Leur succès est dû en partie aux groupes qui ont surgi après la récession pour sauver la musique britannique, qui avait atteint le fond au début des années 90. La musique grunge et le hip-hop étaient sous l'emprise des Américains et même le BPI (British Phonographic Institute) avait dû admettre, en 1991, que, dans le monde de la musique, le drapeau britannique volait bien bas depuis des années. Ce pessimisme fut vite démenti. Les ventes augmentèrent considérablement avec le succès de boys bands tels que Take That. L'esprit des années 90 ne tarda pas à évoquer celui des années guitare, avec le remplacement des rythmes techno par des ballades. La reconquête britannique se concrétisa avec des groupes tels qu'Oasis, Blur et Pulp. Londres s'imposa dès lors comme l'épicentre d'un phénomène musical populaire, qui rassemble le pays d'une manière qui rappelle les années 60.

En 1994, Blur et Oasis établissent des records de vente. Leur style de musique lyrique est apprécié d'un public généralement fatigué de la culture des clubs et de la musique techno. Le public réclame des chansons basées sur l'expérience de la vie quotidienne. Une apothéose fut atteinte avec le tube « Three Lions » du groupe Lightening Seeds. Basée sur l'espoir anglais (déçu) d'une victoire lors de la Coupe européenne de football de 1996, la chanson obtint un succès colossal et devint le « nouvel hymne national », empreint d'un patriotisme nouveau, sans agressivité, et accompagna la renaissance du football comme sport populaire.

Trois ans plus tard, le phénomène Britpop ne montre aucun signe de fatigue. Il ne fait guère de doute que le dernier album d'Oasis établira un nouveau record de vente dans l'histoire de la musique. Les Spice Girls continuent à faire des ravages à travers le monde, et des groupes moins connus, comme Prodigy et Portishead, connaissent un succès considérable. Des DJ réputés, tels que Chris Evans de Radio 1, s'investissent en faveur des nouveaux groupes émergents.

Les grands thèmes de la Britpop (la vie moderne à Londres, la drogue, l'amour non romantique) reflètent l'attitude pragmatique de la génération des années 90. Ces idées se retrouvent dans le mouvement littéraire. Le succès du roman Trainspotting d'Irvine Welsh, une histoire de débauche et de trafic d'héroïne à Édimbourg, annonce l'arrivée d'une nouvelle génération de jeunes écrivains qui décrivent leurs propres expériences, qu'il s'agisse de leur passion pour le football, comme dans le roman Fever Pitch de Nick Hornby, ou du culte de la drogue, comme dans Wasted de Krissy Kay. Le style intimiste et le réalisme de ces œuvres s'accordent avec le désir du public de voir refléter l'époque qu'il est en train de vivre. Des lecteurs pourtant bien plus habitués aux magasines ou aux films qu'à la littérature ont assuré le succès inattendu de romans comme The Beach, d'Alex Garlad. Le Swinging London a trouvé sa tonalité littéraire.

Le cinéma n'est pas en reste. Il prend son élan en 1994 avec Shallow Grave, polar grand style qui a le mérite d'être l'un des premiers films britanniques à avoir amorti ses frais d'investissements avant d'avoir été vu à l'étranger. L'équipe qui a assumé la paternité de ce film, John Hodge, André Macdonald et Dany Boyle, ne s'est pas reposée sur ses lauriers. Son deuxième film, Trainspotting, s'est imposé immédiatement comme un classique moderne. Mais ce n'est qu'avec Secrets and Lies, de Mike Leigh, que le cinéma britannique a obtenu la pleine reconnaissance internationale. Des nominations aux Oscars et la palme d'or au Festival de Cannes ont officialisé sa renaissance, et prouvé que la combinaison si particulière d'humour cynique et de réalisme brutal qui le caractérise fait mouche aussi à l'étranger.

Il en va de même pour la mode. La mode britannique s'exporte. La preuve en est que deux Londoniens sont à la tête des plus grandes maisons de la haute couture française. John Galliano est designer chez Christian Dior, et l'extravagant Alexander MacQueen règne en tant que maître des créations chez Givenchy. Tous deux citent Londres comme leur source d'inspiration. Anciens élèves de St. Martin's Collège of Art, la plus prestigieuse école de mode anglaise, ils gardent des liens étroits avec la capitale. MacQueen se dit inspiré par les quartiers populaires de l'East End, où il possède toujours un atelier, tandis que Galliano se reconnaît très influencé par la mode rétro lancée par la Britpop et la nouvelle culture de rue. Ils ne sont pas seuls.