Simon and Garfunkel
Duo vocal de folk-rock formé en 1957 à New York par Paul Simon et Art Garfunkel.
Simon et Garfunkel, le petit brun un peu triste et le grand blond angélique, font souvent figure de candides dans le grand livre d'or de l'imaginaire rock and roll. Trop propres sur eux, trop romantiques, trop introvertis, ces deux-là n'ont ni le look ni le parcours des grands rebelles. Tout se passe discrètement, s'achève sans mort violente (une séparation à l'amiable) et se couronne d'une résurrection en forme de grande fête populaire.
Tom et Jerry. Après avoir grandi dans le même quartier new-yorkais, le Queens, c'est au lycée, en 1957, que Paul Simon et Arthur Garfunkel, reprenant des classiques folk, se produisent pour la première fois, sous le nom du chat et de la souris du célèbre dessin animé. Un cliché noir et blanc, datant approximativement de ces années-là, pris dans ce que l'on imagine être la chambre de l'un d'eux, nous montre des enfants sages sur fond de tapisserie enneigée. Une photo du papa ou du grand frère sur le bureau, un livre à la main, ils sont engoncés dans des pulls tricotés main, bien peignés, le sourire éclatant, l'air éternellement appliqué…, portrait des artistes en jeunes premiers de la classe. Plus tard, ils auront les pantalons pattes d'eph', les chemises étriquées et la moustache en bataille, la panoplie normale de l'étudiant d'alors. Et ce manque d'excentricité, s'il leur barre l'accès au mythe, leur ouvre le cœur de leurs innombrables semblables. De la musique de tous les jours, faite par des gens de tous les jours, pour des gens de tous les jours… des millions d'auditeurs potentiels. Mais, pour l'heure, les dés sont loin d'être jetés.
Malgré un single de circonstance, Hey Schoolgirl, la formule ne prend pas et chacun s'en va continuer ses études de son côté. Le week-end venu, ils se retrouvent néanmoins pour chanter ensemble, et finissent, en 1964, par reformer leur duo, qui s'appelle désormais Simon And Garfunkel. Ce qui n'empêche pas Paul d'enregistrer dans son coin et sous divers pseudonymes (Paul Kane, Jerry Landis, True Taylor…) avant de partir s'essayer sur le circuit folk européen.
Le bruit du silence. Le premier album de Simon et Garfunkel sort début 1965. Wednesday Morning, 3 AM présente des reprises de chansons folk traditionnelles ou contemporaines (notamment une de Dylan) et six titres de Paul Simon. Les rôles sont d'ores et déjà distribués : Paul compose et joue de la guitare, Art se contente des quelques arrangements vocaux, mais le succès n'est toujours pas au rendez-vous. Paul retourne donc en Europe et y enregistre The Paul Simon Songbook. En son absence, le producteur Tom Wilson, réécoutant l'album du duo, y découvre une perle : The Sound Of Silence. Une perle à laquelle manque un écrin et, en matière d'écrin, Tom Wilson s'y connaît. Son secret a pour nom électricité, et il a déjà, dit-on, poussé Dylan à l'appliquer. Ainsi retravaillé (guitare électrique, basse, batterie), le morceau devient, fin 1965, le tube que l'on sait. Paul revient alors au pays et y enregistre avec son compère Sounds Of Silence, l'album, appliquant la méthode Wilson à des chansons principalement rapatriées de son Songbook. Et, cette fois, ça marche ! Le duo se retrouve sous le feu des projecteurs et ne les quittera plus. Les albums suivants (Parsley, Sage, Rosemary And Thyme ; The Graduate ; Bookends) ne démentiront pas l'engouement (même Wednesday Morning, 3 AM, exhumé pour les fans, connaîtra enfin son heure de gloire). Les tournées s'enchaînent et leur participation à l'écriture de la bande son du Lauréat (The Graduate), film original narrant l'histoire de la fameuse « Mrs Robinson », immortalisée par la chanson des deux compères, leur vaut un Grammy award. En 1970, Bridge Over Troubled Water bat tous leurs records de vente : numéro un simultanément aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Paul, néanmoins, n'est pas pleinement satisfait. Si l'on reconnaît son talent de parolier (poétique et parfois même acerbe), on s'extasie moins sur ses compositions. Ses mélodies sont sur toutes les lèvres, imparables, mais sont jugées plus agréables que géniales.
Old friends. Le duo se sépare en 1970 sur la volonté de Paul. Mais l'histoire du duo n'est pas finie pour autant. En 1972, Paul est de nouveau dans les charts avec un album éponyme, Paul Simon. Un an plus tard, après s'être essayé à une carrière d'acteur au cinéma, Art, à son tour, joue la carte solo et décroche un disque d'or. Ces expériences séparées n'empêchent pas les collaborations. On retrouve le duo en 1975 avec My Little Town, chanson de Paul figurant respectivement sur son album Still Crazy After All These Years, et sur celui de Garfunkel Breakaway, ainsi que le temps d'un What A Wonderful World sur l'album d'Art, Watermark, en 1977. Les retrouvailles officielles finissent par s'imposer.
Onze ans après leur séparation, en 1981, Simon et Garfunkel s'offrent Central Park pour un concert gratuit qui réunit près de 500 000 spectateurs. Après quelques sourires gênés, les anciens complices retrouvent leurs marques et la magie opère à nouveau. Le concert est réédité dans quelques villes (dont Paris en 1982, à l'hippodrome d'Auteuil), un double album immortalise le souvenir de la prestation new-yorkaise, puis chacun s'en retourne vaquer à ses occupations. Simon devient « Mr World Music » et Garfunkel se laisse peu à peu oublier.