Hans Christian Andersen
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain danois (Odense 1805 – Copenhague 1875).
Séduit par le théâtre dès l'âge de 7 ans, Hans Christian veut devenir comédien, chanteur ou danseur et, sachant tout juste lire et écrire, part en 1819 pour Copenhague. Silhouette pittoresque, il déconcerte les directeurs de théâtre par ses déclarations grandiloquentes. Ses premiers essais d'écrivain dramatique sont, par hasard, remarqués par Rahbeck et lui valent la protection du directeur du Théâtre-Royal, qui l'envoie parfaire ses études à l'école latine de Slagelse jusqu'en 1828. Malgré l'interdiction de son redoutable directeur d'école, Andersen s'obstine à écrire et publie anonymement en revue un poème, l'Enfant mourant (1827). Un premier recueil de Poésies paraît en 1830, suivi de plusieurs autres. Bien que reléguée au second plan de son œuvre, la poésie ne cesse de le préoccuper et il réunit une grande partie de sa production sous le titre Poèmes anciens et nouveaux (1847), auxquels viennent se joindre les Chants et Chansons patriotiques (1851) : c'est une poésie romantique, surtout influencée par Heine ; plusieurs de ses petits poèmes ont été mis en musique et sont à ce point entrés dans la conscience populaire qu'on a souvent oublié qu'il en était l'auteur.
Andersen n'en a pas pour autant renoncé au théâtre : Amour sur la tour Saint-Nicolas (1829) est même monté au Théâtre-Royal, mais Agnete et l'Homme de la mer (1834), inspiré de Heiberg et mêlant le réalisme historique à la féerie, est un échec. Malgré la Mulâtresse (1839), tentative plus qu'honnête dans le genre du drame romantique, et le dialogue spirituel de la Nouvelle Ruelle de l'accouchée (1840), ce n'est pas au théâtre qu'il va gagner la célébrité. Pas davantage comme romancier. Prenant d'abord modèle sur Walter Scott, il entame une grande fresque sur Christian II, qu'il abandonne pour publier enfin un roman qui se déroule en Italie, l'Improvisateur (1835), unissant impressions de voyage et intrigue romanesque à la manière de Mme de Staël. D'Italie il revient au Danemark avec O. T. (1836), peinture non seulement du paysage, mais aussi du climat politique et social de son pays, concentrée autour d'un héros byronien. La psychologie s'approfondit dans Rien qu'un violoneux (1837). Il donnera encore en 1848 les Deux Baronnes et, en 1857, construira Être ou ne pas être autour d'une problématique religieuse. De ses nombreux voyages, il sait cependant tirer des récits d'une forme plus libre, unissant l'humour, l'imagination et l'observation réaliste. Promenade du canal de Holmen jusqu'à la pointe orientale d'Amager (1829) n'est encore qu'un « voyage » fort modeste et se présente plutôt comme une rêverie interrompue par des rencontres pittoresques, mais Images d'ombres rapportées d'un voyage dans le Harz (1831) et surtout le Bazar d'un poète (1842), fruit d'un périple à Rome et à Constantinople, présentent une somme « d'images bariolées surgies par enchantement du voyage ». Il faut y joindre les notes prises En Suède (1851), En Espagne (1863) et au cours d'une Visite au Portugal (1866). La vivacité de ses impressions et de ses esquisses, où le merveilleux rejoint si aisément le réel, est celle du genre où il va triompher, le conte.
Entre 1832 et 1842, il a publié, en six modestes brochures, des Contes pour enfants. Encouragé par leur succès, il rejette la mention « pour enfants », qui a été prise trop au pied de la lettre, pour ses Nouveaux Contes (1843-1848), puis de 1858 à 1872 pour les Nouveaux Contes et histoires. Il faut y ajouter le Livre d'images sans images (1840). Le genre avait déjà été illustré par Perrault et les Mille et Une Nuits de Galland, par Tieck et Hoffmann, et, à l'exemple des frères Grimm, on avait déjà commencé au Danemark à publier des contes populaires. Andersen écarte pour commencer les modèles livresques en puisant son inspiration dans les récits qu'il a entendus dans son enfance ; il sait trouver un style parlé et vif, garder la saveur de la tradition populaire, tout en l'affinant pour évoluer ensuite vers les créations originales.
Ses contes couvrent un vaste registre, qui va de la fable et de la légende, de la satire au portrait et jusqu'à la nouvelle, mettant en scène aussi bien les animaux, les fleurs et les objets inanimés que les créatures issues des superstitions paysannes, les personnages historiques et ceux de la vie quotidienne. Andersen a repris des thèmes folkloriques (le Grand Claus et le Petit Claus), des légendes scandinaves (Ole Ferme-l'Œil, la Butte aux elfes), des sources littéraires (les Nouveaux Habits de l'empereur), mais il a surtout créé des contes nouveaux, où l'histoire personnelle adopte une forme plus ou moins symbolique (le Vilain Petit Canard, la Petite Sirène) ou qui donnent la parole aux humbles et aux misérables (la Petite Fille aux allumettes), aux animaux (le Rossignol), aux objets (la Théière, l'Intrépide Soldat de plomb).
Humour et tragédie, espièglerie et poésie, réalisme et sens dramatique firent de ces contes un des plus grands succès de la littérature mondiale et valurent à leur auteur de devenir l'ami de Dickens, de Hugo et de Wagner, le familier des souverains danois, et d'inaugurer de son vivant sa propre statue. Rien d'étonnant à ce qu'Andersen ait choisi pour titre de son autobiographie le Conte de ma vie (1855).
Son nom a été donné à un prix décerné tous les deux ans, par un jury international, à un auteur (depuis 1956) et à un illustrateur (depuis 1966) qui ont apporté par l'ensemble de leur œuvre une contribution exceptionnelle à la littérature d'enfance et de jeunesse. Ce prix a notamment couronné, parmi les écrivains, Astrid Lindgren (1958), Erich Kästner (1960), René Guillot (1964), Tove Jansson (1966), Gianni Rodari (1970), Maria Gripe (1974) et, parmi les illustrateurs, Jiri Trnka (1968) et Maurice Sendak (1970).