critique

(grec kritikê technê, art de juger, de krinein, juger)

PHILOSOPHIE

Si le sens usuel du mot « critique » évoque une démarche négative de contestation, son sens philosophique est plus fidèle à l'étymologie grecque : le verbe krinein signifie « discerner », « trier ». Le sujet de cette opération est la raison qui exerce sa faculté de jugement. La critique découle alors d'une exigence de ne pas s'en tenir au fait brut, à l'apparence confuse des choses, des affirmations, des attitudes, mais au contraire de les passer au crible d'une raison qui évalue et porte un jugement d'appréciation pouvant être logique, moral ou esthétique.

Que critiquera-t-on ? Qu'y a-t-il donc à juger au tribunal de la raison ? Là, on retrouve quelque chose du sens ordinaire : on critiquera ce qui est fautif en distinguant aussi bien, du point de vue moral, le bon du mauvais, que, du point de vue de la connaissance, le vrai du faux. On critiquera le sensible en dénonçant les illusions des sens corrigées par la raison, de même que l'on se demandera d'où vient le mal et d'une manière générale toute fausse prétention à la légitimité.

La philosophie kantienne est pleinement une « philosophie critique » au sens où la Critique de la raison pure (1781) signifie que la raison est à la fois le sujet et l'objet de la critique : le « criticisme » de Kant consiste alors à examiner les prétentions de la raison à délivrer une connaissance absolue et à en déterminer les limites. Après Kant, toute philosophie critique consiste à poser le problème de la valeur de la raison ou de la connaissance humaine.