Journal de l'année Édition 1981 1981Éd. 1981

Mais un ultime collectif, destiné spécifiquement à compenser les pertes de revenus des agriculteurs, accusait, lui, un déficit de 3,7 milliards, ce qui explique l'aggravation de 4,7 milliards entre la loi de finances initiale et les deux lois de finances rectificatives de 1980. Comme on l'a dit, le déficit réel a finalement été inférieur d'environ 5 milliards aux 35,8 milliards affichés.

Après les plus-values de recettes, un second facteur a contribué au redressement : l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Les dépenses de fonctionnement ont été particulièrement tenues. Les crédits de matériel et d'entretien sont restés plafonnés, en francs courants, et les rémunérations, en francs constants, n'ont que faiblement progressé : le pouvoir d'achat des fonctionnaires n'a crû que de 1 % environ, ce qui est très peu puisque ce chiffre intègre les effets de l'ancienneté et des promotions. Enfin, la progression des charges de la dette publique, qui dépassait 30 % l'an les années passées, a été ramenée au voisinage de la hausse des prix.

Trois objectifs

Ainsi le déficit est-il revenu à 30,3 milliards de F en 1980 (1,1 % du PIB) contre 37,6 en 1979 (1,6 % du PIB) et un record de 38,2 en 1975 (2,6 % du PIB). Toute la question est de savoir si ce redressement est durable. Au départ, la loi de finances initiale pour 1981 affiche la même volonté de modération. « Le budget de 1981, a déclaré M. Papon, doit à la fois couronner cet effort patient et préparer l'avenir : il faut maîtriser l'inflation, d'une part, et, d'autre part, répondre au défi renouvelé du monde qui exige des actions tournées vers le futur. » Trois objectifs sont donc fixés à la politique budgétaire : réduire le déficit, comprimer les charges publiques, stabiliser l'impôt.

Premier objectif : le déficit de la loi de finances est ramené au-dessous de 30 milliards (29,4 exactement), ce qui correspond à moins de 1 % du PIB ; c'est toujours le plus faible des pays comparables. Cette modération vise à éviter la création monétaire et, par conséquent, à réduire l'inflation et à renforcer la monnaie. Elle permet, en outre, de ne pas exclure les entreprises du marché financier, afin qu'elles puissent relayer l'État et qu'ainsi, selon M. Papon, « une France responsable succède à une France assistée ». D'un simple point de vue technique, il faut bien voir que les charges de la dette publique génèrent à elles seules tout le déficit, et même plus (puisqu'elles atteignent 37,7 milliards), et que toute augmentation supplémentaire des dépenses aurait donc tendance à faire boule de neige.

D'où un deuxième objectif : la compression des charges publiques. La volonté de restreindre le train de vie de l'État est illustrée par 13 milliards d'économie, « les plus sévères, et de beaucoup, de la dernière décennie », selon le ministre du Budget — c'est même un montant sans précédent. Les créations d'emplois (nettes) sont pratiquement supprimées : 1 890, contre 14 500 en 1980 et 25 000 par an de 1974 à 1980... Les crédits de fonctionnement des administrations (autres que les rémunérations) sont bloqués, en francs courants. Les subventions aux entreprises publiques et privées sont réduites, etc. De sorte qu'au total les dépenses de fonctionnement augmentent moins que la production en valeur (dont la croissance est prévue à 12,3 % ; le chiffre de + 17,1 % publié dans le tableau est trompeur, car il inclut des rattrapages de prix de 1979-1980).

Priorités

Cet effort de restriction des dépenses coexiste cependant avec « quatre grandes priorités portant sur l'avenir ». La première concerne la Défense. Le budget des armées va au-delà de la loi de programmation militaire et atteint 3,9 % du PIB. Les dépenses croissent de 16,9 %, c'est-à-dire nettement plus que la production. Deuxième priorité : l'investissement. Afin que l'industrie « retrouve sa productivité et sa compétitivité », une déduction de 10 % du montant des investissements peut être opérée sur les bénéfices imposables, pendant 5 ans, soit 5 milliards de F par an. Pour agir à plus court terme, un fonds d'action conjoncturelle est constitué (6,5 milliards). Il n'en reste pas moins que les dépenses publiques d'équipement souffrent de leur côté, puisqu'elles augmentent de 9,9 % de 1980 à 1981, c'est-à-dire moins que la production. En vertu de la troisième priorité, l'effort de recherche est intensifié : les autorisations de programme progressent de plus de 20 % et les grands programmes de technologie avancée sont favorisés. Enfin, les familles, « priorité nationale entre toutes », reçoivent une demi-part supplémentaire du quotient familial à partir du troisième enfant.