Le deuxième grand volet de cette politique concerne plus directement les aides à l'industrie. Les crédits à l'industrie augmentent de 23,7 %. Ils doublent si l'on tient compte de la dotation en capital accordée aux entreprises publiques (11 milliards de F).

À l'inverse, les dotations attribuées au FDES sont en chute libre, tombant de 9,2 milliards de F pour 1982 à 1 milliard de F pour 1983. Cette évolution sensible traduit le souhait du gouvernement de confier à un secteur bancaire très largement nationalisé le soin de soutenir l'industrie.

Nostalgie

S'agissant de l'aide aux petites et moyennes entreprises, le budget rompt avec le semi-dirigisme qui prévalait jusqu'à présent. Le gouvernement semble avoir fait sien le théorème de Gattaz (du nom du président du Conseil national du patronat français) selon lequel « il vaut mieux alléger les entreprises que les aider ».

Le ministre du Budget prévoit que « chaque fois que possible, des subventions seront remplacées par des allègements d'impôt ». Ce faisant, le gouvernement renoue avec le principe des aides automatiques, dénoncées avant mai 1981 par le parti socialiste comme étant « aveugles » et ne permettant donc pas d'orienter l'action économique.

Le troisième grand volet industriel de ce budget symbolise une certaine nostalgie keynésienne, en même temps qu'il traduit la volonté de maintenir l'activité dans un secteur peu inflationniste et faiblement importateur. Il s'agit du programme des grands travaux et du logement.

Le budget de l'urbanisme et du logement progresse de près de 18 %. Deux grandes priorités lui sont assignées : la réhabilitation des logements anciens (200 000 logements contre 140 000 en 1982) et les économies d'énergie.

Au financement budgétaire s'ajoute un fonds spécial créé hors budget et alimenté pour partie par une taxe spéciale sur les produits pétroliers. Les experts de l'opposition en tirent argument pour accuser le gouvernement de dissimuler l'augmentation des prélèvements obligatoires.

Emploi

Ce jeu d'hypothèses laisse peu de place à l'emploi comme « priorité des priorités », ce qui était son statut dans le budget précédent. À dater du 12 juin 1982, les formules empreintes de lyrisme sur le « fléau du chômage » disparaissent des discours du Premier ministre. Chez le ministre délégué à l'Emploi, l'ambition n'est plus d'inverser les courbes mais de les tasser.

Après l'échec du budget de relance de 1982, l'emploi tend à redevenir dans le budget de 1983 ce qu'il était sous Raymond Barre : la résultante de la politique économique. Les mesures spécifiques de soutien à l'emploi sont, ainsi, totalement réorientées.

Les aides à l'embauche qui dominaient dans les pactes pour l'emploi mis en place par les différents ministres du Travail des gouvernements Barre sont remplacées par des actions structurelles visant à faciliter l'adéquation de l'offre à la demande de main-d'œuvre. L'exonération des charges sociales pour l'embauche des jeunes, les aides accordées pour l'embauche d'un premier salarié dans l'industrie et pour les stages pratiques en entreprise sont supprimées.

Stages

Ce faisant, le gouvernement démontre le peu de crédit qu'il accordait à des formules qui avaient la fâcheuse réputation de développer la précarité de l'emploi plus que de favoriser les embauches. L'exemple des stages pratiques en entreprise — supprimés dès 1981 — est, à cet égard, significatif : la moitié seulement des jeunes étaient durablement embauchés après leur stage.

Ces formules sont remplacées, pour l'essentiel, par des stages de formation professionnelle. Deux grands programmes sont prévus. Ils concernent les jeunes de 16 à 18 ans et les chômeurs de longue durée. Conséquence : les moyens affectés à la formation professionnelle s'accroissent de plus de 30 %.

Dans le même temps, les programmes de créations d'emploi directes sont remis en cause. Outre la révision en baisse des objectifs de recrutement des fonctionnaires, le budget limite à 5 000 (contre 10 000 en 1982) le nombre d'emplois d'initiative locale financés par le ministère de l'Emploi. Cette réduction s'accompagne d'une réorientation. Le secteur associatif est écarté du champ d'application au profit des petites et moyennes entreprises susceptibles de rentabiliser ces emplois en une année.