Au début de l'été 1974, le chantier du Centre d'art contemporain Georges-Pompidou bat son plein sur le plateau Beaubourg. Deux fouilles sont creusées à l'emplacement de l'ancien carreau des Halles. À l'est, celle de la station du métro express ; un forum commercial de 50 000 mètres carrés est prévu au-dessus. À l'ouest, près de la Bourse du commerce, c'est le chantier du centre de commerce international, solennellement ouvert l'été 1973 par Valéry Giscard d'Estaing, alors ministre des Finances.

Réunissant plusieurs ministres à l'Élysée le 6 août 1974, Giscard d'Estaing décide de ne pas renouveler le permis de construire du centre de commerce (il avait été annulé par le tribunal administratif pour un vice de procédure, à la demande d'une association de quartier) et de le remplacer par un espace vert. Michel Guy, secrétaire d'État à la Culture, est chargé de proposer un nouvel aménagement des 6 hectares de l'ancien carreau des Halles.

Une dizaine d'architectes et de paysagistes sont consultés ; parmi eux, Ricardo Bofill, architecte espagnol, dessine une place entourée d'une colonnade elliptique au milieu du jardin. Le projet de l'architecte catalan, approuvé par l'Administration, est repoussé le 30 octobre par le Conseil de Paris. Un groupe de travail élus-Administration est chargé de faire de nouvelles propositions.

Cinq hommes de l'art sont désignés pour affiner les études : les architectes Ricardo Bofill et Claude Vasconi (auteur du forum commercial), les paysagistes Daniel Collin, Alain Provost et Russel Page, qui avait dessiné le jardin de 4,5 hectares du projet initial, avant l'abandon du centre de commerce. L'Atelier parisien d'urbanisme est associé aux travaux.

Maquettes

Trois nouveaux projets sont en lice. Les contraintes techniques, encore très floues en septembre 1974, sont précisées à la fin de mars 1975. Il s'agit de concevoir un jardin et de placer autour du forum, dans la partie orientale, des logements, un centre d'expositions et d'antiquaires, un hôtel, 7 000 mètres carrés de commerces et des équipements sociaux. Une piscine, une patinoire et un central téléphonique souterrains complètent le projet.

L'équipe composée des architectes Ricardo Bofill, Claude Vasconi et du paysagiste Alain Provost présente un jardin encadré par trois corps de bâtiments à arcades, une sorte de Palais-Royal ouvert. Un théâtre de verdure et une colonnade répondraient à cette composition de style néo-haussmannien où seraient aménagés des passages couverts.

L'équipe d'ARC Architecture, dirigée par Jean-Claude Bernard et associée au paysagiste Daniel Collin, reprend les esquisses de l'Atelier parisien d'urbanisme. Elle propose de casser le rectangle de l'ancien carreau des Halles et d'ouvrir la composition vers le quartier, suivant un parti oblique. Une place dallée bordée d'immeubles serait aménagée entre le cratère du forum commercial et le chevet de l'église Saint-Eustache. Au centre, un mail planté prolongerait l'axe oblique de la rue des Halles. Un jardin romantique s'appuierait contre la Bourse du commerce.

Enfin, Bernard de la Tour d'Auvergne et le paysagiste anglais Russel Page, qui ont déjà travaillé pour la société d'aménagement des Halles, proposent un ensemble de bâtiments (12 m de haut) qui surmontent en l'élargissant le cratère du forum. Un jardin assez banal s'étale devant Saint-Eustache.

Les trois maquettes sont exposées à l'Hôtel de Ville du 5 au 13 avril 1975. L'accès de tous aux dossiers de l'urbanisme parisien est une nouveauté d'une portée toute relative. Aucune indication technique ou financière n'est donnée aux visiteurs. D'autre part, le vote du Conseil de Paris, fin avril, porte sur un plan d'aménagement de zone (PAZ) qui n'indique que l'emplacement des bâtiments et non leur architecture.

Enfin, la préférence assez claire des Parisiens et d'une grande partie des élus pour le parti oblique, qui leur semble dégager un plus grand espace libre, ne se traduit pas dans le vote des conseillers. Ceux-ci, afin de préserver la cohésion politique de la majorité présidentielle, acceptent, le 30 avril, le quatrième plan proposé par l'Administration, qui prévoit des bâtiments encadrant le rectangle du jardin.