Côté voyageurs, si le parc d'automobiles individuelles est chaque année de 8 à 10 % plus important, le record du taux de progression est toujours détenu par le transport aérien intérieur, un nouveau venu, qui ralentit un peu sa course, mais reste très largement en tête.

L'avenir du rail

Le camion et la voiture individuelle, l'avion, pour ne pas parler de l'oléoduc, ne cessent de remettre en cause, chaque année davantage, le monopole de fait dont jouissait naguère la SNCF. Il n'y aurait, après tout, aucune raison de s'inquiéter de cette évolution, si le chemin de fer ne continuait d'assurer un rôle indispensable de service public et, pour cela, de bénéficier de l'aide de l'État.

Les effets de la concurrence victorieuse des transporteurs routiers et aériens se mesurent, chaque année, dans les sommes que le budget doit prévoir pour combler le déficit de la SNCF et de la RATP. Les subventions ont tendance à diminuer pour la seconde. Elles augmentent régulièrement pour la première.

Au total, si l'on ajoute aux 1 625 millions de déficit d'exploitation les remboursements pour charges spéciales imposées par les pouvoirs publics à la SNCF, celle-ci recevra de l'État près de 5 000 millions en 1968, et 10 000 millions en 1972, estime-t-on, si les choses restaient ce qu'elles sont. Peut-on accepter une telle éventualité ?

Évidemment non, et la principale tâche des responsables des transports aura été d'étudier les moyens « de replacer le chemin de fer dans des conditions telles qu'il puisse soutenir efficacement la concurrence des autres modes de transport ».

Lignes SNCF

Deux séries de dispositions ont été mises au point pour cela ; les unes tendent à égaliser les conditions de la concurrence entre la route et le rail : c'est l'objet de la taxe spéciale, la taxe à l'essieu, imposée l'année dernière aux routiers pour compenser l'usure des routes ; les autres visent à donner une plus grande liberté de gestion aux chemins de fer.

La convention qui lie la SNCF à l'État va être révisée dans ce sens. En même temps, la Société nationale est invitée à améliorer sa productivité, à s'alléger de ses services non rentables. Sur 1 000 à 1 500 km du réseau français, les services omnibus de voyageurs devraient être supprimés d'ici à la fin de 1968.

La remise en ordre des comptes de la SNCF s'inscrit d'ailleurs dans le cadre plus large de la remise en ordre des comptes des chemins de fer européens. Les ministres des Transports des Six se sont eux-mêmes fixés pour cela la date limite de 1972. Cette échéance utile à tous est pour l'instant un des rares résultats positifs des laborieuses discussions qui se poursuivent à Bruxelles pour définir « une politique commune des transports ».

En attendant qu'elles aboutissent, les transporteurs européens continuent, il est vrai, à multiplier les occasions de travailler ensemble. Il faut citer à ce sujet les accords conclus par les armateurs pour l'exploitation des navires porte-cadres ou de leurs derniers paquebots. Dans la réalité se préparent ainsi la coopération et la coordination que les administrations devront, tôt ou tard, inscrire dans les principes.

Distribution

Les supermarchés se mettent « au vert »

Le marasme des affaires, qui s'est prolongé durant une bonne partie de l'année 1967, a quelque peu modifié l'évolution de la distribution en France.

Le nombre des établissements commerciaux — grossistes compris — n'a pratiquement pas augmenté, alors qu'il avait sans cesse progresse depuis 1960 (+ 6 000 en 1965 ; + 4 300 en 1966 ; + 95 en 1967). Cette progression était due à un nombre de créations de magasins qui dépassait largement les disparitions, pourtant fréquentes dans le secteur alimentaire. On assistait ainsi — d'une manière assez paradoxale — à un gonflement de l'appareil commercial français, parallèlement à une concentration des points de vente et à un agrandissement de leur surface.

Ce double mouvement était rendu possible par une progression soutenue de la consommation, elle-même liée à l'accroissement de la population (la France grandit chaque année de 450 000 habitants environ) et à l'amélioration du niveau de vie. Le premier de ces deux facteurs continue de jouer. Il n'en va plus de même du second. De plus, le chômage s'est très sensiblement accru, incitant les Français à dépenser moins facilement et à constituer des épargnes de précaution.

Recul du petit commerce

Ainsi s'explique le fait que plus de 3 000 détaillants aient disparu en 1967 et que les créations de commerce aient été moins nombreuses (depuis dix ans, l'alimentation a perdu plus de 19 000 établissements et le secteur textile presque 3 000 points de vente).