Gestapo

(abréviation de Geheime Staatspolizei, police secrète d'État)

Hermann Göring accueilli à Rome par Benito Mussolini et Galeazzo Ciano, 1937
Hermann Göring accueilli à Rome par Benito Mussolini et Galeazzo Ciano, 1937

Police politique de l'Allemagne nazie (1933-1945) chargée d'éliminer toute opposition au régime et étendant ses sévices dans les territoires occupés par la Wehrmacht.

Création et composition

Le 26 avril 1933, Hermann Göring, ministre-président de Prusse, crée la Gestapo. Le 20 avril 1934, Himmler, Reichsführer-SS (chef des SS pour tout le Reich), prend les rênes de la Gestapo. Au printemps de la même année, Himmler dirige toutes les polices allemandes, à l'exception de la Prusse ; il les unifie et étend le champ d'action de la Gestapo à toute l'Allemagne. À la tête du service central de la Gestapo, il nomme Reinhardt Heydrich, déjà chef du SD (Sicherheitsdienst, service de sécurité interne du parti nazi, fondé en 1931).

Les lois de 1936 centralisent toutes les polices allemandes sous Himmler, qui contrôle désormais l'Ordnungspolizei (ou Orpo, la police régulière du IIIe Reich), et la Sicherheitspolizei, la police de sécurité, cette dernière regroupant la Gestapo et la Kriminalpolizei (ou Kripo), la police criminelle.

Une police hors norme aux pouvoirs exorbitants

Chargée de « détruire tous mouvements dangereux pour l'État et le parti », notamment « les individus qui se sont séparés de la communauté populaire par leur dégénérescence physique et morale », la Gestapo jouit de pouvoirs exorbitants :
– ses décisions n'ont pas besoin de la sanction des tribunaux ;
– si elle saisit la justice, ses fonctionnaires soutiennent l'accusation en tant que ministère public ;
– Orpo et Administration doivent exécuter ses ordres sans appel ;
– la Gestapo agit préventivement ;
– répartis par région militaire et aux frontières, ses 50 000 agents s'infiltrent partout ;
– elle arrête, torture, supprime ou bien interne en camp de concentration tout suspect, se mêle de contre-espionnage extérieur, du ressort de l'Abwehr (le service de renseignement militaire), défie la Wehrmacht (→ affaires Blomberg et Fritsch, 1938).

Devenue office du RSHA (Reichssicherheitshauptamt, office principal de sécurité du Reich, créé en septembre 1939 et dirigé par Heydrich, puis par Kaltenbrunner), la Gestapo va, sous le général SS Müller, étendre à toute l'Europe le régime policier du IIIe Reich : elle entre dans les Einsatzgruppen, commandos qui massacrent derrière le front de l'Est les cadres locaux et les Juifs ; elle pénètre, malgré la réticence de la Wehrmacht, dans les autres pays occupés, utilisant les moyens les plus odieux (délation, torture, chantage...) pour traquer les résistants ; elle participe enfin à la déportation massive des Juifs vers les camps d'extermination (→ camps de concentration).

Ayant absorbé police des frontières (1937) et sûreté aux armées (Feldpolizei, 1942), la puissance de la Gestapo paraît sans bornes quand elle arrache en février 1944 la dissolution de l'Abwehr. La Gestapo ne peut pourtant pas prévenir le putsch contre Hitler du 20 juillet 1944, qui décuple encore sa frénésie de meurtre.

Ses agents tombés aux mains des Alliés seront jugés comme criminels de guerre (→ procès de Nuremberg).

Pour en savoir plus, voir les articles national-socialisme, Seconde Guerre mondiale