Journal de l'année Édition 1995 1995Éd. 1995

Cette stabilisation sera atteinte selon des modalités très différentes dans les diverses régions du monde. Le schéma de la « transition démographique » emprunte des cheminements variés en fonction des rythmes respectifs de baisse de la mortalité et de la fécondité ainsi que du délai s'écoulant entre les débuts de ces deux baisses. Il en résultera un paysage démographique très différent dans la distribution géographique de la population.

En particulier, l'effectif de la population d'un pays comme la France ne devrait guère changer : selon l'hypothèse de fécondité retenue, on aboutit à 64,1 ou à 67,4 millions d'habitants en 2025. L'augmentation est de 12 à 17 % par rapport à la population actuelle (57,7 millions à la mi-1994), alors que la population mondiale aura crû, dans le même temps, de 51 %.

À la mi-1994, 10 pays ont plus de 100 millions d'habitants : Chine (1 209), Inde (919), États-Unis (261), Indonésie (195), Brésil (159), Russie (147), Pakistan (137), Japon (125), Bangladesh (118), Nigeria (108). Au total, avec 3 378 millions d'habitants, ces 10 pays représentent 60 % de la population mondial, estimée à 5 630 millions à la même date.

L'Union européenne (Europe des Douze) compte 349 millions d'habitants et se situe donc au 3e rang mondial. Le pays le plus peuplé est l'Allemagne (81,3 millions), suivie par 3 pays aux effectits comparables : le Royaume-Uni (58,1), la France (57,7) et l'Italie (57,2).

D'ici à 2150, les grands changements de la carte démographique mondiale concernent l'Afrique, qui verra son « poids » plus que doubler, et, à l'inverse, la Chine et le reste du monde, dont l'importance démographique sera fortement réduite. L'Inde sera d'ailleurs largement dépassée par la Chine.

En France, en 1993, le nombre des naissances a été de 712 000, en forte baisse par rapport à 1992 (743 000), et la fécondité se situait à 1,65 enfant par femme. Ce faible niveau est lié à de multiples raisons anciennes, dont la généralisation de l'activité féminine, mais sans doute de plus en plus à la crise de l'emploi et au chômage des jeunes. Il s'agit donc de nouveaux comportements aboutissant à un départ de plus en plus tardif du foyer parental, à la chute importante du nombre des mariages, à l'augmentation de la pratique de la cohabitation et du nombre des divorces et à la croissance du nombre de naissances hors mariage. Il résulte de tous ces phénomènes de profondes modifications dans les structures familiales. L'étude des faits démographiques suppose toujours une grande rigueur dans les notions employées. Ainsi, lorsqu'on parle de l'immigration en France, c'est trop souvent avec beaucoup d'imprécision dans les termes. Les 56,7 millions de personnes habitant la France métropolitaine d'après le recensement de 1990 peuvent être classées selon leur nationalité d'une part, selon leur lieu de naissance d'autre part. C'est ainsi que, parmi les 51,3 millions de Français de naissance, 1,7 million sont nés à l'étranger ; pour les Français par acquisition (1,8 million), le chiffre correspondant est de 1,3. À l'inverse, parmi les 3,6 millions d'étrangers recensés, 0,7 million sont nés en France métropolitaine.

Les formes d'union se diversifient : ce fut l'un des sujets de discussion au Caire. En France, la pratique de la « cohabitation », c'est-à-dire d'une union sans mariage, se généralise. En 1994, 47,1 % des hommes de 21-44 ans vivaient en couple marié (contre 62,6 % en 1986), 21,5 % en couple non marié (10,0 %) et 31,4 % ne vivaient pas en couple (27,4 %). Pour les femmes du même groupe d'âge, les chiffres correspondants sont : couples mariés, 54,0 (68,8) ; couples non mariés, 20,0 (9,7) ; non en couple, 26,0 (21,5). Les naissances hors mariage représentent 28 % des naissances totales en 1989 ; en 1980, le chiffre correspondant n'était que de 11 %. Si l'on ne considère que les premières naissances, 42 % se produisent hors mariage.

La France et la population mondiale, Direction de la population et des migrations, ministère des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville, 1994.
Véron (J.), Population et développement, PUF, collection « Que sais-je ? », 1994.
Koffi (N.), Guillaume (A.), Vimard (P.), Zanou (B.), Maîtrise de la croissance démographique et développement en Afrique, ORSTOM, 1994.
World Population 1994, United Nations, Population Division, 1994.

Francis Gendreau
directeur de Recherche à l'ORSTOM