l'Organisation internationale du travail (BIT). Dans les villes, plus de 500 000 personnes, sur une population active de 3 000 000, cherchent du travail. 70 % des chômeurs ont moins de trente-quatre ans. Un tiers de la population gagne moins de 11 dollars par mois. Dans les campagnes, le sous-emploi est de règle. 40 % des familles disposent de moins de 2 ha chacune. 6 % n'ont rien du tout.

Cette situation dramatique est encore aggravée par une croissance démographique élevée. Pour créer les 5 millions d'emplois nécessaires, il faudrait, estiment les experts, réaliser de profondes réformes de structures. La redistribution des revenus et la réforme agraire devraient y occuper une position prioritaire.

Ces mesures indispensables ont toutes les chances de se heurter à des résistances d'ordre politique : déjà la mise en oeuvre des quelques réformes souhaitées par le gouvernement est systématiquement bloquée par l'opposition parlementaire, qui rassemble les pinillistes et les élus du mouvement de Belisario Betancur, conservateur dissident.

Agitation

Dès le début de 1971, la minceur des réalisations gouvernementales provoque un renouveau de l'agitation sociale et politique. En février, 3 000 paysans occupent 44 grandes propriétés pour protester contre les lenteurs de la réforme agraire. Le 26, un violent affrontement entre étudiants et forces de l'ordre à Cali fait 7 morts. Le gouvernement rétablit l'état de siège levé depuis peu. Une grève d'une semaine est décrétée dans les universités, le 6 mars 1971, et le 8, deux des principaux syndicats ouvriers lancent le mot d'ordre de grève générale, qui est largement suivi.