Le retraitement, qui permet de récupérer l'uranium non consommé et le plutonium produit pour les recycler dans le réacteur, diminue d'au moins 20 % les besoins en uranium naturel, matière minérale relativement abondante dans l'écorce terrestre à l'état dilué, mais rare à l'état concentré et commercialement exploitable. On peut concevoir (comme le proposent les États-Unis) de ne pas recycler l'uranium et le plutonium, mais au prix d'une consommation accélérée des ressources d'uranium. On peut se demander — le problème étant désormais posé en termes nouveaux — si un développement massif et durable du nucléaire pourra avoir lieu sans surgénérateurs. Avec les surgénérateurs, qui transforment l'isotope non fissile en plutonium fissile, l'épuisement des ressources serait repoussé à un avenir lointain. À côté des surgénérateurs à plutonium, d'autres surgénérateurs ont été également étudiés, à base d'uranium 233 produit à partir de thorium.

Ressources

Les ressources en uranium (prouvées et probables, dans une gamme de prix assez étendue, que les hausses successives depuis 1974 ont rendue d'ailleurs assez floue mais qu'on peut limiter à 50 ou 60 dollars par livre d'oxyde U3O8) seraient de l'ordre de quelque 4 millions de t (d'uranium contenu), dont 1,3 million aux États-Unis, de 750 000 à 800 000 t au Canada, 330 000 t en Australie, et 100 000 t en France (non compris ses associés comme le Niger, le Gabon, etc.). On n'est qu'au début de l'exploration uranifère, ralentie pendant de nombreuses années à cause d'un marché pléthorique. Pour donner quelque perspective à ces chiffres (sans grande signification à long terme), on peut signaler que les réacteurs à eau actuellement construits ou en construction, de 1 000 MWé en moyenne, demandent de 5 000 à 6 000 t d'uranium en vingt-cinq ans de fonctionnement, selon qu'il y a ou non retraitement du combustible.

Enrichissement

En fait, les réacteurs à eau ne consomment pas de l'uranium naturel, mais de l'uranium enrichi, dans lequel la teneur en uranium 235 a été élevée de 0,71 % aux environs de 3 % (le reste étant de l'uranium 238). L'opération d'enrichissement est effectuée dans des installations industrielles géantes et très centralisées. Divers procédés sont possibles : diffusion gazeuse, centrifugation, système à tuyères, lasers. Seuls les deux premiers ont donné lieu à des opérations commerciales, surtout la diffusion gazeuse, qui souffre malheureusement d'une consommation spécifique en énergie très importante.

Aujourd'hui, et pour quelques années encore, la quasi-totalité des besoins en uranium enrichi (pays socialistes non compris) est satisfaite par les trois usines américaines construites pendant la guerre, d'une capacité totale de 17,2 millions d'UTS (unités de travail de séparation), en cours d'augmentation jusqu'à une capacité maximale de 28,7 millions d'UTS, estimée suffisante en principe jusqu'au milieu des années 1980.

Les nombreux programmes nucléaires mondiaux d'avant 1975 (date où le ralentissement a commencé à se faire sentir) et les incertitudes américaines quant à de nouvelles usines, dont l'Administration n'arrivait pas à décider si elles seraient publiques comme les précédentes ou bien privées, ont amené divers pays ou groupes de pays européens (sans parvenir d'ailleurs à une solution vraiment européenne) à lancer divers projets d'usines d'enrichissement.

L'association URENCO/CENTEC entre l'Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni a construit deux usines, qui utilisent la centrifugation. L'usine de Capenhurst, au Royaume-Uni, a démarré fin 1976. Elle devrait atteindre une capacité de 200 000 UTS en 1978 et de 700 000 en 1982. L'usine germano-néerlandaise d'Almelo, aux Pays-Bas, a elle aussi démarré fin 1976. Elle devrait atteindre une capacité de 200 000 UTS en 1978 et de 1,4 million en 1982. L'accroissement conjoint de capacité jusqu'à 6 ou 8 millions d'UTS en 1987 dépendra des conditions du marché au cours des prochaines années.

En France, une usine de 10,7 millions d'UTS est en construction à Tricastin, vallée du Rhône, par Eurodif, qui associe la France, la Belgique, l'Iran, l'Italie et l'Espagne, utilisant la méthode de diffusion gazeuse. Le début de production est prévu pour 1979 au niveau de 2,3 millions d'UTS, successivement porté à 6,3 millions en 1980, à 8,4 millions en 1981 et à la pleine capacité en 1982. En 1975, on a lancé l'étude d'une autre usine, exploitée par Coredif, qui groupe la France, l'Iran et d'autres pays. La décision de construire (site en Europe, non encore décidé) a pratiquement été prise début 1977, avec deux étapes prévues : 5 millions d'UTS, puis 10 millions.