Nicolas Léonard Sadi Carnot
Physicien français (Paris 1796-Paris 1832).
Fils aîné de Lazare, il est, comme son frère Hippolyte, immergé dès sa jeunesse à la fois dans le monde de la science et dans celui de la politique. En 1812 (à 16 ans, l'âge minimal d'admission), il entre à l'École polytechnique, où il aura notamment pour professeurs Ampère, Gay-Lussac et Arago. Il en sort premier, en 1814, et, après avoir pris part à la défense de Paris, il entre comme élève sous-lieutenant à l'École du génie de Metz, où il passera deux ans.
Après les Cent-Jours, en 1815, son père est proscrit et part en exil à Magdebourg. Devenu capitaine du génie, mais voyant son avancement retardé par la disgrâce de son père, Sadi Carnot se fait mettre en disponibilité en 1819 et s'installe à Paris, où il s'applique à accroître ses connaissances dans les domaines les plus variés. Il fréquente le musée du Louvre et le Théâtre-Italien autant que le Jardin des Plantes et le Conservatoire des arts et métiers. Il suit assidûment les cours de la Sorbonne et du Collège de France, de l'École des mines et du Muséum. Particulièrement intéressé par le développement industriel, il visite des usines et s'initie aux procédés de fabrication. Il se passionne aussi pour l'économie politique, pour la musique, et va jusqu'à pratiquer la gymnastique et la danse. C'est à cette époque qu'il écrit ses réflexions sur le fonctionnement des moteurs thermiques. Après avoir repris du service pendant quelques mois, en 1827, comme ingénieur militaire, il démissionne et retourne à Paris. Il reprend alors ses recherches. En 1831, il entreprend d'étudier les propriétés physiques des gaz et des vapeurs, et spécialement la relation entre leur température et leur pression. Mais il meurt prématurément l'année suivante, à 36 ans, victime du choléra.
L'essentiel de l'œuvre scientifique de Sadi Carnot tient dans une brochure de 118 pages publiée en 1824 aux frais de son auteur et tirée à 600 exemplaires : Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance. Cette œuvre, ignorée des milieux académiques lors de sa publication, ne sera tirée de l'oubli que dix ans plus tard, grâce à Émile Clapeyron. Lors de sa venue à Paris, en 1844, lord Kelvin, qui en a appris l'existence, réussit, non sans peine, à se la procurer et s'enthousiasme à sa lecture, allant, dit-on, jusqu'à déclarer : « Il n'y a rien de plus grand dans toute l'étendue des sciences. »
La machine à vapeur, à l'époque, joue un rôle clé dans l'industrie et fait l'objet de nombreuses recherches visant à en accroître les performances. Carnot souhaite alimenter la réflexion des ingénieurs. Adoptant une démarche de physicien, il s'efforce de déterminer les fondements scientifiques de la machine à vapeur. Pour cela, il prend en considération la pression et la température de la vapeur. Même s'il pense encore que la chaleur est de nature matérielle, il relève le fait qu'il est impossible de réaliser une machine thermique fonctionnant avec une seule source de chaleur (c'est le second principe de la thermodynamique). Une machine thermique doit disposer, pour fonctionner, de deux sources, l'une chaude, l'autre froide. Elle produit du travail grâce à la chaleur communiquée au fluide par la source chaude et partiellement restituée à la source froide. Carnot invente le concept d'opération réversible et montre qu'une machine thermique idéale fonctionne selon une suite de cycles comportant chacun quatre phases réversibles. Il en déduit le théorème auquel on a donné son nom : le rendement maximal d'un tel moteur ne dépend pas du fluide utilisé, mais seulement de la différence des températures des deux sources.
Carnot découvre aussi la loi d'équivalence entre la chaleur et le travail, et donne, bien avant James Prescott Joule, une valeur assez correcte de l'équivalent mécanique de la calorie, comme le révèlent des notes qu'il écrit vers 1830 mais qui ne seront publiées qu'en 1878, par son frère Hippolyte.
En dehors du second principe de la thermodynamique, souvent appelé « principe de Carnot », et du théorème relatif au rendement maximal des moteurs thermiques, le nom de Carnot reste associé à deux notions : le cycle de Carnot, un cycle réversible au cours duquel un système en évolution échangeant de la chaleur avec deux sources à des températures différentes subit deux transformations isothermes et deux transformations adiabatiques ; la machine de Carnot, une machine thermique idéale dans laquelle une masse de fluide effectue des cycles de Carnot. Une telle machine peut servir de modèle pour un moteur thermique ou une machine frigorifique.