rondeau
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
1. Au Moyen Âge, le rondeau est une forme poético-musicale dont le contenu a fortement évolué depuis le xiiie siècle où il prend naissance jusqu'au début du xvie où il disparaît. Le rondeau du xiiie siècle est une pièce monodique courte, souvent destinée à la danse (rondets de carole), consistant en une seule phrase musicale en 2 parties A et B. Ces parties sont répétées selon un schéma AB aA ab AB, où les majuscules désignent la répétition en refrain des paroles initiales, les minuscules des vers différents, mais de même rime et sur la même mélodie. À la fin du siècle, Adam de la Halle écrit des rondeaux à 3 voix qui conservent la forme ci-dessus, mais dont disparaît le caractère de danse (on inclut parfois à tort parmi les rondeaux d'Adam des pièces de forme différente, virelai ou ballade, reproduisant ainsi une erreur de rubrique figurant dans l'un de ses principaux manuscrits). Il en est de même au xive siècle, où les rondeaux de Jehannot de Lescurel et surtout de Guillaume de Machaut, plus longuement développés, prendront un caractère de plus en plus élaboré.
Au xve siècle, le rondeau (ou rondel) devient surtout un genre poétique, et si l'alternance refrain-couplet en reste l'élément permanent, la forme s'en diversifie. Les compositeurs, surtout à la cour de Bourgogne (Binchois, etc.), les mettent volontiers en musique, mais les poèmes n'en sont pas moins écrits hors musique par des poètes de cour. Il est nécessaire pour les interprètes de cette musique d'en connaître les règles, car elles conditionnent tout un système de reprises parfois complexe dont les partitions ne rendent pas toujours compte.
2. Forme française du mot italien rondo, très employé aux xviie et xviiie siècles dans une langue ou l'autre indifféremment hors de leur pays d'origine pour désigner une forme refrain-couplets. Le rondeau vocal est surtout employé dans l'opéra lulliste ou ramiste (airs en rondeau) où il caractérise volontiers les « airs à maxime » de type léger ; le couplet y prend souvent l'aspect d'un récitatif s'opposant à un refrain en style d'air populaire. Le rondeau instrumental conserve généralement ce caractère au refrain, mais diversifie le couplet, tantôt l'opposant au refrain, tantôt l'en dérivant. Il s'adapte volontiers aux caractères des différentes danses et en détermine alors la forme (gavottes, menuets, etc., « en rondeau »).
Dans la seconde moitié du xviiie siècle (Haydn, Mozart), le mot italien rondo tend à prévaloir, et le rondo devient une des formes privilégiées des finales de sonate, de symphonie ou de concerto. Amplifiant des essais de Carl Philipp Emanuel Bach, Haydn et Beethoven chercheront à fondre la forme rondo dans la forme sonate, diversifiant la présentation des refrains, introduisant les développements à l'intérieur des couplets et donnant au dernier refrain le caractère d'une réexposition.
Au xixe siècle enfin, le rondeau (qu'on écrira de préférence à la française) tendra à devenir un genre de brillante virtuosité (Mendelssohn, Chopin) plutôt qu'une forme rigoureuse. Toutefois, même assouplie, la notion de refrain-couplets en est toujours restée le caractère dominant, au point que certains analystes donnent parfois abusivement le nom de forme rondeau à toute structure présentant un refrain, oubliant que la notion de rondeau n'évoque pas seulement l'idée d'une forme, mais aussi celle d'un style.
3. Au xiiie siècle, on a donné quelque temps le nom de rondeau (rotundellus) au canon, parce qu'il semblait tourner en rond avec ses reprises sans fin. L'usage en a disparu, mais on en retrouve la trace dans l'anglais round et l'allemand Radel.