Marion Le Pen, dite Marine Le Pen
Femme politique française (Neuilly-sur-Seine 1968).
1. Ascension au sein du FN
Benjamine des trois filles de Jean-Marie Le Pen, elle se consacre au droit et devient en parallèle présidente d’honneur d’un mouvement étudiant proche du Front national (FN) dirigé par son père.
Avocate, elle entre au barreau de Paris en 1992 et le quitte six ans plus tard pour rejoindre les services juridiques du FN, dont elle est membre depuis 1986.
À 24 ans, pour les élections législatives de 1993, elle se présente sous ses couleurs et remporte 11 % des voix dans le XVIIe arrondissement de Paris. En 1998, elle devient conseillère régionale frontiste du Nord-Pas-de-Calais.
Elle entre au bureau politique du parti en 2000 et obtient 24 % puis 32 % des voix dans la circonscription de Lens lors des législatives de 2002. Tête de liste pour l’Île-de-France aux européennes de 2004, elle est élue députée européenne, et milite pour le non au référendum sur le traité de l’Union européenne en 2005.
En 2007, après le siphonnement des voix de l’extrême droite par Nicolas Sarkozy et le piètre score réalisé par son père à la présidentielle (10,4 % des voix), elle est la seule candidate frontiste à passer la barre du second tour aux législatives à Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais, où elle atteint presque 42 % des suffrages. Au congrès du parti de l’automne, Jean-Marie Le Pen la nomme vice-présidente exécutive.
Aux municipales de 2008, la liste menée par Steeve Briois, dont elle est le numéro 2, flirte avec les 29 % des voix à Hénin-Beaumont et se voit accorder 5 élus. Une élection partielle, à la suite de la révocation du maire, la place cette fois en tête du premier tour, avec près de 40 % des voix, mais le front républicain qui se constitue alors a raison d’elle au second tour, ce qui ne l’empêche pas d’approcher les 48 % des voix.
Aux européennes de 2009, elle mène la liste de la Région Ouest, obtient le meilleur score du parti pour ce scrutin (plus de 10 %), et reconduit son mandat à Strasbourg. Aux régionales de 2010, tête de liste dans le Nord-Pas-de-Calais, elle arrive en troisième position, avec 18,3 % des voix. Qualifiée pour le second tour, elle améliore son score (22 %) et réalise le deuxième chiffre du parti, après celui de son père dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur.
2. À la tête du FN
Jean-Marie Le Pen ayant annoncé son intention de passer la main au prochain congrès du parti, elle se porte candidate face à Bruno Gollnisch, qui bénéficie de l’appui de la base. Mais, forte du soutien de son père et de celui de l’appareil, et par ailleurs figure charismatique, Marine Le Pen prend en main le parti en janvier 2011, les militants lui accordant leur confiance à plus des deux tiers.
Dès lors, elle s’emploie à « dédiaboliser » la formation frontiste et ses idées. Non sans succès : surfant sur le mécontentement des électeurs de droite et les inquiétudes du peuple de gauche, elle trouble le jeu des cantonales de mars, en parvenant à maintenir plus de 400 candidats au second tour et à susciter des triangulaires qui désorientent les responsables de l’Union pour un mouvement populaire (UMP). Avec 15,5 % des voix (plus de 19 % là où il est présent) le Front national affiche une excellente performance au premier tour. Il la confirme au second, avec 11,5 % des suffrages à l’échelle nationale, mais 35,5 % là où il s’est maintenu – même si au total il n’obtient que deux élus.
Depuis, dopée par les intentions de vote qui la placent très haut, Marine Le Pen prépare l’échéance présidentielle de 2012. Le score qu’elle réalise au premier tour (17,9 %), historique, est le meilleur enregistré par sa formation pour ce type d’élection. Indifférente aux messages très droitiers émis par le président sortant, et désireuse de voir à terme l’UMP imploser et certains de ses membres rallier une nouvelle formation « bleu marine » toute à ses couleurs, elle prend soin de faire savoir qu’elle votera blanc le 6 mai et contribue de ce fait à la défaite de N. Sarkozy.
Par la suite, elle échoue de peu (d’une centaine de voix) à ravir aux socialistes la circonscription de Hénin-Beaumont lors des législatives de juin, mais remporte en définitive une seconde victoire contre celui qui s’est érigé comme son principal opposant, Jean-Luc Mélenchon, venu la défier jusque sur ses terres et écarté du second tour. En outre, son parti confirme son implantation, avec 13,6 % des voix le 10 juin et la possibilité de se maintenir dans 61 cas de figure. Il fait d’ailleurs entrer deux représentants à l’Assemblée, l’avocat Gilbert Collard dans le Gard, et, à Carpentras, la propre nièce de M. Le Pen, Marion Maréchal-Le Pen, laquelle devient, à 22 ans, la benjamine de l’Hémicycle. Et un nouvel espoir d’un Front qui devient plus que jamais une affaire familiale.
L’objectif n’en reste pas moins l’enracinement et la conquête du pouvoir. Si M. Le Pen ne parvient pas à rallier à sa bannière des élus UMP, la querelle de leadership qui empoisonne la grande formation de droite et la porosité plus grande aux idées frontistes de son électorat semblent ouvrir un boulevard au parti qu’elle dirige. Au reste, les scores réalisés par les candidats du FN lors de législatives partielles en 2013, très proches des 50 %, et la conquête du canton de Brignoles dans le Var en octobre soulèvent comme jamais la question des alliances entre les deux groupes, notamment dans le cadre des municipales de 2014…
Si les lignes entre les deux formations ne cèdent qu’à la marge lors de ce scrutin de mars, la progression du Front national permet à M. Le Pen de remporter son pari qui consistait à conquérir une dizaine de mairies et à doter son mouvement d’un maillage d’un millier de conseillers. Avec en effet l’élection de quelque 11 premiers magistrats (dont à Béziers, Fréjus, ou dans le 7e secteur de Marseille, et dès le premier tour à Hénin-Beaumont), ainsi que plus de 1 400 édiles dans tout le pays, le parti se dote du réseau d’élus et de relais de terrain qui lui faisait défaut pour laisser envisager à sa présidente la possibilité de se hisser aux portes du pouvoir.
Les élections européennes de la fin mai consacrent l’enracinement du FN et a fortiori confirment la justesse de la stratégie de ses leaders : infligeant un camouflet aux partis de gouvernement, renversant la table de l’échiquier français et suscitant un séisme politique dans toute l’Union, il arrive en tête à l’échelle nationale, avec près de 25 % des voix (presque quatre fois plus qu’en 2009) – et réalise jusqu’à 33,6 % dans la circonscription du Nord-Ouest, où M. Le Pen dirigeait sa liste. Mais, malgré le fort contingent de représentants (24) envoyés à Strasbourg, celle-ci ne parvient pas dans un premier temps à constituer avec d’autres formations le groupe parlementaire qui aurait donné plus de voix encore à son message.
Aux sénatoriales de septembre, le parti engrange de nouveaux succès avec de bons scores et l’entrée au Palais Bourbon de deux de ses nouveaux édiles, dont le jeune maire de Fréjus qui devient lui aussi le benjamin de la Haute assemblée. Forte du plébiciste qu'elle obtient en novembre 2014 alors qu'elle est seule candidate à sa réélection à la présidence de sa formation, M. Le Pen conforte son influence en plaçant nombre de ses proches dans les instances dirigeantes du parti, qu'elle entend mettre en ordre de bataille pour l'élection présidentielle de 2017. Si sa décision de défiler à l’écart des grandes marches républicaines qui suivent les attentats terroristes de janvier 2015 la met un temps en porte-à-faux avec l’esprit d’union nationale qui saisit alors l’ensemble du pays, sa candidate dans le Doubs échoue de très peu à ravir aux socialistes en février le siège de député laissé vacant par le départ à Bruxelles de P. Moscovici. Et son parti a le vent en poupe dans la perspective des départementales de la fin mars : présent pour la première fois dans près de 95 % des cantons, il peut escompter emporter le Vaucluse, le Var et l’Aisne. Et dès lors affoler les états-majors de la droite républicaine. Pourtant, ce n’est pas le scénario qui se déroule. Le FN arrive en seconde position avec un peu plus de 25 % des voix au premier tour, flirte avec les 40 % dans le Nord et le Sud-Est, progresse partout dans le pays et est en mesure de se maintenir dans 3 circonscriptions sur 5, mais au total il ne décroche que 62 conseillers et aucune présidence. Et il ne fait toujours pas céder les digues de l’UMP. Il n’empêche : ses scores qui attestent l’entrée dans l’ère du tripartisme administrent plus que jamais la preuve qu’il est désormais durablement inscrit dans les territoires et que pour les prochaines échéances il faudra compter avec lui – et avec sa chef.
Pour en savoir plus, voir l'article France : vie politique depuis 1958.