Cependant l'intérêt des utilisateurs pour la gomme naturelle s'est réveillé, moins dans l'industrie du pneumatique, pour des raisons techniques, que dans celle des autres produits (convoyeurs, etc.). Mais ce réveil ne peut compenser les effets du ralentissement mondial et, surtout, ceux de la crise automobile, la plus grave depuis quarante ans. La conséquence de cet état de chose est un vif fléchissement de la consommation et, partant, de la production, accompagné d'un gonflement très appréciable des stocks. Ceux-ci atteignent, au début de l'été, près de 2 millions de tonnes, soit plus de six mois de consommation mondiale. De son côté, la production de caoutchouc synthétique est tombée au niveau le plus faible depuis juillet 1971, en diminution de 20 % d'une année à l'autre.
Les producteurs de gomme naturelle, sous la conduite de la Malaisie, tentent de réagir, d'abord en réduisant de 10 % les livraisons. Réunis à Kuala Lumpur, ils se mettent d'accord sur la constitution d'un stock régulateur, comme pour l'étain. Mais le problème du financement d'un tel stock se pose de façon aiguë : le Fonds monétaire international pourrait apporter son aide, de même qu'un groupe financier européen.
Produits agricoles exotiques
Chute du cours du cacao. Après avoir flambé en 1973 et 1974, les prix quadruplant pendant ces deux années et doublant pratiquement au premier semestre 1974, une réaction assez violente est enregistrée au second semestre 1974 et, surtout, au premier semestre 1975. Les excès de la spéculation et l'exagération de la hausse des prix provoquent, en retour, une diminution de la consommation (– 27 % en Grande-Bretagne et – 17 % en France). De plus, les prévisions portant sur un déficit de la récolte africaine se renversent : la chute des cours atteint 50 % sur les sommets effectifs de 1974. Mais, là comme ailleurs, le marché semble se réveiller après une baisse si importante, et les opérateurs restent attentifs aux moindres nouvelles relatives à l'importance des récoltes.
Café
Redressement en vue après le marasme. Après avoir atteint leurs plus hauts niveaux en mai 1974, les cours du café fléchissent sensiblement à la fin de 1974, perdant plus de 25 %, et continuent de s'affaiblir au premier semestre 1975, revenant en dessous des cotations de fin 1973.
Les producteurs d'Amérique centrale décident alors, pour freiner la baisse, de stocker 30 % de leur récolte, grâce à un concours de 80 millions de dollars fourni par le Venezuela, et préparent activement, avec les pays africains, le renouvellement de l'accord international sur le café, prévu pour l'automne. Au seuil de l'été, la forte diminution des stocks aux États-Unis, premier consommateur mondial, laisse présager un raffermissement des cours.
Oléagineux
Forte détente. À la hausse violente de 1974 succède une nette décrue des prix, plus sensible pour l'arachide que pour le soja. La fin des achats spéculatifs et le déstockage ont joué leur rôle, là comme ailleurs. La tendance est à la stagnation sur les marchés.
Les soubresauts du sucre
Les soubresauts du marché mondial du sucre illustrent l'incohérence qui règne sur les marchés des produits agricoles en l'absence de véritables mécanismes régulateurs. Le marasme le plus total, après une flambée inouïe, tel est le bilan de dix-huit mois de folle spéculation.
L'envolée vertigineuse. De 1 000 francs la tonne à Paris sur le marché libre, en octobre 1973, et de 100 livres la tonne à Londres, le prix du sucre monte vertigineusement pour atteindre, en novembre 1974, respectivement 8 000 francs et 650 livres sterling. Il souffle sur les Bourses de commerce, notamment à Paris, un vent de douce folie. Un climat de semi-pénurie est créé, il est vrai, par une série de facteurs défavorables et concomitants : dangereuse diminution des stocks face à une augmentation régulière de la consommation, très mauvaises conditions atmosphériques pour la récolte européenne de betteraves au seuil de l'hiver 1974-75, typhon dans les pays producteurs de canne à sucre, embargo décrété par la Pologne sur ses livraisons à l'exportation pour alimenter son marché intérieur, achats à prix record par les pays du Proche-Orient et du Moyen-Orient et, par-dessus le marché, affolement des ménagères qui, par endroits, se mettent à dévaliser les épiceries et à stocker.
Spéculation
Une spéculation fiévreuse se développe, dont les excès incontrôlés conduisent inévitablement à un renversement de tendance brutal. Au début de décembre, le marché du sucre blanc à la Bourse de commerce de Paris « saute » littéralement, dans une odeur de scandale, les positions à la hausse prises inconsidérément par certains courtiers pour le compte de clients particuliers peu avertis, n'ayant pu être dénouées en raison de la rapide chute des cours.
Rechute
Les prix retombent bien plus vite qu'ils ne sont montés, revenant à 150 livres la tonne à Londres et à 15 cents le livre-poids à New York (contre 65 cents au plus haut). À Paris, le marché des sucres blancs est toujours fermé en raison de nombreux procès mettant en jeu des sommes considérables qui bloquent sa réouverture. Celle-ci est espérée pour le mois de septembre. En attendant, il fallait bien le prévoir, les négociants de Londres, spécialisés jusqu'à maintenant dans le sucre roux, ouvrent à leur tour un marché des sucres blancs, dont Paris avait le monopole.