Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Fontainebleau

Ville de Seine-et-Marne, entourée par la forêt du même nom ; 19 595 hab. (Bellifontains).



La ville

Avec sa voisine Avon, Fontainebleau constitue une agglomération d’environ 35 000 habitants. Sa forêt, la proximité de Paris (à peine à 60 km), son château, ses musées, son prestige d’ancienne résidence royale et de garnison de cavalerie, son atmosphère paisible en font, dans la région parisienne, au même titre que Rambouillet, Chantilly ou Compiègne, un centre touristique, une ville de résidence pour retraités aisés, dotée de nombreux établissements scolaires (7 000 élèves).

La forêt couvre 25 000 ha (dont 17 000 de forêt domaniale). Elle est située sur les affleurements de grès et sables du Stampien, dits de Fontainebleau, qui atteignent des épaisseurs de 40 à 70 m. Les grès forment des barres étroites orientées est-ouest, séparées par des « vallées » profondes, parfois des gorges. Les versants sont souvent encombrés de chaos de blocs de grès descendus des sommets.

Ce relief donne des points de vue nombreux et des sites pittoresques qui ont inspiré les peintres de l’école de Barbizon*. En raison de la perméabilité du sable, il n’y a ni mares ni cours d’eau. Les principales essences sont le chêne, le hêtre (en régression), le bouleau et le pin sylvestre (en progrès). Bien que cette forêt soit une des mieux protégées et entretenues en France, particulièrement les 1 500 ha les plus remarquables qui constituent la « section artistique », plusieurs incendies ont dévasté de vastes secteurs. Elle reste un extraordinaire conservatoire naturel, où l’on compte des espèces végétales et animales rares dans la région parisienne.

La ville s’est établie dans une dépression où abondent les sources et s’est surtout développée au nord-ouest et à l’est, tout autour du château et de son parc, cernée de tous côtés par la forêt. Le plan, grossièrement en éventail, s’organise en fonction de la place d’armes et du vieux centre, collés au château ; de larges boulevards ceinturent la ville. Celle-ci ne renferme pas moins de sept casernes, qui abritèrent, avant 1914, jusqu’à quatre régiments de dragons et cuirassiers, sans compter une école d’artillerie, puis une école équestre. Il s’y est établi de 1949 à 1967 l’état-major interallié des forces de l’O.T.A.N. pour l’Europe (SHAPE) et, depuis 1959, l’Institut supérieur européen d’administration des affaires (I.N.S.E.A.D.). La ville possède de nombreuses installations sportives et de loisirs, en particulier grâce à la proximité de la forêt et de la Seine : deux hippodromes, un terrain de golf, des piscines, etc.

J. B.


L’art

L’histoire artistique de Fontainebleau se confond presque entièrement avec celle de son illustre château royal, devenu propriété de l’État. Cette vaste demeure est en fait un assemblage irrégulier de bâtiments hétérogènes qui datent de plusieurs époques et ont subi maintes transformations. Louis VII avait là un modeste rendez-vous de chasse, dont Thomas Becket consacra la chapelle en 1169, sous le vocable de saint Saturnin. À la fin du règne de Saint Louis, les bâtiments s’étaient développés ; ils formaient le périmètre d’une cour assez irrégulière qui, sous le nom de cour Ovale et à travers plusieurs remaniements, devait rester le noyau de la maison des rois. À l’extrémité ouest de cette cour s’élevait un donjon rectangulaire, devenu le pavillon dit « de Saint-Louis » ; l’entrée s’ouvrait au sud, là où s’élève la porte Dorée.


L’œuvre de François Ier

Le véritable créateur de Fontainebleau est cependant François Ier. C’est là que ce roi, rêvant d’égaler les princes italiens de la Renaissance, a donné les preuves les plus éclatantes de son mécénat. Revenu en 1527 de sa captivité espagnole, il entreprit d’abord la réfection à peu près totale des bâtiments médiévaux, mais en respectant le plan de la cour. Ce fut surtout l’œuvre de Gilles Le Breton († av. 1552), un maître maçon dont le métier traditionnel donnait un accent local à l’imitation des modèles italiens. Au milieu du côté nord, le portique dit « de Serlio* » est un morceau plus ambitieux, mais à peine plus habile. À l’extérieur de la cour, face au midi, la porte Dorée, qui remplace l’entrée médiévale et a longtemps servi d’accès principal au château, est plus savoureuse avec sa loggia formée de trois arcades superposées et son décor de fresques rehaussées de dorures. La chapelle de Saint-Saturnin, à deux étages, fut elle aussi reconstruite.

Entre 1530 et 1540 environ, François Ier fit sortir de terre un véritable château neuf à l’ouest de la cour Ovale. Une aile étroite, dont l’étage abrite la galerie dite « de François-Ier », relie l’ancien donjon à des bâtiments encadrant une vaste cour rectangulaire, la cour du Cheval-Blanc (ainsi nommée parce qu’un moulage du cheval de Marc Aurèle, envoyé de Rome, en occupait le centre). À l’origine, seul le bâtiment de l’est devait comporter un étage, avec cinq pavillons plus élevés pour en rythmer la façade ; il ne fut d’ailleurs achevé que dans la seconde moitié du siècle, puis subit de nombreux remaniements. Les autres côtés de la cour n’offraient d’abord qu’un rez-de-chaussée sous un comble à lucarnes. Mais celui du sud reçut bientôt un étage abritant la galerie d’Ulysse. Seule l’aile du nord, destinée aux services, a conservé son aspect primitif ; elle est en maçonnerie à chaînages de brique, d’un style sobre et original.

L’architecture, dans le château de François Ier, n’est pourtant que l’écrin de la décoration intérieure, qui fait de Fontainebleau un haut lieu de la Renaissance européenne. C’est l’œuvre d’artistes italiens qui ont formé, avec leurs collaborateurs français ou flamands, ce qu’il est convenu d’appeler l’école de Fontainebleau. On doit au Rosso* l’essentiel de la petite galerie, dite « de François-Ier ». Au-dessus d’un lambris sculpté, comme le plafond, par le huchier italien Scibec de Carpi, et entre les fenêtres qui s’ouvraient à l’origine des deux côtés, des ornements en stuc blanc, d’un fort relief et d’une invention exubérante, encadrent quatorze fresques à sujets mythologiques, où sont multipliées les allusions à la vie de François Ier (cf. « la Galerie François Ier au Château de Fontainebleau », numéro spécial [16-17] de la Revue de l’Art, 1972). En dessous de la galerie, l’appartement des bains, disparu depuis le xviie s., fut décoré sous la direction du Primatice, de même que la chambre de la duchesse d’Étampes, qui subsiste à l’étage de la cour Ovale, convertie en escalier au xviiie s., avec ses figures de stuc et ses fresques illustrant l’histoire d’Alexandre. Mais le règne de Louis XV a sacrifié le plus bel ensemble décoratif du xvie s. : la grande galerie, ou galerie d’Ulysse, dont le Primatice* et Nicolo Dell’Abate (v. 1506/1512-1571) avaient peint les fresques représentant principalement des épisodes de l’Odyssée.

François Ier fit aussi aménager des jardins, les uns au nord de la cour Ovale, à l’emplacement du jardin de Diane, les autres au sud de la grande galerie. Ceux-ci faisaient face à la grotte des Pins, qui s’ouvre encore au pied d’un pavillon d’angle de la cour du Cheval-Blanc, avec son puissant frontispice à bossages.