C'est pourquoi les auteurs du projet d'instruction par l'enseignement du français à l'école primaire affirment que l'essentiel de l'enseignement du français doit être l'entraînement à la communication orale ou écrite. Ils condamnent par là même l'enseignement traditionnel qui faisait éclater l'apprentissage du français en études partielles : lecture, écriture, grammaire, conjugaison, orthographe, vocabulaire. La plus grande partie de l'horaire, disent les auteurs, doit être consacrée à l'exercice de la communication.

« C'est par la parole que la langue s'élabore et s'enracine. Aussi, à l'école primaire, le maniement de la langue écrite doit trouver son point de départ dans l'usage de la langue orale. Il convient de considérer la classe non plus comme un lieu où le maître parle à ses élèves, mais surtout comme un milieu où s'échangent des informations d'élèves à élèves et d'élèves au maître. Le maître devra donc expliquer le moins possible, parler peu : accepter et provoquer le débat, ne jamais rejeter brutalement ou ironiquement une réponse incorrecte, de crainte que l'enfant, rebuté, ne s'enferme dans un mutisme néfaste ; encourager, au contraire, celui qui vient de s'exprimer ; arriver à la bonne expression par approximations successives. »

Psychologie

L'école freudienne de Lacan

La publication en 1966 des Écrits de Jacques Lacan (Journal de l'année 1966-67) a révélé au public l'importance d'un enseignement dispensé depuis plus de dix-sept ans à l'hôpital Sainte-Anne et à l'École normale supérieure. Elle a éveillé un intérêt croissant pour ce courant de la psychanalyse, en dépit du langage délibérément hermétique.

Le mouvement psychanalytique français est aujourd'hui scindé en trois écoles : la Société psychanalytique de Paris, la Société française de psychanalyse et l'École freudienne. Le docteur Jacques Lacan, blâmé par la première, la quitta en 1953, et fut exclu de la deuxième en 1963, avant de fonder la troisième, qu'il dirige toujours, malgré son éclatement progressif. C'est surtout par leur position pour ou contre l'enseignement de Lacan que les psychanalystes français tendent de plus en plus à se situer.

Lacan reproche aux freudiens traditionnels d'avoir enseveli l'esprit à force d'être attentifs à la lettre. Si la Revue française de psychanalyse publie chaque année des mémoires et des études qui font progresser la théorie analytique, elle se limite à l'approfondissement de ce qui fut étudié par Freud.

Le retour à Freud

Ce qui frappe, au contraire, parmi les disciples de Lacan, c'est la prolifération de concepts, de théories, qui, tout en affirmant leur fidélité absolue à la doctrine freudienne, la transforment considérablement. C'est ainsi que l'inconscient est dit « structuré comme un langage », le complexe d'Œdipe exprimé en termes de « phallus comme signifiant » ; les symptômes eux-mêmes sont exprimés par les lois de la linguistique moderne et ses figures, métonymie et métaphore.

Plus importantes encore sont les « rectifications » que Lacan prétend apporter à la conception même de la cure. Celle-ci s'effectue essentiellement par la médiation de la parole, et le rôle de l'analyste est de « débloquer » cette parole figée qu'est le symptôme. L'étude récente de Maud Mannoni : l'Enfant, sa maladie et les autres (1968), l'a encore remarquablement illustré.

Aussi Lacan désigne-t-il le projet et le but final de son enseignement comme un retour à Freud, par-delà les altérations que le culturalisme américain et la sclérose théorique des post-freudiens ont fait subir à l'essence même de la psychanalyse.

Depuis sa fondation, et malgré les innombrables dissidences qu'elle a connues, l'école freudienne de Lacan n'a cessé d'attirer de nouveaux chercheurs. Mais les lacaniens les plus orthodoxes, ceux qui furent les premiers disciples, ont tendance à prendre de plus en plus de recul par rapport à l'ombre écrasante du maître.

C'est ce dont témoignent l'alliance Laplanche-Pontalis, pour la rédaction du premier vocabulaire français de la psychanalyse, et la publication de Psychanalyser, premier livre de Serge Leclaire (1968), qui, désormais, groupe autour de lui ses propres disciples, sans pour autant renier l'héritage lacanien.