Tarquinia
en français Tarquinies
Commune d'Italie, dans le Latium (province de Viterbe), sur un éperon, dans la vallée de la Marta.
- Population : 16 081 hab. (recensement de 2011)
Antique cité étrusque dont les ruines s’étendent au lieu dit Pian di Civita, près de la ville moderne du même nom.
L’endroit fut habité dès le début du Ier millénaire av. J.-C., et l’étude des nombreuses tombes des cimetières villanoviens a permis d’y prouver l’absence de coupure entre l’époque villanovienne et l’époque étrusque. Les Villanoviens ont fondé la cité, nonobstant une possible modification de la population par un flot d’immigrants d’origine orientale, aux viiie-viie s. À l’époque de l’essor de l’Étrurie, Tarquinia était la capitale d’un puissant État dont le territoire s’étendait des parages du lac de Bolsena à la mer, où se situait son port (Gravisca à l’époque romaine et Porto Clementino aujourd’hui). Elle se targuait d’avoir été fondée par Tarchon, disciple de Tagès, et dépositaire de la science de l’haruspicine. Florissante dès la fin du viiie s. av. J.-C., elle participa aux luttes étrusques pour l’hégémonie sur le Latium, déclina au ve s. av. J.-C., comme les autres cités étrusques, du fait de la concurrence grecque, puis tenta en vain de se défendre contre les progrès de Rome (guerre de 358-351 et entrée pacifique sous la tutelle romaine par le biais de la fédération). C’est un municipe à dater de 90 av. J.-C. et, sous l’Empire romain, une ville prospère qui conserve certaines institutions étrusques (collège d’haruspices). Les ruines des remparts, qui forment un périmètre de 8 km, ont une parenté d’aspect avec le mur de Servius à Rome et peuvent être de la même époque. Le tracé des rues est en damier. Les fouilles sur le site dit Ara della Regina ont révélé qu’il s’agissait d’un grand temple, des iv-iiie s. av. J.-C., encore fréquenté à l’époque romaine et qui se superposait aux vestiges d’un sanctuaire antérieur. Un fragment du fronton, en relief de terre cuite, représente d’admirables chevaux ailés. De l’époque romaine datent les Terme Tulliane.
Les nécropoles s’étendent aux alentours de la cité. La principale est celle de la Colle dei Monterozzi, parallèle à Pian di Civita. Les tombes à tumulus, des viie-vie s., donnent un aspect pittoresque aux lieux. Les tombes à chambre souterraine, explorées en grand nombre de longue date, l’ont été systématiquement ces dernières années grâce aux méthodes de C. M. Lerici. La tombe dite « de la Cabane », du type le plus simple et le plus ancien, reproduit servilement dans ses formes intérieures une fruste charpente en bois. Un grand nombre de chambres sont peintes et fournissent la collection la plus ample de peintures étrusques, échelonnée du vie s. à la fin du iie s. av. J.-C. et classée selon différents styles. Dans la première partie du vie s. av. J.-C., une influence orientalisante se développe, qui fait bientôt place, vers 550, au style ionico-étrusque, illustré par les fresques des tombes des Taureaux, des Augures, des Lionnes, de la Chasse et de la Pêche, etc. Cette empreinte ionienne, décelée dans le style de la décoration ou la manière dont sont traités les visages, est associée à celle de la céramique de la Grèce continentale. La présence d’artistes grecs est très probable, mais, devant les conditions économiques favorables et l’intense activité artistique déployée à Tarquinia, on peut envisager l’existence d’écoles locales où apports étrangers et goût étrusque pour l’exubérance et le concret sont subtilement confondus.
Avant d’être décorée, la paroi rocheuse est d’abord polie, puis généralement enduite d’une couche de crépi (très mince dans les phases anciennes, elle s’épaissit ultérieurement). Souvent gravé ou peint en noir, le dessin préparatoire délimite le cadre de la composition, mais aussi certains détails. De fréquents repentirs nous révèlent la spontanéité de ces œuvres, due aussi à la technique de la fresque réalisée sur enduit frais (la peinture à la détrempe sur enduit sec — telle la peinture romaine — semble être en usage plus tard). Les couleurs à base d’éléments minéraux et végétaux sont délayées dans un liquide adhésif. La gamme de coloris se diversifie peu à peu, mais le clair-obscur apparaît vers le ive s. av. J.-C. seulement.
Le style sévère d’Athènes règne pendant la première moitié du ve s. av. J.-C. et correspond à l’épanouissement de l’art pictural en Étrurie. Les thèmes, toujours mythologiques (voyages dans l’au-delà, banquets ou jeux funéraires), illustrent aussi la vie quotidienne. La tombe du Triclinium (v. 470 av. J.-C.), aujourd’hui conservée au Musée national tarquinien, est l’un des témoins de l’esprit nouveau qui anime cette période. L’homme, tout en prenant une place plus importante, est parfaitement intégré à la nature qui l’entoure. La composition est non seulement aisée, mais aussi structurée et cohérente ; le trait souple est moins schématique, et les variations chromatiques sont plus nombreuses. Si l’inspiration est encore grecque, le thème du plaisir musical est traité ici d’une façon tout à fait originale.
Dès la fin du ve s. et durant tout le ive s. av. J.-C., l’Étrurie traverse une période économique difficile. Pendant cette phase classique, une méditation mélancolique se substitue à l’allégresse et à la force vitale de l’époque précédente. L’au-delà devient terrifiant, mais l’artiste étrusque garde toute sa verve lorsqu’il évoque les démons et le royaume d’Hadès. Certains portraits sont de grande qualité, comme en témoigne celui de la jeune femme dans la chambre ancienne de la tombe de l’Ogre (fin du ive s. av. J.-C.). Le peintre maîtrise la technique grecque, un léger tracé noir affirme la pureté du profil, le passage d’une couleur à l’autre n’est pas brutal, et le clair-obscur accentue certains détails.
Avant de disparaître complètement au iie s. av. J.-C., la peinture tarquinienne est l’œuvre d’artisans populaires qui, malgré de multiples sources d’inspiration, n’oublient pas certains éléments de la tradition locale. Le séjour de l’homme outre-tombe est devenu une préoccupation majeure, et toutes les fresques sont le reflet d’une profonde angoisse.
Le Musée national tarquinien, installé dans le palais Vitelleschi (xve s., bel exemple d’architecture du début de la Renaissance) contient, outre certaines peintures détachées provenant des tombes, les trésors qui ont été trouvés dans celles-ci : de la bijouterie, des vases grecs et une remarquable collection de sarcophages à personnages.
Dévastée par les Lombards (iiie s.) puis par les Sarrasins (viiie-ixe s.), Tarquinia fut désertée par ses habitants, qui fondèrent la bourgade voisine de Corneto. Corneto devint un évêché en 1435 et, après avoir été longtemps commune libre, fut incorporée dans les territoires pontificaux au xvie s. Il reste un bon nombre des tours qui furent érigées par ses habitants. Corneto prit en 1872 le nom de Corneto Tarquinia et en 1922 celui de Tarquinia.