maréchal de France (suite)
Tant qu’existe l’office de connétable, les maréchaux n’ont pas, de droit, un commandement militaire, à moins de recevoir à cet effet une commission du roi. Chargés de veiller à la discipline des troupes, ils disposent, du xvie s. à la Révolution, de prévôts des maréchaux et d’archers. Ils sont à la tête d’une juridiction qu’ils exercent d’abord conjointement avec le connétable par le Tribunal de la connétablie et maréchaussée de France, qui connaît des causes intéressant l’armée et des plaintes contre les prévôts, et par le Tribunal du point d’honneur, où se traitent les querelles entre officiers et où l’on tente d’éviter les duels.
Après la suppression par Richelieu en 1627 de l’office de connétable, les maréchaux, dont le nombre est voisin de vingt aux xviie et xviiie s., voient leur importance... et leurs rivalités grandir. En 1672, pour la campagne de Hollande, Louis XIV ayant placé les maréchaux sous les ordres de Turenne, trois refuseront d’obéir et seront évincés par le roi. Pour honorer les remarquables services de Claude de Villars (1653-1734), Louis XV lui confère en 1733 le titre de maréchal général de France, qui lui donne autorité sur tous les autres maréchaux. Leur insigne de commandement est un bâton, qui deviendra le symbole de leur autorité. Son usage tombera en désuétude sous Louis XIV et ne sera rétabli que par Napoléon. En dehors de leur fonction militaire de commandement aux armées, les maréchaux reçoivent fréquemment, sous l’Ancien Régime, le gouvernement des provinces, mais en 1791 un décret de Louis XVI interdit aux six maréchaux existant alors d’exercer aucune charge qui ne soit strictement militaire.
Supprimé par la Convention en 1793, le titre de maréchal disparaît jusqu’à son rétablissement sous le nom de maréchal d’Empire le 19 mai 1804, date où Napoléon nomme dix-huit titulaires, dont quatre honoraires qui sont des sénateurs. Pour l’Empereur, en effet, le maréchalat est une dignité de l’État conférée à vie et assortie d’un traitement (alors de 40 000 F), mais ne constitue pas un échelon de la hiérarchie militaire. Sous la Restauration, les vingt titulaires nommés par Louis XVIII (dont plusieurs maréchaux d’Empire) reprennent l’appellation de maréchaux de France, qu’ils ont conservée depuis. Une ordonnance de la Restauration fixe leur uniforme, dont les boutons portent deux bâtons croisés, et leur donne le bâton et l’écharpe. À partir de 1836, leur habit est orné de trois rangées de feuilles de chêne, qu’ils portent encore sur leur képi. Louis-Philippe fixe le nombre des maréchaux à six en temps de paix et à douze en temps de guerre, mais y comprend les amiraux* de France. En 1847, il restaure en faveur de Soult, dernier survivant des maréchaux d’Empire, le titre de maréchal général de France. Napoléon III nommera quatorze maréchaux, dont le dernier, Canrobert, mourra en 1895.
Pendant plus de vingt ans, la dignité de maréchal n’existera plus en France, car, si la loi des cadres de 1875 en a conservé le titre, il ne sera pas conféré par la IIIe République jusqu’en 1916, date où Joffre* reçoit son bâton de maréchal des mains du président Poincaré. Cinq autres maréchaux sont nommés en 1918 et 1921, où la dignité est accordée pour la première fois à titre posthume au général Gallieni. Après la Seconde Guerre mondiale, les généraux Leclerc* et de Lattre* de Tassigny (à titre posthume) et le général Juin* sont faits maréchaux de France en 1952. Depuis la mort de ce dernier en 1967, la dignité s’est de nouveau éteinte, mais la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires* a conservé au sommet de la hiérarchie militaire générale et comme une dignité dans l’État les titres de maréchal et d’amiral de France.
Quelques termes
maréchal d’armes ou maréchal de tournoi, au Moyen Âge, personnage qui va de pair avec le héraut d’armes, dispose les combattants, donne les ordres pour commencer les joutes, arbitre et fait cesser le combat.
maréchal de bataille, appellation donnée par Henri IV aux officiers adjoints aux maréchaux de camp, et disparue en 1672. Il existe en outre de 1589 à 1655 des maréchaux de bataille d’infanterie, qui assistent le colonel général de cette arme. (Au xviie s., le terme de bataille désigne un ensemble de formations militaires : une bataille de quatre régiments.)
maréchal de camp, grade de la hiérarchie militaire, apparu au xve s., dont les titulaires répartissent les troupes dans les camps et leur assignent une place au combat. Aux xviie et xviiie s., ils commandent un territoire, une place ou, en temps de guerre, une brigade. Le grade est remplacé sous la Révolution par celui de général de brigade, mais réapparaît de 1814 à 1848.
maréchal général des camps et armées du roi, charge correspondant, sous l’Ancien Régime, au grade le plus élevé non dans la hiérarchie de commandement, mais dans les fonctions d’état-major. Elle consistait à répartir l’ensemble des troupes françaises dans les camps et sur le terrain et à leur assurer vivres et munitions. Elle fut exercée notamment par le duc de Lesdiguières (1621), par Turenne (1660) et par le maréchal de Saxe (1747), mais ne donnait aucun pouvoir sur les maréchaux de France.
maréchal de l’host (ou de l’ost). À l’origine, le maréchal de France était un commensal du palais royal ; il prenait le titre, en usage du xiie au xvie s., de maréchal de l’host quand il était employé effectivement dans un commandement militaire.
maréchal des logis, dans armée de l’Ancien Régime, terme désignant plusieurs charges d’officiers, responsables du bon ordre et de la discipline. En 1762, le grade de maréchal des logis et en 1776 celui de maréchal des logis-chef étaient créés pour les sous-officiers de la cavalerie. Étendus ensuite aux autres armes montées et à leurs héritières, ils existent toujours aujourd’hui dans le corps des sous-officiers de l’armée de terre.
P. D.