cycle économique

Fluctuation de l'activité économique, plus ou moins régulière et périodique, comprenant chaque fois une période de croissance et une période de dépression, les points de retournement correspondant à la crise et à la reprise.

L'activité économique est sujette à des fluctuations : après la Seconde Guerre mondiale, elle connaît une phase de croissance jusqu'en 1974, année à partir de laquelle cette croissance est durablement ralentie. Le ralentissement économique est d'ailleurs ponctué de brèves phases de reprise de la croissance, comme à la fin des années 1980, mais aussi de phases de dépression économique plus graves, comme au début des années 1980 ou des années 1990. Comment expliquer de telles fluctuations, ou cycles économiques ?

Les types de cycles

Si l'on considère la période qui va du début du xixe siècle à la crise de 1929, on relève une série de quatorze phases de dépression économique. Pour la plupart, ces dépressions débutent par un choc externe (comme un krach boursier ou bancaire). Elles sont toutes caractérisées par une contraction brutale de la production, une chute des prix, des faillites nombreuses, une montée du chômage ou un recul des salaires. Les années précédant la crise sont des années d'expansion économique, avec l'apparition d'une ou de plusieurs nouvelles industries ou innovations « motrices » (comme le chemin de fer en 1830) qui exercent des effets d'entraînement sur les autres activités économiques. L'accroissement soutenu et régulier de la production industrielle entraîne des tensions inflationnistes mais aussi une hausse des profits et des salaires. La demande continuant d'augmenter, l'expansion se transmet à toute l'économie. L'optimisme des entrepreneurs les incite à l'investissement. La spéculation boursière s'amplifie, guidée par la hausse des profits (parfois artificiellement gonflés par l'inflation). Cette succession de phases d'expansion, de crises brutales puis de dépression a été notamment étudiée par l'économiste français Clément Juglar (1803-1905), d'où leur nom de cycles Juglar ou encore cycles classiques. Dans ces cycles, la période d'expansion est d'une durée moyenne de huit années.

En 1920, l'économiste russe Nicolas Kondratiev (1892-1920) identifie des cycles plus longs, la phase d'expansion s'étendant sur plus de vingt-cinq années. Il observe ainsi entre 1789 et 1920 trois phases d'augmentation des prix (1789-1816 ; 1847-1874 ; 1896-1920) auxquelles correspondent des phases de croissance soutenue de la production et du commerce international. À ces phases d'expansion succèdent des phases de déflation ou de stagnation des prix, de la production et du commerce international. L'apparente inéluctabilité de la crise comme aboutissement d'une phase d'expansion a fait s'interroger de nombreux économistes. Beaucoup d'ailleurs se réfèrent aux cycles de Kondratiev pour expliquer la crise des années 1970 et 1980, qui a succédé à la prospérité des années 1950 et 1960.

La crise est-elle impossible ou inéluctable ?

Pour Adam Smith, l'équilibre des marchés se fait de façon automatique grâce aux mécanismes de régulation que sont les prix, les salaires et les taux d'intérêt. Une crise, expression du déséquilibre des marchés, ne peut donc pas advenir. De plus, le capitalisme permet une phase d'expansion continue grâce à la division croissante du travail. En effet, grâce à celle-ci, chaque tâche est réalisée plus efficacement, et l'on peut même remplacer les hommes par des machines lorsque ces tâches sont répétitives. Selon la loi des débouchés, l'augmentation de la production est toujours absorbée par la demande : les liquidités que reçoit un producteur sont immédiatement injectées de nouveau dans l'économie, sous forme d'investissement ou de consommation, et permettent ainsi à d'autres agents de consommer ou d'investir. En quelque sorte, l'augmentation de la production entraîne une hausse des revenus et donc de la demande.

Pour Karl Marx (1818-1883), au contraire, la crise est inéluctable. Les entreprises substituant progressivement le capital au travail, elles sont de moins en moins à même d'exploiter la main-d'œuvre ouvrière et leurs taux de profits se réduisent progressivement. Du fait des licenciements, les entreprises sont confrontées à une demande de plus en plus faible, ce qui les oblige à augmenter les licenciements. Ce cercle vicieux conduit le capitalisme à la crise. Mais avant même que Karl Marx n'exprime sa vision critique du capitalisme, certains économistes de la période classique se sont interrogés sur l'avenir du capitalisme.

Les premières explications des crises

Robert Malthus (1766-1834) voit deux limites à l'expansion continue envisagée par Adam Smith. D'abord, la loi des débouchés est fragile. Elle repose en effet sur l'hypothèse que l'argent et les liquidités n'ont aucune valeur propre. Or, en réalité, rien n'oblige un individu disposant de liquidités à les injecter dans le circuit économique en consommant ou en investissant ; il peut au contraire conserver son argent, le thésauriser. Ensuite, les ressources agricoles et énergétiques sont limitées et non renouvelables. La croissance ne peut donc se poursuivre faute de matières premières pour nourrir la main-d'œuvre et alimenter les machines et le processus de production.

Pour David Ricardo (1772-1823) également, les limites de la croissance viennent de l'insuffisance des ressources naturelles, et de celles de la terre en particulier. Puisque la population augmente, le nombre de terres mises en culture augmente également. En revanche, la productivité de ces terres est décroissante (car ce sont les plus mauvaises qui sont mises en culture les dernières) et leur prix est croissant (car la demande de terres augmente, alors que la superficie cultivable reste identique). Selon Ricardo, l'augmentation du prix des aliments entraîne une hausse des revenus nécessaires pour que la main-d'œuvre reste en vie et assure sa descendance. Les employeurs sont donc obligés d'augmenter les salaires, diminuant ainsi les ressources nécessaires pour investir et poursuivre l'expansion.

La limite de ces approches réside dans le fait qu'elles ne prennent pas en compte le progrès technique, qui permet d'améliorer la productivité agricole et industrielle. Les travaux les plus récents tentent d'intégrer cette dimension. Auparavant, les économistes se sont surtout attachés à l'étude des crises des années 1930 et 1970.