Journal de l'année Édition 1996 1996Éd. 1996

On peut détailler les enjeux politiques qui font surface en 1995 et qui seront au cœur du débat électoral d'ici à 1997 : l'importance du rôle du gouvernement (les conservateurs cherchent à le diminuer, les travaillistes à l'augmenter), la place à accorder au libre choix en matière d'école (les conservateurs souhaitent l'augmenter, leurs adversaires la diminuer), l'union entre l'Angleterre, l'Écosse et le pays de Galles (les conservateurs entendent la maintenir, les travaillistes se sont prononcés en faveur d'une assemblée élue en Écosse), l'imposition (les conservateurs veulent reprendre leur politique de baisse tandis que les travaillistes s'engagent seulement à ne pas l'augmenter), la loi et l'ordre (les conservateurs accentuent encore plus leur politique répressive).

La politique étrangère

C'est sur le chapitre de l'Europe que la division est la plus nette entre les deux principales forces britanniques : chez les conservateurs, l'opposition à l'Europe semble gagner du terrain ; chez les travaillistes, on affirme sa foi dans une Europe forte. Quel changement par rapport au début des années 70 ! L'opposition la plus forte venait, à cette époque, des rangs travaillistes. Aujourd'hui, en 1995, Tony Blair se déclare favorable non seulement à l'élargissement de l'Union européenne mais aussi à son approfondissement. Les conservateurs, en revanche, défendent des positions de plus en plus atlantistes pour mieux marquer leurs réserves envers l'Union européenne et la monnaie unique. Malgré ces réticences conservatrices, la volonté de renforcer la coopération militaire avec la France est de nouveau affirmée par le gouvernement. Celui-ci s'abstient d'ailleurs d'émettre la moindre critique à l'égard des essais nucléaires français.

Économie et société

La situation, morose sur le plan politique, est bien meilleure sur le plan économique. Depuis 1993, la croissance et la consommation reprennent, le chômage diminue. Cette année confirme la tendance, à l'exception de la consommation qui ralentit quelque peu. Dans le contexte européen de chômage endémique, l'exception britannique mérite d'être soulignée. À la fin de 1995, le nombre de chômeurs est ramené à environ 2,25 millions, soit 8,1 % de la population active, un niveau identique à celui de 1991. La reprise économique, une politique particulièrement favorable à l'emploi et une politique monétaire adaptée à cette priorité sont les principales raisons de ce succès.

L'Irlande du Nord

À la fin de l'année, après des débuts particulièrement prometteurs, la recherche d'une solution aux problèmes nord-irlandais semble piétiner. Le 22 février 1995, Londres et Dublin parviennent à se mettre d'accord sur un document cadre intitulé « Programme pour la paix ». Celui-ci prévoit la création d'une assemblée pour l'Irlande du Nord, la mise sur pied d'institutions dotées de pouvoirs exécutifs et communes aux deux parties de l'île, ainsi que des modifications constitutionnelles. Ces dernières permettraient de remplacer le principe des revendications territoriales par la notion de « consentement ».

À l'origine de ce piétinement, il y a à la fois l'opposition des unionistes au contenu de ce document et le refus des républicains de désarmer. Bien sûr, les unionistes refusent de négocier avec le Sinn Féin aussi longtemps que l'IRA ne fait pas de geste en direction du désarmement. Pour le gouvernement britannique, une double approche s'impose : il doit engager des négociations préliminaires avec tous les partis et, par ailleurs, mettre sur pied une commission internationale sur le désarmement. Selon Londres, celle-ci doit être mise en place en étroite collaboration avec Dublin et Washington. La venue, fin novembre, de Bill Clinton en Ulster et en république d'Irlande précipite les choses. Quelques heures avant l'arrivée du président américain, les Premiers ministres britannique et irlandais présentent un plan de négociation : des conversations préparatoires à une table ronde réunissant toutes les parties en conflit se tiendront alors qu'un organisme international étudiera la question de la neutralisation des armes détenues par les paramilitaires catholiques et protestants.