Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

horloge (suite)

Vers le début du siècle, la montre-bracelet commence à se répandre, surtout au sein des armées engagées dans la Première Guerre mondiale. La montre de poche reste pourtant la montre « habillée ». La société Vacheron et Constantin joue un rôle décisif dans l’accession de la montre-bracelet au statut de montre élégante, par la réduction progressive du volume du mouvement et, en 1955, lance le mouvement le plus plat du monde (1,64 mm d’épaisseur), suivi d’un mouvement automatique extra-plat (2,45 mm). Après la Seconde Guerre mondiale, la société reconstitue son réseau de vente international, implanté aujourd’hui dans soixante-quatre pays. En 1969, Jacques Ketterer succède à son père, M. Georges Ketterer, à la tête de la manufacture. Enfin, en 1972, Vacheron et Constantin est la première entreprise horlogère à recevoir le diplôme « Prestige de la France ».

J. D.


Classification et description


Horloges naturelles

Compter mentalement, réciter des prières étalonnées, fumer un même nombre de cigarettes sont des procédés de mesure d’intervalles de temps constants.

L’activité rythmique est une des propriétés fondamentales de la matière vivante. Les rythmes biologiques, ou rythmes « circadiens » (néologisme proposé en 1959 par F. Halberg), sont de véritables horloges naturelles.


Horloges de Soleil

L’observation de la hauteur du Soleil au-dessus de l’horizon ou de la longueur et de la direction de l’ombre, d’une montagne, d’un mur, d’un menhir, d’un palmier, d’un piquet, d’un talus, d’une marche constitue la base d’une classe d’horloges depuis la plus haute antiquité : les gnomons et les cadrans au Soleil. Sous l’équateur, en Chaldée, en Égypte, on observe la longueur de l’ombre portée par un gnomon vertical ; sous les autres latitudes, le style du cadran est dirigé vers le pôle, et c’est la direction de l’ombre portée qui marque l’heure solaire. On appelle horologia viatoria des cadrans solaires portatifs constitués par des disques, des cylindres, des sphères, des anneaux de voyage qui, convenablement orientés, permettent la lecture de l’heure. Mais le Soleil ne passe au méridien à midi que quatre fois par an. C’est pourtant cette heure solaire qu’on nomme encore aujourd’hui le temps vrai !


Horloges hydrauliques

La clepsydre était un récipient d’où l’eau s’échappait goutte à goutte et qui se vidait selon des intervalles de temps réguliers. Connue en Égypte, en Grèce, à Rome, l’horloge à eau sert surtout à répartir équitablement le temps accordé aux orateurs de l’accusation et de la défense. La Chine et l’islām perfectionnent ces horloges. En 807, le calife ‘abbāsside Hārūn al-Rachīd envoie à Charlemagne, en son palais d’Aix-la-Chapelle, une horloge à eau, à automates. Aux xviiie et xixe s., les clepsydres connaissent encore un très vif succès.


Horloges de mer

Les horloges de mer, horloges de sable, ampoulettes, sablons et sabliers, se trouvent en belle place dans les inventaires du mobilier royal. Au xixe s., le sablier est soufflé en verre, en une seule opération.


Horloges mécaniques

Le principe de la réitération est celui de toute horométrie : écoulement régulier de gouttes d’eau ou de grains de sable, petites chutes réitérées des poids d’une horloge mécanique. La tradition attribue au moine Gerbert d’Aurillac (v. 938-1003), devenu pape sous le nom de Sylvestre II, l’invention de l’horloge à poids avec dispositif automatique de régulation de la chute du poids moteur, l’échappement à roue de rencontre. Un balancier circulaire horizontal, nommé corona freni (la couronne du frein), formé d’un anneau lourd à grande inertie, pivote autour d’un axe vertical qui, aux deux extrémités de sa tige, porte une palette de métal. Ces deux palettes viennent, à tour de rôle, bloquer, puis libérer la première roue dentée de l’engrenage. La description scientifique de ce système se trouve dans le manuscrit de Giovanni Dondi (1318-1389). En France, un texte de Jean Froissart, Li Orloge amoureus (1368), décrit un autre frein : le foliot. C’est une lourde barre suspendue horizontalement et réglée au moyen de deux poids mobiles appelés régules. Les oscillations du foliot se ralentissent ou s’accélèrent suivant qu’on éloigne ou qu’on rapproche de son centre ces deux poids-curseurs, tandis que, sur la corona freni, il faut placer de petites masses de métal ou les enlever pour obtenir soit un ralentissement, soit une accélération. Le foliot danseur est une invention européenne : son application aux horloges d’édifice a rendu célèbres les monumentales machines horaires de Beauvais (1320), de Milan (1336), de Cluny (1340), de Padoue (1344), de Douvres (1348), de Paris (1350), de Gênes et de Florence (1354), de Strasbourg (1356), etc.

Les horloges monumentales construites au xixe s. sont munies de dispositifs oscillants plus précis que le foliot, mais fondés sur le même principe d’isochronisme ; c’est notamment le cas de Big Ben, à Londres (1859), œuvre d’Edmund Beckett, devenu lord Grimthorpe (1816-1905), de l’horloge de la cathédrale de Strasbourg (1842) par Jean-Baptiste Schwilgué (1776-1856), ainsi que des horloges de Besançon (1860) et de Beauvais (1869) par Auguste Lucien Vérité (1806-1887).

L’histoire des horloges est divisée par une coupure : avant Huygens et après Huygens. Avant celui-ci existe une horlogerie munie de systèmes ralentisseurs de la chute du poids ou du déroulement du ressort, mais non d’un « régulateur ». Christiaan Huygens* crée ce régulateur sous deux formes : le pendule réglant pour les horloges (1657) et le ressort spiral pour les montres (1675). La loi de l’isochronisme des oscillations du pendule libre avait été découverte par Galilée*, mais jamais appliquée. Contrairement au foliot, qu’il faut lancer en accompagnant son mouvement, le pendule change de lui-même le sens de son déplacement grâce à sa force de rappel. Du jour au lendemain, les horloges sans pendule se sont trouvées périmées. Des artisans appliquent le pendule de Huygens à des horloges à longue caisse popularisées sous le qualificatif de comtoises. Cependant, les savants recherchent des échappements nouveaux qui élimineraient les frottements considérables de l’échappement à roue de rencontre. L’Anglais Robert Hooke (1635-1703) imagine l’échappement à ancre, qui atténue les frottements, donne une amplitude moins grande au balancier et exige une force motrice moins importante. George Graham (1673-1751) invente le pendule à mercure : la tige du pendule est en acier, et le poids est constitué d’un vase de verre rempli de mercure. L’allongement de la tige au chaud est compensé par la dilatation du mercure, qui élève son centre de gravité et maintient en place celui de l’ensemble. Pour compenser la dilatation du métal, John Harrison (1693-1776) construit un pendule à gril bimétallique. En France, Louis Charles Gallande († 1775) fabrique en 1740 un régulateur à échappement à chevilles d’après l’invention de Jean André Lepaute (1720-1787 ou 1789). Le xviiie s. est l’âge d’or des horloges : pendules de cheminée, cartels d’applique et régulateurs de parquet sont conçus et réalisés par Pierre Le Roy (1717-1785), Jean-Baptiste Lepaute (1727-1802), Ferdinand Berthoud (1727-1807), Robert Robin (1742-1809) et Antide Janvier (1751-1835). Entre 1770 et 1830, celui-ci crée des régulateurs battant la demi-seconde. En 1897, le Suisse Charles Édouard Guillaume (1861-1938) invente le métal invar, qui permet la construction de balanciers stables pour les régulateurs d’observatoires. Avec Léon Foucault*, en 1847, et Alfred Cornu (1841-1902), en 1880, l’électricité est appliquée au régulateur pour entraîner des répéteurs : la distribution de l’heure s’effectue à partir d’une horloge mère.