Nakhitchevan
République autonome de l'Azerbaïdjan.
- Superficie : 5 500 km2
- Population : 398 400 hab. (recensement de 2009)
- Capitale : Nakhitchevan
HISTOIRE
L'étymologie populaire arménienne de son nom (« le premier havre ») rattache le Nakhitchevan à la légende de Noé qui serait descendu de l'Arche ici, au pied du mont Ararat. Son supposé tombeau y fait encore l'objet d'un culte. Située sur une des grandes voies commerciales entre Orient et Occident, la région, comme d'autres provinces de l'Arménie historique, a vu se succéder invasions et dominations perse, grecque, romaine, arabe, turco-mongole et persanes, avec leurs cortèges d'exodes forcés. Dans le contexte des guerres ottomano-persanes, la population arménienne de la principale cité de l'époque, Djoulfa, fut entièrement déportée par le chah Abbas Ier en 1604-1605 et réinstallée dans les faubourgs d'Ispahan, la capitale de ce puissant souverain séfévide, où elle créa la florissante colonie marchande de la Nouvelle Djoulfa. Le Nakhitchevan fut repeuplé de tribus kurdes et turcomanes destinées à tenir la frontière. Annexé par la Russie en 1828 (traité de Turkmenchaï), il constitue avec le khanat d'Erevan conquis à la même époque, jusqu'en 1840, l'Armianskaïa Oblast (province arménienne), puis le Gouvernement d'Erevan, avec une population mixte arménienne et musulmane à parts égales jusqu'en 1914. Lors de leur éphémère indépendance de 1918-1920, l'Arménie et l'Azerbaïdjan s'en disputent le contrôle, tandis que les armées ottomanes puis kémalistes y concentrent leurs attaques pour ouvrir un corridor vers Bakou. Les traités soviéto-turcs de Moscou (16 mars 1921) et de Kars (21 octobre 1921) fixent les frontières extérieures et placent le Nakhitchevan sous la protection de la R.S.S. d'Azerbaïdjan qui ne peut transférer sa souveraineté à un autre État, malgré l'absence de continuité territoriale. Cela sera entériné lors de la création d'une République autonome du Nakhitchevan, en 1924. Réduits à 15 % de la population en 1926, les derniers Arméniens fuient à la fin des années 1980, lors de la crise du Haut-Karabakh, tandis que les traces de leur ancienne présence sont systématiquement effacées : des milliers de khatchkars (pierres tombales) du cimetière médiéval de Djoulfa ont été détruites en décembre 2005.
Après l'U.R.S.S.
Évincé du Politburo de l'U.R.S.S. en 1987, Gueïdar Aliev, l'ancien chef du K.G.B. et du parti communiste d'Azerbaïdjan sous Brejnev, prend la direction du Nakhitchevan, son fief natal. Reconverti au nationalisme, il en fait un tremplin pour une nouvelle carrière politique. Tandis que Bakou organise un blocus de l'Arménie en riposte au conflit du Haut-Karabakh, des heurts frontaliers se produisent avec l'Arménie qui contrôle les axes routiers de l'enclave vers l'Azerbaïdjan. Les postes frontaliers avec l'Iran sur l'Araxe sont forcés fin décembre 1989, et au lendemain de l'intervention de l'armée soviétique à Bakou, après de nouveaux pogroms anti-arméniens, le Nakhitchevan proclame son indépendance (20 janvier 1990). Les crises politiques consécutives aux revers militaires azerbaïdjanais au Haut-Karabakh ramènent Aliev et son clan au pouvoir à Bakou (juin 1993). Partie intégrante de l'Azerbaïdjan, selon la Constitution de 1995 de ce pays, la République autonome du Nakhitchevan s'est dotée de sa propre Constitution le 28 avril 1998 définissant quelques prérogatives en matière de politique intérieure. Le président de son Parlement, Vasif Talibov, apparenté par mariage à la famille de G. Aliev, y a instauré un régime autoritaire, sinon dictatorial. Il est accusé de mise au pas féroce de la presse et de l'opposition, ainsi que de corruption.