Le 19 août, l'état d'urgence est décrété dans tout le pays : à Santa Cruz, des militaires de droite viennent de fomenter une insurrection. Le lendemain, le général Juan José Torrès lance un appel à la mobilisation générale ; des milices populaires sont organisées. Mais, le 21, les insurgés occupent les deux tiers du pays ; le commandant en chef de l'aviation, Reque Teran, se range de leur côté. Les troupes rebelles font leur entrée à La Paz. De durs combats opposent les militaires et leurs chars aux étudiants, ouvriers et paysans armés de vieux fusils et retranchés derrière les murs de l'université. Quand ils se rendent, plusieurs dizaines de morts et des centaines de blessés jonchent le sol de la capitale. C'est le 187e coup d'État depuis l'indépendance, en 1825.

Nationalisme populaire

Deux partis, autrefois ennemis jurés, appuient les militaires : la Phalange socialiste, mouvement d'extrême droite dirigé par Mario Gutierrez, qui devient ministre des Affaires étrangères, et le Mouvement national révolutionnaire (MNR), dont le programme, il y a vingt ans, fut anti-impérialiste et antiféodal, et dont le leader est l'ancien président Victor Paz Estenssoro. Il rentre du Pérou, où il se trouvait en exil, au moment où le général Torrès en prend le chemin.

Le colonel Hugo Banzer, 48 ans, d'origine allemande, est proclamé président de la République. C'est un habitué des complots, ancien attaché militaire à Washington ; il déclare nettement que les élections ne l'intéressent pas, qu'il vise à « liquider l'impérialisme rouge » et à « créer une mystique pour atteindre les objectifs fondamentaux du pays ».

Le nouveau régime — le nationalisme populaire — rassure Washington, dont les services secrets ne sont pas tout à fait étrangers à la réussite du complot. Il satisfait aussi Brasilia qui, quelques jours plus tôt, a fait convoyer vers Santa Cruz 15 000 fusils et 500 mitraillettes. Enfin, les capitaux des anciens nazis allemands, qui prospèrent dans tout le pays, ont aussi contribué au succès des militaires. L'affaire d'un certain Altmann, alias Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo lyonnaise, lèvera un coin du voile sur ces réseaux d'anciens hitlériens dont les ramifications s'étendent bien au-delà des frontières boliviennes.

En attendant, la répression s'organise massivement : journalistes, syndicalistes ouvriers et étudiants sont arrêtés et déportés. Le MNR lui-même, qui pourtant participe au pouvoir, n'est pas à l'abri : 70 % des prisonniers politiques appartiendraient à cette formation, dont le propre fils d'Estenssoro. Les centres universitaires sont fermés. La peine de mort est rétablie.

Unité

De leur côté, de nombreux prêtres, dits de gauche, sont arrêtés, se cachent ou prennent le chemin de l'exil. Bien que prudente, l'Église bolivienne, avec notamment le cardinal Maurer, archevêque de Sucre, et l'évêque de Cuevo, Mgr Benedetti, apparaît comme nettement réfractaire au régime. Mais les arrestations et les liquidations ne réussissent pas à détruire l'opposition. Si la Confédération ouvrière bolivienne (COB) est désorganisée, par contre les formations de gauche, aux tendances prolifiques, arrivent pour la première fois à se regrouper au sein d'un Front révolutionnaire anti-impérialiste (FRA), ce qui constitue une grande victoire interne.

Le gouvernement Banzer apparaît à peine moins fragile que ne l'était celui de Torrès. Il est vrai qu'en Bolivie la durée moyenne d'un régime ne dépasse pas neuf ou dix mois.

Brésil

96 790 000. 11. 3 %.
Économie. PNB (68) 337. Production : G (68) 126 ; A (*69) 122 : I (67) 117. Énerg. (*69) : 481. C.E. (68) : 8 %.
Transports. (*69) : 13 338 M pass./km, 25 207 M t/km. (*69) : 1 650 000 + 1 100 000.  : 17 220 000 tjb. (*69) : 3 932 728 000 pass./km.
Information. (68) : 250 quotidiens ; tirage global : 3 250 000. (69) : *5 575 000. (69) : *6 500 000. (67) : 1 911 200 fauteuils ; fréquentation : 234,7 M. (69) : 1 787 000.
Santé. (67) : 35 501.
Éducation. (68). Prim. : 11 943 506. Sec. et techn. : 3 205 689. Sup. : 282 653.
Institutions. État fédéral. République présidentielle. Constitution du 30 octobre 1969. Président et chef de l'exécutif : Garrastazu Medici, élu par le Congrès fédéral le 27 octobre 1969. Succède au président Costa e Silva.

Un modèle

Ordre et expansion : ce sont les maîtres mots du pays. Ils ressemblent à ceux de nations occidentales avancées, et le décollage du Brésil fait dire au président Nixon, lors de la visite que lui fait le général Medici, en décembre 1971 : « L'Amérique latine ira où le Brésil ira. » Ce qui provoque une vive irritation chez certains de ses voisins comme le Venezuela et l'Argentine.