Journal de l'année Édition 1968 1968Éd. 1968

Les courses

Baisse des paris au tiercé

Le tiercé, qui, depuis sa création en 1954, a vu son chiffre d'affaires monter avec une régularité de métronome, semble avoir atteint son plafond. En 1967, 3 milliards 290 millions y ont été investis, contre 3 milliards 380 millions l'année précédente, soit une perte de 2,5 %. Mais chaque dimanche, près de 50 millions sont déposés aux guichets du PMU pour le seul tiercé ; le PMU redistribue environ 35 millions le lundi aux différents vainqueurs ; 15 millions demeurent dans les caisses de l'État.

Les événements qui ont bouleversé la France en mai et juin ont marqué le monde des courses à leur manière. Quatre tiercés ont été supprimés et les recettes de ceux qui ont suivi ont brusquement enregistré un fléchissement d'environ 20 %.

Le commerce du pur-sang continue à se bien porter. Le record des enchères pour l'achat d'un yearling a été battu à Deauville, où White Light a été payé 280 000 F. De quoi laisser rêveur lorsqu'on sait qu'un yearling est un poulain âgé d'un an qui n'a jamais participé à une épreuve, dont on ignore quel sera son comportement en course.

Pas de super-crack

L'élevage français attend toujours son super-crack. 1967 fut bien décevant à cet égard. Ni Topyo, surprenant vainqueur du prix de l'Arc-de-Triomphe, ni Astec, ni Roi Dagobert, ni Taj Dewan ne semblent les dignes successeurs de Sea Bird. Le printemps 1968 n'a guère apporté de lumière. On pouvait croire un instant que La Lagune, surtout après sa victoire dans les Oaks, à Epsom, allait être une nouvelle jument du siècle. Hélas ! sa complète déconfiture dans le prix de Diane devait décevoir ses plus chauds partisans. Huit jours plus tôt, dans le prix du Jockey Club, le grand favori, Luthier, qui portait les couleurs du baron Guy de Rothschild, connaissait une incompréhensible défaite. Vaguely Noble, pur-sang né en Angleterre, mais entraîné en France, demeure notre plus bel espoir, face au britannique Sir Ivor, qui pourrait bien être le cheval de l'année. La saison d'obstacles a été marquée par un triple deuil. Le 21 janvier 1968, à Cagnes, un an, jour pour jour, après sa première victoire, le jockey André Girard trouve la mort en course. Au printemps, en moins d'un mois, deux de nos meilleurs, pour ne pas dire nos deux meilleurs, et en tout cas nos deux plus populaires sauteurs, font des chutes mortelles à Auteuil : Spirou et Cacao. Une consolation pour André Adèle, le compagnon d'écurie de Spirou, Parandero, s'impose maintenant sur le steeple après avoir connu une carrière exemplaire sur les haies. Haroué, Philaé et, à un moindre degré, Flouze devraient assurer la relève.

Au trot, Roquépine demeure la grande vedette, bien qu'alternant bonnes et moyennes courses. Le 14 janvier 1968, elle déçoit en terminant dernière du prix de Bourgogne, mais quinze jours plus tard elle remporte son troisième prix d'Amérique consécutif, égalant ainsi le record établi par son arrière-grand-mère : Uranie. La génération des T (5 ans), avec, entre autres : Tabriz, Tony M, Tiki R, et Toscan s'il se remet de ses accidents musculaires, semble la plus apte à prendre le relais. On avait nourri de grands espoirs pour Une de Mai, mais ses deux défaites consécutives, à l'attelé et au monté, par Upsalin semblent tout remettre en cause.

De curieux cas de cumul deviennent monnaie courante dans les milieux du trotting. Oscar RL, Querido II, Picardy et Pluvier III, promus étalons, retournent sur les pistes après une saison passée au haras et consacrée à la monte ; cela ne les empêche pas de triompher de nouveau et souvent dans des épreuves à grosse allocation. Il faudra bientôt se décider à réglementer les conditions des courses de trot ; trop de chevaux se présentent sur les pistes. Ni les 70 nocturnes organisées maintenant à Vincennes ni les innombrables réunions de province ne pourront suffire à accueillir tous les prétendants.

Si Yves Saint-Martin a encore été la grande vedette de la saison hippique, il a paru cette année plus sérieusement menacé que les années précédentes ; en particulier, par F. Head, sur l'ensemble des épreuves, et par M. Philipperon, pour les tiercés. Jacques Geneau et M.-M. Gougeon, l'un à l'obstacle et l'autre au trot, se sont imposés.