Grande-Grèce

Paestum, le temple de Poséidon
Paestum, le temple de Poséidon

Nom donné aux régions côtières de l'Italie méridionale et de la Sicile, où les Grecs avaient fondé de nombreuses cités dans l'Antiquité.

1. La colonisation grecque dans le sud de l'Italie et en Sicile

À partir du viiie s. avant J.-C., poussés par le manque de terre, générateur de famines, de troubles sociaux et politiques, les Grecs se lancent sur la mer et vers l'ouest, colonisant les riches terroirs d'Italie du Sud (d'où le terme « Grande-Grèce », car tout y paraît plus vaste, plus beau) et de Sicile.

Vers 740 est fondée Cumes, en 735 avant J.-C. Naxos, Syracuse et Zancle en 734, Mégare Hyblaia en 728, Rhégion vers 720.

Les premiers colons, originaires d'Eubée (→ Chalcis), sont suivis par les Corinthiens, puis par les Péloponnésiens, qui fondent Sybaris, Crotone, Tarente. Peu à peu, toutes les régions de la Grèce proprement dite seront représentées dans cette partie occidentale du monde méditerranéen.

Les colonies elles-mêmes fondent des « cités filles » : de Cumes naît Parthénope, de Crotone, Calaurie. En 444 avant J.-C., les habitants de la cité de Sybaris, détruite par les Crotoniates en 510, fondent avec l'aide d'Athènes la colonie de Thourioi, que Périclès veut cité panhellénique (de Hellen, « grec » : l'architecte Hippodamos de Milet en dessine le plan, Protagoras rédige sa constitution, Hérodote d'Halicarnasse se dira fier d'en être citoyen (443 avant J.-C.).

2. Les Grecs et leurs voisins

2.1. Les Carthaginois

En Sicile, Sicules et Sicanes (peuples indigènes) obligent des cités comme Syracuse et Gela à se protéger par un réseau de postes militaires.

Les Carthaginois, installés en Sicile occidentale, veulent protéger leurs routes de commerce traditionnelles ; ils mèneront pendant plusieurs siècles des guerres très dures contre les Grecs. Vaincus en 480 avant J.-C. à Himère par Gélon, tyran de Syracuse, ils détruisent Sélinonte en 409.

En 310 avant J.-C., le tyran de Syracuse, Agathocle, peut débarquer en Afrique du Nord, mais pour les Grecs, le danger carthaginois ne cessera qu'avec la victoire définitive de Rome sur Carthage, à la fin de la première guerre punique (241 avant J.-C.).

2.2. Les Étrusques

En Italie, les Grecs se heurtent aux Étrusques. En Corse, ils sont vainqueurs à la bataille d'Alalia (535 avant J.-C.), mais doivent pourtant évacuer l'île (où, après la destruction de Phocée par les Perses en 545, se sont installés de nombreux Grecs d'Asie Mineure). Les forces de leurs adversaires s'épuisent progressivement : en 524 avant J.-C., Aristodème de Cumes remporte une victoire écrasante ; en 474, dans les eaux de Cumes, la flotte étrusque est détruite.

2.3. Les Romains

Après les destruction par Rome de l'empire étrusque et malgré un traité conclu en 303 avant J.-C. avec Tarente (dans lequel Rome s'engage à limiter sa marche vers le sud), les cités grecques ne sont plus sûres d'elles-mêmes. Elles font appel à Pyrrhus, roi d'Épire, qui passe en Italie avec ses éléphants ; Rome intervient avec énergie ; en 272 avant J.-C., Tarente est soumise, puis l'Italie toute entière et la Sicile (214-212 : prise de Syracuse par Marcellus).

Les Grecs de Grande-Grèce deviennent comme tous les Italiens citoyens romains, ceux de Sicile restent des provinciaux. La dureté de certains de leurs gouverneurs (Verrès notamment) rendra parfois leur sort pénible.

Du fait des luttes pour le pouvoir entre les cités et du danger permanent que représentaient pour les Grecs les peuples indigènes et les Carthaginois, la Grande-Grèce connut souvent des régimes personnels que l'on a désignés comme des tyrannies.

3. Richesses matérielles et intellectuelles

Les terroirs de Grande-Grèce sont si riches que la Sicile restera jusqu'à l'époque impériale (27avant J.-C.) un des greniers de Rome. Les villes y jouissent d'une grande prospérité, qui explique l'abondance des édifices publics, la variété de l'ornementation, le caractère grandiose de l'architecture (temples immenses de Sélinonte, par exemple) ; le luxe et le raffinement des Sybarites (→ Sybaris, Paestum) sont légendaires (inversement, en Grèce proprement dite, à Olympie, les riches Syracusains imposent le faste de leurs attelages.

Les philosophes trouvent plaisir et profit à séjourner en Grande-Grèce ou en Sicile : Pythagore vit à Crotone, Archytas domine Tarente, Platon lui-même séjourne deux fois à Syracuse.

Malgré les guerres extérieures et les guerres civiles, chaque année des milliers de Grecs sont attirés dans la région (au début du ive s. avant J.-C., la stratège athénien Timothée conduit à Syracuse 60 000 immigrants).

Pour en savoir plus, voir les articles Carthage, histoire de la Grèce antique, Rome.