maladie génétique

Caryotype
Caryotype

Maladie due à la présence d'un ou plusieurs gènes défectueux (maladies géniques) ou à une anomalie du nombre des chromosomes (maladies chromosomiques).

1. Les mécanismes des maladies génétiques

Les maladies génétiques peuvent être ou non héréditaires, en ce sens qu'elles sont ou non transmises par les parents à leur descendance. Elles représentent des affections courantes dans l'espèce humaine, de par leur diversité plus que par le nombre de cas observés pour chacune d'entre elles. Si l'on considère leur ensemble, en y ajoutant les malformations congénitales, dues à des erreurs dans le déroulement du programme génétique du développement, la proportion des enfants touchés peut atteindre 5 % des naissances.

Pour en savoir plus, voir l'article génétique.

1.1. Les maladies géniques

Les maladies qui sont dues à la présence d'un ou plusieurs gène(s) défectueux dans le patrimoine génétique d'un individu, appelées maladies géniques, sont transmissibles au sein des familles. C'est le cas de la plupart, comme la myopathie de Duchenne, la mucoviscidose, le syndrome de Lesch-Nyhan. Les maladies monogéniques, qui ne dépendent que d'un seul gène, suivent les lois classiques de l'hérédité. Pour un certain nombre d'entre elles, la pathologie a pu être reliée au gène responsable, et les progrès de la recherche en génétique laissent espérer que l'on arrivera à localiser de plus en plus précisément l'endroit où se situe l'anomalie dans le génome.

1.2. Les maladies chromosomiques

En revanche, les maladies dites chromosomiques, dues à une anomalie du nombre de chromosomes, quand il s'agit d'erreurs dans le processus de formation des cellules sexuelles, ne sont pas héréditaires puisque les parents d'un enfant concerné ne sont pas porteurs de l'anomalie et peuvent avoir d'autres enfants indemnes. C'est le cas de la trisomie 21 ou syndrome de Down, du syndrome de Klinefelter, du syndrome de Turner.

1.3. Fonctions et organes atteints

Les fonctions physiologiques et les organes essentiels peuvent aussi servir de support au classement des maladies génétiques, même si ces dernières sont souvent responsables d'atteintes qui touchent plusieurs organes ou fonctions. Parmi les exemples de maladies les plus significatifs, on peut citer :

• pour l'appareil digestif, la mucoviscidose, l'ictère chronique non hémolytique ;

• pour la peau, l'albinisme, la dysplasie hypodermique, l'ichtyose, le xeroderma pigmentosum ;

• pour les yeux, l'aniridie, la rétinite pigmentaire, le daltonisme, certaines cataractes ;

• pour l'appareil génito-urinaire, le syndrome de Fanconi ou le diabète insipide néphrogène ;

• pour le sang, la drépanocytose, l'elliptocytose, les thalassémies, la maladie de Willebrand, la thrombasthénie de Glanzmann ou encore le déficit en facteur Stuart (facteur X) de la coagulation ;

• pour le système nerveux, la maladie de Friedreich et certaines variétés d'épilepsie ;

• pour le système endocrinien, le diabète insipide hypophysaire ou l'hyperplasie surrénalienne virilisante congénitale ;

• pour l'appareil musculosquelettique, des maladies myotoniques, des paralysies périodiques et diverses dystrophies ;

• comme troubles du métabolisme, le diabète insulinodépendant, l'intolérance au fructose et au lactose, la cystinose, la lithiase oxalique, les hyperlipidémies, la phénylcétonurie ou les maladies lysosomales.

1.4. Différentes manifestations

Parmi les maladies génétiques, certaines ont une issue fatale, tandis que d'autres, les intolérances héréditaires à certaines substances médicamenteuses par exemple, ne s'expriment que dans des conditions particulières et peuvent même passer totalement inaperçues. Selon les cas, une même maladie peut d'ailleurs revêtir des formes légères ou très graves : transmise par un seul des deux parents, une anomalie de l'hémoglobine est souvent bénigne, mais la même anomalie transmise par les deux parents peut être très grave.

À côté des maladies héréditaires bien définies, il existe une hérédité de terrain, dite multifactorielle car dépendant de nombreux variants génétiques dont les effets s’additionnent : terrain allergique favorable à l'asthme ou à l'eczéma, terrain propice à la goutte, prédisposition aux maladies infectieuses, aux affections cardiovasculaires ou aux proliférations tumorales.

2. Mots clés

Amniocentèse

Prélèvement de liquide amniotique au cours de la grossesse pour établir le caryotype du fœtus.

Burkitt (lymphome de)

Tumeur des ganglions lymphatiques, associée au virus d'Epstein-Barr.

Caryotype

Photographie des chromosomes classés par paires.

Lesch-Nyhan (syndrome de)

Maladie génique (déficience enzymatique) entraînant une production excessive d'acide urique responsable d'encéphalopathie et d'arriération mentale.

Mutation

Changement dans la séquence des nucléotides de l'ADN.

Myasthénie

Maladie de l'adulte, caractérisée par une grande fatigabilité musculaire, par blocage de la transmission de l'influx nerveux aux muscles.

Nucléotide

Composant élémentaire des acides nucléiques (ADN et ARN) formé d'une molécule de sucre (pentose), d'un groupement phosphate et d'une base azotée. (La séquence des bases détermine le code génétique.)

Sonde

Séquence d'ADN ou d'ARN marquée (par fluorescence, par exemple) complémentaire de la séquence à rechercher dans le génome d'un individu.

Système HLA (Human Leukocyte Antigen)

Système de compatibilité tissulaire, impliqué dans le rejet de greffes.

Thalassémie

Maladie génique qui provoque une anomalie du sang, par la présence, en proportion variable, d'une hémoglobine de type fœtal.

3. Les maladies génétiques héréditaires

3.1. Les maladies héréditaires autosomiques

Lorsque le gène responsable d'une maladie est porté par l'une des 22 paires de chromosomes identiques dans les deux sexes (les autosomes), la maladie est dite autosomique. Pour qu'il y ait maladie, il faut que le gène s'exprime : il peut le faire soit à l'état unique, c'est-à-dire en étant porté par un seul des chromosomes d'une paire (hétérozygote), et il est alors dominant, soit à l'état double, c'est-à-dire porté par les deux chromosomes de la paire (homozygote), auquel cas il est récessif. En théorie, les maladies dominantes sont transmises à la descendance lorsqu'un parent au moins est lui-même atteint. Toutefois, le gène peut avoir une expressivité variable et la maladie plusieurs niveaux de gravité, voire ne pas se manifester, ce qui complique l'étude lorsque le seul critère pris en compte est l'apparition de la maladie. Des formes frustes de maladies récessives, par ailleurs sévères à l'état homozygote, peuvent s'exprimer à l'état hétérozygote comme si elles étaient dominantes, ainsi la thalassémie mineure, la drépanocytose latente. Les maladies récessives sont transmises à la descendance (enfant homozygote pour le gène considéré) lorsque les deux parents possèdent chacun au moins un exemplaire du gène en cause.

La mucoviscidose fait partie des maladies héréditaires autosomiques et récessives. Son importance est considérable aussi bien par sa gravité que sa fréquence puisqu'elle concerne environ 1 enfant sur 2 000 en France, et qu'elle entraîne des troubles permanents et incurables, touchant surtout les poumons et le pancréas. Les troubles pulmonaires sont dus à la production d'un mucus épais entraînant des difficultés respiratoires, et les troubles digestifs à une insuffisance pancréatique, d'où l'autre dénomination de fibrose kystique du pancréas. La détection néonatale de la maladie est fondée sur un test très simple, visant à déterminer la concentration en ions chlorure de la sueur du nourrisson, qui est anormalement élevée si l'enfant est atteint. L'épopée de la recherche sur la mucoviscidose illustre parfaitement la puissance des dernières acquisitions techniques en génétique, car toutes les tentatives classiques de localisation précise du gène responsable et d'identification de la protéine étaient restées vaines jusqu'en 1989. Le gène en cause (gène CF) a été localisé avec précision sur le bras long du chromosome 7, et sa taille estimée à 250 kilobases (soit 25 000 nucléotides), ce qui en fait un très grand gène. Son analyse chez de nombreux malades a permis de repérer la mutation principale responsable du dysfonctionnement de la protéine impliquée. Il s'agit d'une délétion (ou perte) de trois bases particulières, retrouvée chez 68 % des malades, les autres malades présentant vraisemblablement des mutations différentes, encore inconnues. Ces résultats permettent désormais, grâce à l'emploi de sondes génétiques, de recourir à un diagnostic prénatal donnant une certitude dans près de la moitié des cas, et de dépister le gène morbide chez les deux tiers des individus sains porteurs d'un seul gène muté. En ce qui concerne la thérapeutique, la découverte du gène responsable de la maladie ne constitue pas une assurance de traitement ultérieur, mais ouvre des perspectives nouvelles de prévision et de prévention.

3.2. Les maladies héréditaires liées au sexe

La myopathie de Duchenne, ou dystrophie musculaire de Duchenne (notée DMD), est une maladie dégénérative de la fibre musculaire. Elle est héréditaire, récessive, et touche principalement des garçons (1 sur 3 500). Les signes d'alarme sont l'apparition de troubles de la marche vers 3 ans, puis la maladie évolue vers une atrophie musculaire progressive. Les enfants touchés sont dès lors condamnés à l'impotence et à une insuffisance respiratoire, et la mort survient généralement avant 20 ans. Il existe une forme atténuée de la maladie, 10 fois moins fréquente que la forme complète, dénommée myopathie de Becker (BMD).

Ce tableau dramatique est dû à la mutation d'un gène situé sur le chromosome X, support de la transmission de la myopathie des mères à leurs fils. Les mères « conductrices » possèdent donc un exemplaire du gène muté sur l'un de leurs chromosomes X et un exemplaire du gène normal sur l'autre chromosome X. Si elles transmettent le chromosome X porteur de l'anomalie à un fils, ce dernier sera atteint par la maladie (comme pour l'hémophilie). La mutation concerne le gène commandant la synthèse d'une protéine, la dystrophine, qui ne peut plus être synthétisée chez les myopathes. La DMD peut exceptionnellement toucher les filles, à cause d'une translocation « X-autosome » (échange de fragments entre un chromosome X et un autre chromosome) où le point de cassure sur le chromosome X est situé au niveau du locus DMD, avec inactivation préférentielle du chromosome X intact.

Le gène de la DMD a été localisé précisément sur le bras court du chromosome X et a surtout été isolé et séquencé (en 1986 par une équipe américaine), et les chercheurs ont pu repérer son ARN messager et la protéine pour laquelle il code. Le gène de la DMD est le plus grand de tous les gènes connus, puisqu'il représente environ 2 000 kilobases (soit 1 000 fois plus que le gène de la β-globine). Ce gigantisme pose des problèmes particuliers, comme d'en compliquer l'analyse en raison de la variété du siège des lésions, ou d'interdire le clonage (reproduction identique) du gène entier. Malgré ces difficultés, les connaissances acquises au cours des dernières années font espérer, à défaut d'une nouvelle stratégie thérapeutique, l'élargissement des possibilités de diagnostic grâce à l'emploi de sondes génétiques de plus en plus spécifiques. La tendance s'oriente vers l'emploi de ces sondes pour un diagnostic prénatal précoce, fondé sur la détection du gène déficient chez le jeune embryon au sein des familles à risque.

4. Marqueurs de susceptibilité à des maladies

Pour une maladie dont la composante héréditaire est connue, le facteur génétique sera déterminant. Cependant, il existe un certain nombre de maladies que l'on peut associer à un marqueur génétique, de façon plus ou moins évidente, et sans nécessairement établir une relation de cause à effet. Les associations les plus étudiées sont celles entre les antigènes du système de compatibilité tissulaire HLA et certaines maladies. Ainsi, les chercheurs ont noté une fréquence significativement plus élevée de l'antigène B27 chez les sujets atteints de spondylarthrite ankylosante, de polyarthrite psoriasique, par rapport aux groupes témoins. Une relation a été aussi établie entre la présence d'antigène B8 et/ou DR3 et des maladies comme la myasthénie, le lupus érythémateux disséminé, le diabète juvénile insulinodépendant, les maladies de Basedow, d'Addison… Il faut noter que l'interprétation de ces associations n'est sûrement pas univoque. Même dans les cas les plus nets (B27 et spondylarthrite ankylosante), la majorité des sujets portant l'antigène en question n'ont pas la maladie : les phénomènes associés à la présence d'antigènes HLA ne sont pas les seuls facteurs étiologiques en cause. On peut d'ailleurs remettre en question la notion même de susceptibilité, en se demandant si le gène associé à la maladie est lui-même le gène de susceptibilité ou simplement un gène marqueur, associé préférentiellement au véritable gène de susceptibilité. Un tout autre problème est celui posé par l'apparition de chromosomes anormaux au cours d'une maladie, et coïncidant avec le début de celle-ci. C'est le cas pour un cancer, la leucémie myéloïde chronique, qui s'accompagne toujours de la présence d'un chromosome anormal : le chromosome de Philadelphie, correspondant à une translocation entre les chromosomes 22 et 9 le plus souvent. Dans ce cas, c'est la dérégulation d'un gène, provoquée par la translocation, qui est à l'origine du processus tumoral.

5. Moyens d'étude

Le diagnostic d'une maladie génétique dépend du type de l'anomalie. Les anomalies chromosomiques seront mises en évidence par l'établissement du caryotype, qui consiste à prélever des cellules en voie de division, à les traiter in vitro afin de bloquer la division et d'obtenir des chromosomes sur une lame. Après des colorations spécifiques, les chromosomes sont photographiés au microscope, puis découpés sur les photos pour être classés par paires d'autosomes (22 paires) et de chromosomes sexuels (1 paire). Le caryotype permet de déceler les anomalies du nombre et certaines anomalies de structure comme des translocations. Il peut être établi un diagnostic prénatal chez des couples à risque (ayant des enfants atteints, ou dont l'un des membres est atteint d'une anomalie chromosomique équilibrée chez lui mais pouvant se transmettre sous forme déséquilibrée à sa descendance) par prélèvement de villosités choriales ou par amniocentèse, ou systématiquement chez des femmes enceintes âgées de plus de 38 ans en ce qui concerne la recherche d'une trisomie 21.

Le diagnostic d'une maladie génique passe par une méthodologie spécifique et implique que l'on sache quelle anomalie on recherche. Deux approches sont possibles : l'analyse de l'expression de l'anomalie du gène ou l'analyse du gène lui-même. Dans la plupart des cas, c'est la première qui est utilisée, indirectement, par l'étude d'une expression biochimique de la maladie (par exemple le dosage des enzymes intestinales pour la mucoviscidose), ou directement par l'étude de la protéine codée par le gène (les facteurs de la coagulation pour l'hémophilie, l'hémoglobine pour les hémoglobinopathies). L'analyse du gène lui-même est beaucoup plus récente, car elle fait appel à des techniques très fines et spécialisées. Le diagnostic d'une mutation est presque toujours indirect et repose sur l'identification de la portion du chromosome portant le gène muté grâce à l'utilisation de sondes moléculaires.

6. Perspectives

La connaissance détaillée de l'ensemble des gènes humains transmis aux descendants a pour objectif la prévision des maladies génétiques, le conseil génétique aux couples susceptibles de transmettre une maladie héréditaire à leur enfant et le diagnostic prénatal des maladies héréditaires.

Par ailleurs, les thérapies géniques sont susceptibles de corriger ou de remplacer le gène altéré par la maladie.