Giambattista Marino
connu en France sous le nom de Chevalier Marin
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain italien (Naples 1569 – id. 1625).
C'est à Paris, sous la protection de Catherine de Médicis, qu'il publia ses principales œuvres : le troisième recueil poétique de la Lyre (1616), les Discours Sacrés (1618), sermons laïques « sur la peinture, la musique et le ciel » destinés à la lecture, la Galerie (1620), somptueux musée mi-imaginaire mi-privé, les idylles de la Musette (1620) et un poème en 20 chants, Adonis (1623), son chef-d'œuvre. « La fin du poète, écrit Marino, est la merveille », autrement dit son but est d'émerveiller. Le précepte est sans doute moins poétique que stratégique, bref, rhétorique. Se situant idéalement à l'apogée de la poésie occidentale, Marino se propose plutôt de convaincre son public qu'il est le plus grand poète de tous les temps. Ainsi, il se vante d'avoir écrit, avec Adonis, un poème plus long que le Roland furieux et la Jérusalem délivrée réunis. À travers une structure complexe, le poème évoque les artifices par lesquels Vénus tente de séduire le nonchalant Adonis. À peine celui-ci se laisse-t-il aimer, que, victime de la vengeance de Mars, il est éventré par un sanglier. Vénus distrait sa douleur par la mise en scène de somptueuses funérailles et métamorphose en fleur (l'anémone) le cœur de son amant. Chef-d'œuvre de sensualité et de virtuosité lyriques, le poème atteste également le sensualisme philosophique de Marino et son adhésion à la révolution copernicienne. L'érotisme d'Adonis, essentiellement culturel au demeurant, occupe les huit premiers chants, mobilisant un savoir encyclopédique. La stratégie amoureuse de Vénus culmine ainsi dans un spectacle, où l'harmonie des sphères célestes est évoquée à travers le faste de la plus ingénieuse scénographie baroque. Vénus une fois parvenue à ses fins, le poème s'égare pendant plusieurs chants dans un labyrinthe d'aventures proprement romanesques, où l'horrible, voire le répugnant, côtoie le merveilleux. Le décor retrouvera son luxe et sa fixité à l'occasion du concours de beauté, destiné à élire le roi de Chypre, qui voit triompher Adonis. Les vers consacrés à l'agonie d'Adonis sont parmi les plus sensuels de tout le poème. Leur musicalité atteste la profonde influence du Tasse sur Marino, qui a multiplié les pastiches et les citations les plus disparates. Par la multiplicité de ses thèmes et de ses styles, Adonis (dont la bigarrure et le mélange audacieux des allusions profanes et sacrées provoquèrent une violente querelle littéraire) a influencé à son tour toute la poésie baroque italienne (identifiée au marinisme) et, par le biais de sa publication à Paris, la poésie précieuse.