Boulanger (Georges) (suite)
Le 27 janvier 1889, Boulanger semble avoir atteint son but : il est élu à Paris par 245 236 suffrages contre 162 875 au radical Édouard Jacques. On le presse de marcher sur l’Élysée, que Sadi Carnot se prépare à quitter. Boulanger ne se décide pourtant pas à franchir le Rubicon. Désir de prendre légalement le pouvoir un peu plus tard ou, plus simplement, hâte de retrouver Mme de Bonnemains, sa maîtresse ? En tout cas, ses hésitations vont causer sa perte.
La fin de l’aventure (1889-1891)
En effet, le gouvernement s’est ressaisi : le rétablissement du scrutin d’arrondissement, l’interdiction des candidatures multiples coupent la voie au système plébiscitaire. Constans, ministre de l’Intérieur du deuxième cabinet Tirard (22 févr. 1889 -14 mars 1890), fait courir le bruit d’une arrestation imminente du général Boulanger, qui gagne alors la Belgique, puis l’Angleterre. De son côté, le Sénat, transformé en Haute Cour, le condamne par contumace, pour atteinte à la sûreté de l’État, à la détention perpétuelle (14 août 1889). Ses amis le présentent aux élections cantonales ; mais il n’est élu que dans douze cantons sur quatre-vingts ; dans le XVIIIe arrondissement, il l’emporte sur Jules Joffrin mais il refuse de rentrer en France, si bien que son adversaire, malgré l’intervention éclatante de Déroulède, est validé (9 déc.). Un dernier essai, lors des élections municipales de 1890, ne donne rien. Boulanger prononce lui-même la dissolution du Comité national. Revenu en Belgique, il assiste Marguerite de Bonnemains dans ses derniers moments et, par désespoir sentimental, se suicide sur sa tombe au cimetière d’Ixelles le 30 septembre 1891. Ses obsèques donnent lieu à un grand rassemblement boulangiste, mais l’aventure est terminée.
Elle aura cependant des conséquences importantes. Le nationalisme revanchard, qui, jusqu’alors, était à gauche, passe à droite, tandis que les républicains du centre et de la gauche deviennent méfiants à l’égard de l’armée.
P. M.
M. Barrès, l’Appel au soldat (Fasquelle, 1900). / Branthôme, Der tapfere General Boulanger (H. Jonquières, Paris et Leipzig, 1931). / M. Duplay, le Général Boulanger (Éd. nationales, 1936). / A. Dansette, Du boulangisme à la révolution dreyfusienne, le Boulangisme, 1886-1890 (Perrin, 1938) ; le Boulangisme (Fayard, 1946). / P. Barlatier, l’Aventure tragi-comique du grand général Boulanger (les Éditeurs réunis, 1949). / G. Cahen-Salvador, le Procès du général Boulanger, 1886-1891 (France-Illustration, 1953). / H. Juin, le Pouvoir, pour quoi faire ? L’exemple du général Boulanger (Éd. fr. réunis, 1958). / H. Muller, le Général Boulanger, dictateur ou roi de cœur (Gallimard, 1959). / J. Néré, le Boulangisme et la presse (A. Colin, 1964). / F. Pisani-Ferry, le Général Boulanger (Flammarion, 1969).

