Échecs
La division du monde des échecs, dont on ne connaît toujours pas l'issue à la fin de l'année, domine 1993. Fin mars, en effet, le champion du monde en titre, Garry Kasparov, et son challenger, Nigel Short (qui a éliminé en janvier Jan Timman sur le score de 7,5 à 5,5, en finale des candidats), créent une association : la Professional Chess Association (PCA). Celle-ci compte se substituer à la Fédération Internationale des Échecs (FIDE), qui organisait depuis plus de cinquante ans le championnat du monde. Pour expliquer cette scission, les deux joueurs dénoncent officiellement le choix de la FIDE d'organiser le championnat du monde à Manchester, la ville anglaise proposant une bourse de 1,17 million de livres. Kasparov en profite en réalité pour régler ses comptes avec le président de la FIDE, le Philippin Florencio Campomanes. Les deux hommes se sont toujours violemment opposés. Kasparov a déclaré dans le passé que Campomanes n'était qu'un pion du régime soviétique ; de fait, celui-ci avait interrompu de manière arbitraire le premier championnat du monde de Kasparov, en 1985, alors que le jeune champion était en train de rattraper spectaculairement son retard contre Anatoli Karpov, mieux en cour auprès des autorités de Moscou.
Deux championnats du monde sont donc organisés : le premier, à Londres, oppose Kasparov à Short, le second, Karpov à Timman (les deux derniers adversaires de Short). Kasparov bat facilement Short sur le score de 12,5 à 7,5, et Karpov gagne contre Timman 12,5 à 8,5. À court terme, la FIDE et Campomanes sortent très affaiblis de cette guerre. Mais, à long terme, l'avenir de la PCA semble fragile devant la puissance, certes menacée, de la FIDE, qui regroupe 149 pays à travers le monde. En attendant, les deux meilleurs joueurs du monde ne figurent plus dans les classements officiels.
Les principaux résultats. Parallèlement à ces incidents, la vie échiquéenne s'est poursuivie normalement. En janvier, Karpov remporte Wijk-aan-Zee en battant en finale Illescas 2,5 à 1,5. En février, à Budapest, la jeune Judit Polgar bat en match Boris Spassky 5,5 à 4,5, alors qu'à Monaco sa sœur Zsusa Polgar fait match nul 6 points partout contre Nana Ioseliani en finale des candidates. À Cannes, au même moment, le meilleur Français, Joël Lautier, se fait battre en match par Vladimir Kramnik sur le score de 4,5 à 1,5. À Linares, en mars, Kasparov montre qu'il est le meilleur joueur du moment, en marquant 10 points sur 13.
Le classement Elo publié par la FIDE au 1er juillet : 1er Karpov 2 760, 2e Anand 2 725, 3e Kramnik 2 710, 4e Ivantchouk 2 705, 5e Chirov et Salov 2 685, 7e Guelfand 2 670, 8e Bareiev et Gueorguiev 2 660, 10e Epichine 2 655. Le meilleur Français, Lautier, est 32e avec 2 620. La meilleure féminine est Judit Polgar, classée 24e avec 2 630. Par mesure de représailles, la FIDE a retiré de la liste Kasparov et Short, qui auraient été classés respectivement à 2 820 et 2 660.
L'Interzonal se joue en juillet à Bienne (Suisse). Les 73 participants essaient de terminer dans les dix premiers pour continuer le parcours qui mènera peut-être l'un d'entre eux au championnat du monde (FIDE) de 1995. Guelfand gagne avec 9 points sur 13. Lautier partage la deuxième place avec 8,5. Pour la première fois, un Français se qualifie pour les matchs des candidats. Il rencontrera Timman en 1994.
Jean-René Koch, un Français, réalise une norme de grand maître international après avoir gagné le tournoi de Lyon à Pâques.
Le championnat de France par équipes est remporté par Lyon-Oyonnax avec 32 points sur 33 et ce pour la quatrième fois consécutive ; 2e Clichy, 30 ; 3e Belfort, 30 ; 4e Strasbourg, 26...
Le championnat de France se déroule à Nantes en août. Il est gagné par Emmanuel Bricard, 10 ; 2e Chabanon, 9,5 ; 3e Koch, Anic et Renet, 9. Chez les femmes, Claire Gervais remporte son deuxième titre consécutif ; 2e Fruteau ; 3e Mora.
Lyon-Oyonnax remporte, en décembre, la coupe d'Europe en battant en finale Honved-Budapest par 4 à 2.
Le Guide des Échecs-Traité complet, par Nicolas Giffard et Alain Biénabe, éditions Robert Laffont, collection « Bouquins ».
Joël Lautier joue et gagne, par Alain Fayard, éditions Grasset, collection Europe Échecs.
Alain Fayard