faux
Copie frauduleuse d'une œuvre originale.
BEAUX-ARTS
Le faux consiste à copier un objet à la manière d'un maître dont on a imité la technique et les matériaux. Le faux en art s'est développé surtout à la fin du xixe s., parallèlement à l'intérêt spéculatif accordé au produit de l'art. Contre l'industrie du faux, à laquelle, inévitablement, est liée l'idée de profit, la science moderne met à la disposition des experts des moyens remarquables d'investigation : analyses chimiques, rayons X.
Cette industrie a révélé un grand nombre de faussaires d'une habileté saisissante, parmi lesquels il faut mentionner Dossena, auteur d'une Minerve mutilée, vendue en 1927 ; Otto Wacker, auteur de trente toiles « de Van Gogh », et surtout Van Meegeren, qui vendit plusieurs faux Vermeer entre 1937 et 1943, dont les Pèlerins d'Emmaüs et la Cène. Cette dernière, achetée 1 600 000 florins en 1941 par le mécène néerlandais Van Beuningen, fut considérée comme l'un des chefs-d'œuvre du maître de Delft. Mais c'est bien comme une œuvre de Van Meegeren que ce tableau sera vendu aux enchères, à Paris, en décembre 1995, par Maître Tajan. L'œuvre sera achetée pour le compte d'un musée néerlandais, le Kunsthal Rotterdam, au prix de 375 000 F (56 300 euros), ce qui est peu pour un Vermeer, mais assez bien payé pour un Van Meegeren.
Plusieurs grands peintres tentèrent les faussaires. Corot fut peut-être le plus copié, avec Millet (1891), Delacroix (1903), Renoir, Picasso, Utrillo, Courbet.
Le faux et la signature
Le faux n'a cessé de se manifester au cours des siècles. Cependant, il réside aussi bien dans l'intention frauduleuse que dans l'imitation elle-même, qui relève du pur artisanat. C'est ainsi, par exemple, que la célèbre toile de Léonard de Vinci, Léda au cygne, suscita un grand nombre d'imitations qui sont, en fait, des œuvres remarquables. Grand maître de l'école attique, Phidias signa une statue d'Agoracrite, son élève préféré, afin de faciliter la vente de cette œuvre. On fit aussi dans l'Antiquité (sans intention frauduleuse) des copies d'originaux célèbres, puis, plus tard, des répliques revêtues de fausses signatures (de Praxitèle, Polyclète, Myron), vendues comme œuvres originales. En 1603, Rubens eut pour mission de restaurer des toiles de maîtres endommagées. Les habiles retouches améliorèrent l'ensemble, tout en lui conférant un véritable cachet d'ancienneté.
Le prestige des maîtres de la Renaissance entraîna une demande accrue de leurs œuvres. Dürer fut le peintre le plus éprouvé par les faussaires. Il dut entreprendre un voyage à Venise en 1505 pour faire cesser les contrefaçons de Marcantonio Raimondi. Après la mort de Dürer, Hans Hoffmann exécuta de remarquables imitations de ses dessins, pourvus du monogramme et aussi recherchés que les originaux.
En outre, l'industrie du faux s'exerce dans d'autres domaines : meubles, manuscrits (les moines du Moyen Âge fabriquaient de fausses chartes pour appuyer les revendications territoriales ou féodales), numismatique, orfèvreries d'or et d'argent, cachets, émaux, miniatures. La plus célèbre affaire, sans doute, concerne la tiare d'or de Saïtaphernès, due à un orfèvre d'Odessa, Rouchomovski, et achetée, en 1896, par le Louvre 200 000 francs or ; elle avait été authentifiée par des experts comme un chef-d'œuvre du iiie s. avant J.-C. Citons également les fausses fresques de la cathédrale de Lübeck par Malskat (1952), les faux meubles d'époque de Mailfert (1930).
L'atelier et le faux
Dans l'atelier « industriel » des maîtres (Léonard de Vinci, Michel-Ange, Rembrandt), les différences s'estompent entre œuvres du maître et tableaux d'élèves. Burckhardt divise en six groupes les tableaux considérés comme étant de Rubens : tableaux authentiques de sa seule main ; œuvres tracées par le peintre et ses élèves, surveillées et reprises par lui ; œuvres où le travail a été réparti suivant les capacités de chacun ; travaux d'atelier, dans lesquels la part de Rubens est minime et où ses élèves travaillaient dans son esprit ; copies d'élèves, sans aucune participation de l'artiste ; copies de peintres appartenant à d'autres écoles et faites parfois sur commande.
En fait, l'enchevêtrement des œuvres « authentiques non certifiées » facilita le travail des faussaires. D'après certains, ç'aurait été pour prévenir les contrefaçons que Claude Lorrain recopiait ses tableaux dans un livre de vérité, le Liber Veritatis.