Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Van Leeuwenhoeck (Antonie) (suite)

Étudiant de façon quasi systématique toutes les particules, solides ou liquides, végétales, animales ou humaines, il communique le résultat de ses découvertes à la Royal Society de Londres et à l’Académie des sciences de Paris. L’ensemble de ses travaux, publiés à Leyde sous le titre Arcana naturae ope exactissimorum microscopiorum detecta, a été regroupé dans les Opera omnia (1715-1722).

En 1673, il retrouve dans son propre sang les globules rouges entrevus par Jan Swammerdam et Malpighi, et il étudie les mouvements de ces globules dans le plasma. Il suit également la progression du sang dans les capillaires de la queue du têtard, et il démontrera au tsar Pierre le Grand, de passage à Delft en 1698, que le sang circule dans les capillaires d’une larve d’Anguille : ainsi est confirmé, après M. Servet et W. Harvey, le caractère cyclique et fermé de la circulation sanguine.

En 1677, il décrit les spermatozoïdes, découverts quelque temps auparavant par un étudiant en médecine, Stephen Louis Hammon. Deux intuitions géniales : « Dans le sperme d’un seul Cloporte, il y a plus d’animalcules que d’Hommes sur la Terre » ; « les spermatozoïdes sont de deux sexes », c’est-à-dire de deux sortes en nombre égal déterminant le sexe, ce que confirme aujourd’hui la génétique. Une erreur : la thèse « animalculiste », selon laquelle l’œuf vierge n’est qu’un support et n’apporte aucun élément au patrimoine héréditaire, qui viendrait entièrement du sperme.

Ses autres recherches concernent : la structure comparée de la tige chez les plantes mono- et dicotylédones ; les Rotifères, dont il donne la description la plus précise et observe la reviviscence ; les Infusoires ; le bourgeonnement de l’Hydre ; la rotation de l’embryon dans l’œuf des Moules d’eau douce ; le cycle reproductif de divers Insectes (Puceron [chez qui Van Leeuwenhoeck pressent la parthénogenèse], Mouche, Fourmi [chez qui Van Leeuwenhoeck est le premier à distinguer nettement entre l’œuf et la nymphe]) ; la structure du muscle strié et celle du cerveau ; la structure lamellaire du cristallin ; les Algues microscopiques ; les vaisseaux scalariformes des Fougères. La masse de ses observations microscopiques s’exprime en un chiffre : 375 notices dans les Philosophical transactions.

Retenons enfin un grand mérite philosophique de Van Leeuwenhoeck : le savant néerlandais était un ennemi résolu de la doctrine de la génération spontanée, en dépit de la tentation qu’il aurait pu en avoir en présence de ce grouillement incroyable de formes microscopiques dont, deux siècles plus tard, les « hétérogénistes », adversaires de Pasteur, croiront encore pouvoir tirer argument en leur faveur.

H. F.

Van Loo (les)

Famille de peintres.


Bien que le grand homme de la famille, Carle, ait perdu dès la fin du xviiie s. son auréole, sûrement abusive, de « premier peintre de l’Europe » (Grimm) et n’apparaisse plus que comme un bon artiste de second rang, les Van Loo demeurent comme un des exemples les plus remarquables de ces « dynasties » qui jouèrent un si grand rôle dans l’ancienne France. Celle-ci frappe par sa durée comme par son caractère européen. Venus de Hollande à Paris vers 1660, les Van Loo se répandent à travers l’Europe : on les trouve en Provence, en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Prusse, généralement au service des princes.

De Jan, le « fondateur », on sait seulement qu’il vit et travaille à Sluis en Zélande, où naît en 1614 son fils Jacob. Celui-ci s’installe en 1642 à Amsterdam et y fait une honorable arrière de portraitiste. Ce sont probablement les troubles politiques de Hollande qui l’amènent à Paris. Reçu à l’Académie en 1663, il meurt en 1670.

Son fils Louis Abraham (Amsterdam v. 1656 - Nice 1712) « descend » vers le Midi : marié en 1683 à la fille d’un sculpteur aixois, devenu Provençal d’adoption, il travaille pour l’arsenal de Toulon (il signe à l’hôpital de la Marine un Saint Dominique recevant le rosaire) et termine sa carrière à Nice.

C’est avec ses fils que s’étend et se disperse l’activité de la famille. Si le destin du second, Joseph — qu’on trouve à Paris entre 1703 et 1740 —, apparaît terne, son aîné, Jean-Baptiste (Aix-en-Provence 1684 - id. 1745), fait figure d’Européen nomade. Marié à Toulon, il peint de nombreux tableaux pour les églises de la région, se rend ensuite à Gênes et Turin, où il travaille pour le roi de Sardaigne Victor-Amédée II et pour son cousin le prince de Carignan, puis à Rome. Il arrive à Paris en 1719, juste à temps pour être ruiné par la banqueroute de Law. Son protecteur, le prince de Carignan, le loge dans sa demeure parisienne et l’emploie comme décorateur. Reçu à l’Académie en 1731, il part cinq ans plus tard pour Londres. Il y réussit comme portraitiste (Robert Walpole, National Portrait Gallery, etc.), mais revient en 1742 finir ses jours à Aix, dans ce « pavillon de Vendôme » qu’il avait acheté et qui est devenu une sorte de musée Van Loo. Éclipsé par la gloire de son frère cadet, il le surpasse pourtant dans son Triomphe de Galatée (Ermitage, Leningrad), sa Diane et Endymion (Louvre) par l’élégance des figures et le moelleux du coloris.

De ce cadet, Charles André, dit Carle (Nice 1705 - Paris 1765), la formation appartient à l’Italie. Orphelin à sept ans, il est recueilli par Jean-Baptiste, qui l’emmène à Turin et à Rome. Par la suite, à Paris, son habileté de dessinateur lui vaut très vite un premier prix de l’Académie, que suit en 1724 le prix de Rome. Les crédits se faisant attendre, ce n’est qu’en 1727 qu’il retrouve l’Italie, accompagné de ses neveux et du jeune Boucher*. Triomphant à l’Académie de Saint-Luc avec son Festin de Balthazar, peignant des fresques dans les églises romaines, dessinant avec acharnement d’après les maîtres italiens, il voit croître sa renommée, passe au service du roi de Sardaigne et participe à la décoration de son château de Stupinigi. Revenu à Paris en 1735, admis à l’Académie (Apollon écorchant Marsyas), professeur dès 1737, son ascension officielle, favorisée au début par Mme de Pompadour, se poursuivra sans arrêt : directeur de l’École des élèves protégés en 1749, il finira directeur de l’Académie et premier peintre du roi. Le roi de Danemark, l’impératrice de Russie collectionnent ses œuvres, le roi de Prusse le réclame (se trouvant trop âgé, Van Loo lui envoie son neveu).