foi
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin fides, « confiance », « fidélité ».
Philosophie de la Religion
Attitude de l'esprit qui conjoint la fidélité à l'engagement, la croyance en l'existence de Dieu et la confiance dans sa justice.
Le mot hébreu hemeth, qui désigne dans l'Ancien Testament la foi ou la fidélité, renvoie à la promesse passée entre Dieu et son peuple. Cependant la foi prend tout son sens dans le christianisme, dans la mesure où ce dernier se conçoit historiquement comme le nouvel âge de la promesse, dans lequel la « justice de la loi » est remplacée par la « justice de la foi »(1). La foi se substitue ainsi aux œuvres, qui ne manifestent pas l'adhésion véritable du cœur : c'est de la méditation de Paul qu'est ainsi issue la théologie luthérienne, dans laquelle la foi constitue une véritable régénération du pécheur en un « nouvel homme »(2).
Dans cette perspective, la foi se substitue également à l'œuvre de la raison : Luther rejette ainsi les tentatives scolastiques pour « raisonner » la croyance et l'adhésion du cœur. Pourtant la conciliation de la foi et de la raison, dans laquelle c'est la foi elle-même qui recherche l'intelligence(3), est un des piliers de la théologie chrétienne. Dans le débat moderne entre une conception mutuellement exclusive de la foi et de la raison (conception qui considère généralement la foi du point de vue de l'affect intérieur) et une conception conciliatrice (dans laquelle la raison ne fait qu'établir discursivement ce dont la foi délivre toujours déjà la calme certitude(4)), c'est une limite de la raison par la foi qui se dégage peu à peu.
Kant fait de cette limitation un usage critique, en déterminant ce qui relève des attributions légitimes de la raison humaine, et en accordant que la croyance seule, c'est-à-dire le passage à l'attitude pratique, détermine la possibilité pour nous d'outrepasser cette limite. Le fameux aveu « j'ai donc dû supprimer le savoir pour lui substituer la croyance »(5) ne fait qu'introduire à la foi rationnelle, c'est-à-dire à cette confiance en l'existence indémontrable d'une liberté réellement inconditionnée en l'homme.
Laurent Gerbier
Notes bibliographiques
- 1 ↑ C'est un thème fondamental chez saint Paul (en particulier dans l'Épître aux Romains).
- 2 ↑ Luther, M., Préface à l'épître de saint Paul aux Romains (1522), tr. Ph. Büttgen, dans De la liberté du chrétien, Seuil, Paris, 1996, p. 84 sq.
- 3 ↑ Le premier titre de l'opuscule de saint Anselme consacré à la preuve de l'existence de Dieu est Fides quærens intellectum, « la foi à la recherche de l'intelligence » (expression empruntée à saint Augustin).
- 4 ↑ Leibniz, G. W., Théodicée, « Discours de conformité de la foi avec la raison », édition J. Brunschwicg, GF, Paris, 1969, p. 50 sq.
- 5 ↑ Kant, E., Critique de la raison pure, préface de 1787, tr. Barni & Archambault, GF, Paris, 1987, p. 49.