Arnaud Desplechin
Cinéaste français (Roubaix 1960).
Les commencements
Il suit les cours de cinéma de l'Université Paris III, puis intègre la FEMIS (anciennement l'IDHEC) et en sort diplômé de la section Réalisation et prises de vue en 1984. Après deux courts-métrages, il travaille comme directeur de la photographie sur des films d’Eric Rochant, participant également au scénario du film de ce dernier : Un monde sans pitié (1989).
En 1990, il réalise le moyen-métrage la Vie des morts ; très apprécié à cause de la direction d'acteurs et de son ambiance oppressive sur fond de drame familial, ce film présenté au festival Premiers plans d'Angers en janvier 1991, reçoit le prix Jean-Vigo du court-métrage, avant d'être sélectionné pour la Semaine de la critique au festival de Cannes. La Vie des morts lui permet de mettre en scène un scénario qu'il avait écrit antérieurement, la Sentinelle (1992), où des notations originales perturbent à bon escient un récit d'espionnage faussement classique avec connotations cinéphiles.
Comment je me suis disputé… (Ma vie sexuelle) [1996] est d'une qualité particulière dans le travail sur la durée et sur celui des acteurs – malgré quelques facilités dans la psychologie dues à la description d'un petit milieu intellectuel parisien.
Il change de registre avec Esther Kahn (2000), tourné en anglais – un film étrange sur la vocation théâtrale d'une jeune Britannique au xviiie siècle.
En 2003, il travaille à l'adaptation de Dans la compagnie des hommes, pièce du dramaturge anglais Edward Bond : l'histoire de deux hommes de pouvoir et de la guerre qu'ils se font, réglant leurs comptes à coups de complots financiers et d'O.P.A. Léo, en jouant "Dans la compagnie des hommes" (2004), sorti presque confidentiellement (une salle à Paris, après une diffusion sur Arte), aura un faible impact sur le grand public.
L’absence, le souvenir, la famille
Cette même année 2004, Desplechin achève Rois et Reine. Le film croise les parcours, à la fois burlesque et tragique, de deux anciens amants : Ismaël, un musicien névrosé (Mathieu Amalric) pris en charge par une psychiatre (Catherine Deneuve), et Nora (Emmanuelle Devos) qui, au chevet de son père mourant, est renvoyée à un événement antérieur de sa vie particulièrement douloureux, le suicide du père de son enfant. Le film est salué par la critique et connaît un grand succès. Rois et Reine reçoit le prix Louis-Delluc en 2004, et l'année suivante le César du meilleur acteur est attribué à Mathieu Amalric.
2007 voit la sortie de l’Aimée, un premier film « documentaire » sur sa famille (particulièrement le souvenir de sa grand-mère disparue) et sa maison d'enfance à Roubaix au moment où cette dernière doit être vendue. Desplechin y filme son père, son frère et ses neveux. Un film émouvant où l’on retrouve les thèmes récurrents qui hantent le réalisateur : l’absence, le souvenir et la présence des morts.
Le second film ayant trait à la (sa ?) famille, Un conte de Noël (2008), reprend le thème de la mort en montrant une réunion de famille, autour de la mère, Junon (Catherine Deneuve), atteinte d'un cancer, que peut seule sauver une greffe de son fils Henri (Mathieu Amalric) qu’elle n’aime pas et réciproquement, vilain canard « banni » du clan des années plus tôt par sa sœur Elizabeth (Anne Consigny) ; au lieu de ressouder les liens entre les membres de cette famille, l’épreuve va les envenimer. Le film a été présenté en compétition au 61e festival de Cannes (2008).
Ainsi avec ces deux films, comme l’écrit le critique Jacques Mandelbaum, « les histoires de famille y deviennent des histoires de cinéma qui se révèlent à leur tour des histoires de famille, la réalité et le fantasme étant cousus ensemble, à la manière d'une étoffe et de sa doublure. »