Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

rayonnement radioactif (suite)

Il convient de souligner que le rayonnement gamma n’apparaît jamais seul dans la radioactivité naturelle, mais qu’il est toujours émis en même temps que le rayonnement alpha ou bêta. Tout se passe, en effet, comme si, après l’émission d’un alpha ou d’un bêta, il y avait réarrangement des charges à l’intérieur du noyau ; or, une modification des charges entraîne une modification du champ électrostatique et, par suite, une apparition du rayonnement X ou du rayonnement gamma, qui se différencient entre eux par leur longueur d’onde.

• On appelle énergie d’un rayonnement électromagnétique le produit hv, v étant la fréquence de la radiation et h la constante de Planck. D’une façon générale, l’énergie des photons varie entre quelques keV et quelques centaines de MeV.

• Les trajectoires des rayons gamma sont invisibles dans la chambre de Wilson.

Les rayons gamma sont très pénétrants ; ils se propagent à la vitesse de la lumière ; leurs trajectoires sont rectilignes et très longues. Les rayons gamma les plus durs peuvent traverser plusieurs centaines de mètres d’eau et plusieurs centimètres de plomb.

Les rayons alpha, bêta et gamma se distinguent donc entre eux surtout par leur pouvoir pénétrant : une feuille de papier absorbe les alpha ; une feuille d’aluminium absorbe les bêta ; les gamma ne sont jamais complètement absorbés.


Propriétés communes aux trois rayonnements

• Les rayonnements rendent lumineux certains corps. Certains liquides purs peuvent faire l’objet d’un phénomène de luminescence quand ils sont traversés par les rayons gamma.

Le physicien russe Pavel Alekseïevitch Tcherenkov a démontré que cette luminescence n’est pas provoquée directement par les rayons gamma, mais par des électrons rapides surgissant de la matière au moment de leur dispersion. D’après Tcherenkov, la vitesse de ces électrons étant plus grande que celle de la lumière dans cette matière, il en résulterait un phénomène analogue aux ondes de choc sonores, mais qui se traduirait ici par une luminescence du liquide.

C’est ce phénomène que l’on observe quand on étend une mince couche de sel de radium sur du sulfure de zinc ; on peut, à la loupe, observer les scintillations provoquées par le choc des particules alpha sur le sulfure de zinc. C’est en utilisant cette méthode rudimentaire qu’à l’origine les chercheurs ont commencé leurs travaux sur la radioactivité.

• Les rayonnements ionisent, excitent et dissocient les atomes. Dans le cas des alpha et des bêta, il s’agit initialement d’une ionisation directe, à laquelle succède une ionisation secondaire importante, puisque 40 ions sur 100 observés au total proviennent de l’ionisation directe dans le cas d’une ionisation par alpha. Il faut approximativement 32,5 eV pour produire une paire d’ions dans l’air. C’est d’ailleurs en fin de parcours que le rayonnement alpha est le plus ionisant.

Un électron de 3 Mev produit environ 25 paires d’ions par centimètre, alors qu’un alpha de même énergie en produit 35 000.

Les bêta peuvent créer une ionisation secondaire importante, pouvant aller jusqu’à 70 p. 100 du total ; du fait que les particules se trouvent ralenties, il peut y avoir émission d’un rayonnement électromagnétique, appelé rayonnement de freinage (ou Bremsstrahlung), dont il faut tenir compte.

Enfin, dans le cas des gamma, il s’agit uniquement d’une ionisation indirecte.

Les photons peuvent agir sur la matière selon trois processus différents, dont les probabilités respectives dépendent de l’énergie des photons et du numéro atomique Z de la substance traversée.

Dans l’effet photoélectrique (photons de faible énergie, Z élevé), le photon qui disparaît complètement cède toute son énergie à l’électron éjecté. Dans l’effet Compton (photons de moyenne énergie, Z faible), le photon qui rebondit sur l’électron cède à celui-ci une partie de son énergie. Il en résulte que le photon initial subsiste ; il est diffusé avec une énergie moindre que celle qu’il avait au départ, et l’électron arraché emporte la différence sous forme d’énergie cinétique.

Enfin, il peut y avoir création de paires (photons de grande énergie, Z élevé) ; le photon est annihilé, et son énergie sert à créer deux électrons.

Dans ces trois cas, c’est l’électron éjecté avec la paire d’ions créée qui est responsable de l’ionisation et non pas le photon incident naturel ; il s’agit donc bien d’une ionisation indirecte.

• Les rayonnements produisent divers effets chimiques. Les rayonnements, tout comme les rayons X, impressionnent les plaques photographiques — ce fut l’expérience de Becquerel. Ils décomposent l’eau et colorent en violet ou en brun certaines substances telles que le verre, le quartz, la porcelaine et l’émail.

• Les rayonnements s’accompagnent d’une libération d’énergie. Si l’on enferme un corps radioactif dans un tube de plomb, celui-ci absorbe le rayonnement, et la totalité de l’énergie apparaît sous forme de chaleur. Un gramme de radium par heure dégage 135 calories, dont 120 proviennent des particules alpha, 9 des bêta et 6 des gamma.

Ce problème de libération d’énergie est une difficulté que l’on rencontre pour résoudre le problème de l’évacuation des résidus radioactifs provenant du fonctionnement des réacteurs nucléaires.

• Les rayonnements agissent sur les tissus animaux et végétaux. Les rayonnements produisent une altération qui finit par détruire les cellules soit par ionisation, soit par excitation, soit par dissociation.

L’effet des rayonnements sur les cellules est d’autant plus important que :
— les cellules ont une faculté de reproduction plus grande ;
— les stades de développement sont plus nombreux entre la cellule initiale et la cellule finale ;
— la forme extérieure et les fonctions des êtres vivants sont définitivement fixées (lois de Bergonié et Tribondeau).

L’action des rayonnements sur les cellules est utilisée en curiethérapie pour détruire les cellules cancérigènes sans causer trop de dommages aux cellules voisines.

P. R.