axiome

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du grec axiôma, de axioun, « juger digne ».

Philosophie Antique

Proposition évidente par elle-même, qui constitue à ce titre le principe indémontrable d'une science.

Euclide utilise déjà des axiomes sous l'appellation de « notions communes »(1). Mais le terme apparaît pour la première fois dans son sens épistémologique chez Aristote, qui se réfère à l'usage des mathématiciens : « Les [principes] communs, que l'on appelle “axiomes” sont les principes à partir desquels on démontre. »(2). Il en donne comme exemple le troisième axiome d'Euclide : « Si de deux [quantités] égales, on enlève deux [quantités] égales, les restes sont égaux »(3), principe commun à l'arithmétique et à la géométrie. Mais, pour Aristote, il y a aussi des principes communs à toutes les sciences, comme le principe de contradiction et le principe du tiers exclu(4). Tous les axiomes sont des propositions nécessaires, que doit connaître quiconque apprend une science(5).

Les stoïciens iront à contre-courant de cet usage en nommant axiôma tout énoncé (lekton) vrai ou faux(6). Dans l'école platonicienne, le terme retrouve son sens épistémologique et est explicitement défini comme une proposition évidente par soi(7).

Jean-Baptiste Gourinat

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Euclide, Éléments, « Notions communes », 1-5.
  • 2 ↑ Aristote, Seconds Analytiques, I, 10, 76b13-14.
  • 3 ↑ Ibid., I, 10, 76a41 ; I, 11, 77a31.
  • 4 ↑ Ibid., I, 11, 77a10 ; 77a30.
  • 5 ↑ Ibid., I, 10, 76b23-24 ; 2, 72a16-17.
  • 6 ↑ Diogène Laërce, VII, 65.
  • 7 ↑ Galien, Institution logique, I, 5 ; Proclus, les Commentaires sur le premier livre des Éléments d'Euclide, Blanchard, Paris, 1940, p. 171.

Épistémologie

Proposition admise sans démonstration qui, conjoint avec d'autres axiomes, prend sens comme élément du corps premier d'une théorie déductive.

La définition proposée ci-dessus suppose franchies d'importantes étapes de l'élaboration du concept. L'axiome, chez Aristote ou Euclide, a bien un sens isolé, indépendamment des autres énoncés premiers admis. C'est un principe général (non lié à une science particulière), indispensable à tout apprentissage scientifique, et qui n'est pas susceptible de démonstration. Euclide les nomme « notion commune », par exemple : « les choses égales à une même chose sont égales entre elles », « et le tout est plus grand que la partie ». L'idée qu'un axiome doive être évident, donné par l'intuition et, en ce sens, nécessaire et indiscutable, a été dominante jusqu'à la crise ouverte par l'établissement des géométries non-euclidiennes, à la fin du xixe s. On doit cependant mentionner les thèses leibniziennes selon lesquelles il convenait de réduire, par démonstration, le nombre des axiomes euclidiens (tâche envisagée déjà par Proclus, et tout prés de lui par Roberval) ; le seul énoncé absolument indémontrable devant être finalement l'axiome de l'identité.

Les théories axiomatiques formelles dont un modèle est donné par les Fondements de la géométrie de D. Hilbert ont transformé le statut des axiomes : ils n'ont, en principe, pas de rapport avec l'intuition et surtout, logiquement associés à d'autres, ils acquièrent un caractère définitoire si bien que la distinction entre axiomes d'un part et définitions de l'autre s'efface ; la définition étant dès lors implicite.

Vincent Jullien

→ contradiction, lekton