porcelaine
(italien porcellana, coquillage en forme de vulve de truie, de porcella, truie)
Produit céramique à pâte fine, compacte, généralement blanche, vitrifié dans sa masse et revêtu, le plus souvent, d'une couverte brillante et transparente ; objet de porcelaine.
La porcelaine dure est composée de trois constituants essentiels, en proportions variables : une argile blanche, le kaolin, un fondant, le feldspath, et du quartz, sous forme de sable ou de roche, qui facilite la vitrification et favorise la translucidité. La pâte, préparée par broyage, tamisage, malaxage et façonnage, subit un début de cuisson à basse température (800 à 1 050 °C environ), appelé « dégourdi », puis est revêtue d'une couverte feldspathique et cuite avec elle à haute température (1 250 à 1 450 °C).
La porcelaine tendre artificielle, ou porcelaine à fritte, est composée d'un corps opaque, formé d'argile calcaire (ou marne), additionnée ou non de craie, et d'une fritte (mélange de sable, soude, sel marin, nitre, alun, gypse, vitrifié au four et pulvérisé). La pâte, peu plastique, est façonnée puis cuite à une température inférieure à celle de la porcelaine dure (1 200 °C environ). Le biscuit ainsi obtenu est ensuite revêtu d'une glaçure plombeuse.
La porcelaine tendre naturelle, ou porcelaine phosphatique, est une création anglaise du xviiie s., où la fritte est remplacée par une matière première naturelle.
ARTS DÉCORATIFS
C'est en Chine, à l'époque Tang, que la véritable porcelaine dure est mise au point. L'époque Song voit peut-être la plus belle production jamais réalisée : finesse de la pâte, pureté des formes, glaçures d'une subtilité remarquable, éventuellement décor floral incisé, modelé ou, plus rarement, peint. D'abord artisanale et disséminée, la production se concentre à l'époque Ming dans des manufactures, dont celle de Jingdezhen (Jiangxi) est la plus importante. Les couleurs de grand feu (dont le bleu de cobalt sur fond blanc) et les émaux polychromes de petit feu favorisent le développement de motifs décoratifs vigoureux et variés. Des pièces monochromes sont également fabriquées, ainsi que les élégantes figurines dites « blancs de Chine ». L'empereur Kangxi restaure après une période de guerre la manufacture de Jingdezhen et les ateliers de la Cour. La porcelaine connaît alors un essor qui ne se ralentira qu'au xixe s. ; elle recherche une haute virtuosité dans les « familles » verte, noire et rose.
Sous l'influence de la Chine et de la Corée, le Japon a, à partir du xvie s., une importante production. Celle-ci est notamment réalisée dans la zone d'Arita et à Kutani. En Europe, elle est connue sous le nom de son port d'expédition, Imari. Le nom de l'un de ses créateurs, Kakiemon, reste attaché à un style de décors japonais très souvent imité en France. Ces porcelaines orientales sont connues en Europe grâce aux importations des diverses Compagnies des Indes.
Aussi est-ce à l'imitation des porcelaines orientales que l'Europe s'exerce pendant longtemps. À la fin du xvie s., Florence produit des pièces à mi-chemin de la pâte dure et de la pâte tendre. La porcelaine tendre artificielle est une production essentiellement française, qui débute à Rouen, chez les Poterat, et à Saint-Cloud à la fin du xviie s. En 1725 est fondée la manufacture de Chantilly ; en 1738, celle de Vincennes, qui, devenue manufacture royale, sera transférée à Sèvres en 1756. Entre-temps sont créées d'autres manufactures dont celles de Mennecy, de Sceaux, d'Orléans. D'une fabrication difficile et coûteuse, la porcelaine tendre française tire une beauté particulière de son éclat velouté et de son aptitude à recevoir de riches décors polychromes (fleurs et oiseaux). Après s'être elle-même inspirée de la Chine et de la production allemande de Meissen, elle est imitée à Tournai, en Italie (Doccia, Florence, Capodimonte [Naples]), en Espagne (Buen Retiro). En Angleterre, Thomas Frye (1710-1762) élabore une formule mixte : la porcelaine phosphatique, fabriquée à Bow, Worcester et Chelsea, qui est dite « bone china ».
C'est Johann Friedrich Böttger, alchimiste du prince électeur de Saxe, qui, mettant à profit la découverte d'un gisement local de kaolin, parvient le premier en Europe à fabriquer une porcelaine semblable à celle des Chinois. La production de la manufacture de Meissen débute en 1710. Sa réussite dans les techniques les plus délicates, sa richesse ornementale lui valent une grande vogue. Vers 1735, le décor plastique l'emporte sur le décor peint avec gaufrage de la pâte et apparition de figures et d'ornements en haut relief, d'une exubérance rococo. Le modeleur Johann Joachim Kändler crée les petits groupes qui seront partout imités. Bien que jalousement gardés, les secrets de fabrication de Meissen se diffusent en territoire germanique (manufactures de Vienne, de Nymphenburg [Munich], de Berlin, de Ludwigsburg, de Frankenthal). Bien d'autres pays européens auront leurs manufactures. En France, c'est la découverte de kaolin à Saint-Yrieix, près de Limoges, qui est à l'origine de la fabrication d'une porcelaine dure, ou « porcelaine royale », entreprise à Sèvres vers 1770. Sauf pour les biscuits, cette fabrication restera peu importante sous l'Ancien Régime ; cependant, la plasticité de la pâte permet l'exécution des premiers vases monumentaux dans le goût antique, goût qui dominera sous l'Empire. De nombreuses fabriques se créent vers la fin du xviiie s., notamment dans certains centres producteurs de faïence ou de porcelaine tendre (Niederwiller, Paris…).