byzantin (Empire) (suite)
Au lendemain du concile de 879-880, où, sous l’impulsion du patriarche Photios, l’Église orthodoxe essaya de donner à sa foi une forme définitive, Photios, dans une lettre célèbre au tsar Boris Ier de Bulgarie, donne une explication théologique de ce programme. Au sommet de la coupole règne le Christ-Pantocrator, le Christ maître du monde ; le Père ne saurait être figuré. Au fond de l’abside, c’est la Vierge orante. Tout autour se succèdent les représentations des principaux épisodes de la vie terrestre du Christ, illustrant les grandes fêtes du calendrier byzantin : Annonciation, Nativité, Présentation au Temple, Baptême, Transfiguration, Crucifixion, Résurrection (évoquée par la descente aux Limbes), Pentecôte, Ascension. Ces images dérivent en droite ligne des anciennes compositions. Elles peuvent se multiplier, se superposer en registres ; ainsi dans certaines églises de Cappadoce* ou, plus tard, à Monreale (v. Sicile), ou encore à Saint-Sauveur-in-Chora (auj. Kahriye Camii) de Constantinople ; elles peuvent aussi se combiner avec l’architecture. À l’église des Saints-Apôtres, l’Ascension était représentée dans la coupole : on l’y retrouvera à Sainte-Sophie de Thessalonique et à Saint-Marc de Venise. À Dhafni, c’est dans les trompes d’angle qui portent la coupole qu’on trouvera la Nativité et le Baptême. Mais l’adaptation nécessaire ne modifiera pas profondément les schémas canoniques.
Ces schémas, arrêtés à Constantinople pour l’Église nouvelle de Basile Ier, se retrouvent en mosaïques à Saint-Luc en Phocide, à la « Nea Moni » de Chio, à la chapelle du couvent de Dhafni. Dans les cycles de fresques, des rangées de saints représentés frontalement se substituent au revêtement de marbre qui occupe dans les autres cas la partie inférieure des parois. Avec le temps, on ajoutera des évocations de la vie des saints.
L’évocation de l’année liturgique, de la vie de l’Église à travers la suite de ses cérémonies, est comme enveloppée d’une signification plus haute : c’est la reprise même de toute l’économie du salut. Le Logos, incarné dans l’histoire, gouverne du haut des cieux le monde qu’il a délivré. Au xe et au xie s., l’exécution de toutes ces images se présente avec d’étonnants raffinements. La noblesse classique des attitudes, la sobriété de l’expression communiquent à des compositions soigneusement équilibrées une élégance parfois un peu froide, mais qui se charge souvent d’émotion contenue.
La miniature
Cette « renaissance macédonienne » a laissé d’autres témoignages de son goût, de sa piété, de son luxe impérial. Il s’agit de manuscrits somptueux, copiés et illustrés souvent dans les ateliers de Constantinople. On peut considérer comme représentant le sommet de cette série le psautier 139 de la Bibliothèque nationale de Paris, illustré de miniatures à pleine page qui sont de petits tableaux (37 × 26 cm) rappelant l’art alexandrin : David berger, jouant de la cithare dans un paysage d’arbres et de rochers, au milieu de son troupeau, est inspiré par la Mélodie ; Isaïe en prière est précédé de l’Aurore — un petit enfant — et suivi d’une admirable figure bleue, la Nuit ; de même la Pénitence, songeuse, préside au repentir de David, qui a reçu les reproches du prophète Nathan. D’autres scènes à nombreux personnages — le passage de la mer Rouge par exemple — appartiennent à une tradition antique différente, celle des bas-reliefs historiques romains.
D’autres manuscrits, homélies de saint Grégoire de Nazianze ou de saint Jean Chrysostome, ménologe de Basile II (Vatican), appartiennent aux mêmes ateliers et dépendent des mêmes modèles. D’autres, moins grandioses, valent par leur charme : ainsi les sermons du moine Jacques, aux images si fraîches. L’illustration des textes sacrés — Octateuque, livre des Rois, psautiers, évangiles surtout — a été traitée selon une méthode précise, où de petits tableaux accompagnent le texte d’un commentaire continu. Le célèbre rouleau de Josué (Vatican), à une tout autre échelle — il a dix mètres de long —, appartient à la même série : des tableaux de bataille, très romains, y sont réunis en bandes continues par l’adjonction de personnifications. C’est à la renaissance macédonienne qu’appartient ce goût des modèles antiques.
Un petit nombre de manuscrits échappent à la tradition officielle. Le plus célèbre est le psautier Kloudov (Moscou), où les illustrations, non encadrées, sont librement placées dans les marges et traitées avec fantaisie. Au lieu de donner du texte une interprétation historique, systématique, elles lui adjoignent un commentaire pittoresque des luttes religieuses contemporaines, c’est-à-dire de la crise iconoclaste : ce sont de vraies caricatures.
Entre le ixe et le xie s., on a recopié aussi des ouvrages scientifiques antiques : la Géographie de Ptolémée et la Topographie de Cosmas Indikopleustês, les Cynégétiques d’Oppien, les traités d’Apollonios de Cition ou de Nicandre. À côté des textes religieux, on gardait un intérêt pour la culture profane, même si elle ne progressait pas.
L’expansion de l’art byzantin
L’intérêt de ces manuscrits a été de répandre à travers l’Empire, et hors de ses limites, les formes de l’iconographie byzantine. Les artistes grecs, d’autre part, voyageaient. Déjà, pour la période pré-iconoclaste, on a pu chercher à suivre l’évolution de cet art à travers les peintures de Santa Maria Antiqua, à Rome. On en suit plus tard le mouvement dans des provinces lointaines, comme la Sicile, où les princes normands décoreront de mosaïques byzantines des monuments de type occidental. Comme aussi à Venise, où Saint-Marc ainsi que Torcello et d’autres sanctuaires de la Vénétie sont l’œuvre tantôt d’artistes byzantins, tantôt d’artistes locaux formés à leur école. Avec les conquêtes des empereurs macédoniens et des Comnènes, cet art va commencer de se répandre dans le monde slave, à partir du moment où les nouveaux royaumes se convertiront. Après la prise de Constantinople par les croisés en 1204, c’est dans les provinces que se poursuivra le mouvement artistique, là d’abord où certains membres de la dynastie avaient réussi à maintenir leur autorité — à Nicée ou à Trébizonde —, mais aussi en Macédonie, en Serbie (v. Yougoslavie) et en Bulgarie*.