marée (suite)
L’ensemble des ondes semi-diurnes constitue la marée semi-diurne, qui présente deux pleines mers et deux basses mers par jour lunaire. Les principales de ces ondes sont une onde lunaire moyenne et une onde solaire moyenne ; ce sont celles que créeraient une Lune et un Soleil tournant d’un mouvement circulaire uniforme dans le plan de l’équateur. On considère également une onde lunaire causée par la variation de la distance de la Lune à la Terre. Le caractère de la marée semi-diurne lui est presque partout imposé par l’onde lunaire moyenne, de beaucoup la plus importante du groupe. Lors des pleines et des nouvelles lunes, l’onde solaire moyenne est en phase avec l’onde lunaire moyenne et leurs effets s’ajoutent, c’est la vive-eau ; lors des quartiers, les effets des deux ondes se retranchent, il y a morte-eau.
Le groupe des ondes diurnes, moins nombreuses, forme la marée diurne, qui ne comporte qu’une pleine mer et une basse mer par jour. Cette marée éprouve des variations d’amplitude nettement plus grandes que celles de la marée semi-diurne, les ondes du groupe diurne s’annulant quand l’astre correspondant passe par le plan de l’équateur.
Allure et amplitude des marées
La marée que l’on observe résulte essentiellement de la superposition de la marée diurne et de la marée semi-diurne. La résonance des bassins pélagiques vis-à-vis des composantes de la marée étant relativement peu serrée, la hiérarchie des diverses ondes est généralement conservée à l’intérieur de chaque groupe. Mais elle intervient considérablement dans l’importance relative des deux groupes, et cela suffit à expliquer les aspects très divers que revêt l’allure de la marée. Sur les côtes bordant l’océan Atlantique, principalement sur celles d’Europe et d’Afrique, la marée diurne est très faible, et le phénomène total présente presque uniformément un caractère semi-diurne régulier. Dans l’océan Pacifique, au contraire, la marée diurne est beaucoup plus importante, au point d’imprimer parfois son caractère à la marée totale (côtes du Tonkin), mais l’amplitude n’atteint jamais celle que l’on rencontre dans beaucoup de régions à marée semi-diurne à peu près pure.
Quand la marée diurne n’est pas négligeable par rapport à la marée semi-diurne, et aussi dans le cas inverse, on observe des marées mixtes ou des marées à inégalité diurne (océan Pacifique et océan Indien).
La propagation de l’onde-marée par faibles profondeurs peut être altérée par des phénomènes d’origine hydraulique que l’on interprète par la superposition d’harmoniques supérieurs des ondes principales. L’allure de la courbe de marée est assez fortement modifiée (« tenue du plein » au Havre, double basse mer à Portland, double pleine mer à Southampton).
Certaines résonances des bassins océaniques modifient parfois de façon importante l’amplitude relative des ondes d’un même groupe et introduisent d’autres singularités dans l’allure de la marée. Le rapport des deux principales ondes semi-diurnes, qui vaut en théorie 2,17, peut ainsi s’élever jusqu’à 7 (littoral sud-est de l’Argentine, où il y a alors peu de différence entre vive-eau et morte-eau), ou s’abaisser jusqu’à 1,5 (golfe de Gabès, marées de morte-eau très faibles), ou bien l’onde solaire moyenne devient très faible et l’amplitude présente un rythme mensuel dû à l’onde elliptique lunaire (Port-Lyttelton en Nouvelle-Zélande).
L’amplitude des marées est très variable. Presque nulle dans les mers fermées, sauf lorsqu’il se produit des résonances locales (2 m à Gabès, 1 m à Venise), elle reste faible au milieu des océans, mais elle peut être considérablement amplifiée en se propageant sur un socle continental et en rencontrant des rivages découpés. Les plus grandes marées du globe sont semi-diurnes (17 m en baie de Fundy au Canada, 15,5 m dans la baie du Mont-Saint-Michel). La plus grande marée diurne (11,5 m) a lieu à l’extrême nord de la mer d’Okhotsk.
Aspect synthétique des marées
Les ondes prépondérantes qui donnent à la marée totale son caractère essentiel sont l’onde lunaire moyenne pour la marée semi-diurne, l’onde déclinationnelle luni-solaire pour la marée diurne. On caractérise alors le mouvement oscillatoire de la surface de l’eau par deux réseaux de courbes, groupant, le premier, les lignes le long desquelles l’oscillation conserve la même amplitude et, le second, les lignes dont tous les points sont simultanément dans la même phase. Ces dernières sont appelées lignes cotidales ; l’heure de la pleine mer, invariable sur chacune de ces lignes, sert à les identifier, et leur réseau donne par suite l’allure de la propagation de la marée. Celle-ci a souvent le caractère d’une onde progressive simple. Quelques bassins sont le siège d’ondes stationnaires avec des lignes nodales sur lesquelles l’amplitude est nulle. Dans d’autres, la force de Coriolis due à la rotation de la Terre provoque la formation de points nodaux isolés où concourent les lignes cotidales, de sorte que la marée paraît se propager autour d’eux par rotation, d’où leur nom de points amphidromiques (rotation du nord vers l’ouest dans l’hémisphère Nord, en sens inverse dans l’hémisphère Sud).
Courants de marée
Les particules liquides sont mises en mouvement par l’onde-marée et elles décrivent des orbites fermées contenues dans des plans verticaux. Le déplacement vertical constitue la marée, le déplacement horizontal, beaucoup plus important, est le courant de marée, qui intéresse toute la profondeur de l’eau. Au large, où la marée peut être assimilée à une onde progressive simple, le courant n’a qu’une faible vitesse et il est alternatif, dirigé dans le sens de la propagation quand la surface liquide est au-dessus du niveau moyen, et inversement. Près des côtes, le caractère des courants est profondément perturbé et, dans certains cas, leur vitesse peut s’élever jusqu’à 5 m/s.