ours blanc

Ours blanc
Ours blanc

Chasseur de phoques à la fourrure neigeuse, l'ours blanc est le plus récent de tous les ours. De la même lignée que l'ours brun, il s'est sans doute détaché de ses cousins au poil sombre il y a moins de 100 000 ans, lors de leur arrivée en Amérique du Nord par le détroit de Béring.

Introduction

Comme tous les carnivores contemporains, l'ours blanc est issu de la famille des miacidés, petits mammifères arboricoles à queue longue apparus il y a entre 30 et 50 millions d'années au moment où se sont éteints les créodontes, première famille de carnivores connue. Les miacidés se sont propagés rapidement et ont donné naissance, il y a 32 millions d'années, à trois branches principales, les « chats », les « chiens » et les « phoques ». Les premiers ours descendaient, en fait, de gros chiens qui vivaient à la fin de l'oligocène, il y a quelque 27 millions d'années. Par la suite, plusieurs lignées se sont développées, notamment Arctotherium, d'où est issu Ursavus, ancêtre de tous les ours actuels, apparu il y a environ 20 millions d'années. Sa taille était celle d'un renard ou d'un fox-terrier. Le premier animal que l'on peut appeler Ursus n'a fait son apparition que plus tard, il y a entre 5 et 10 millions d'années.

Plusieurs branches d'Ursus mènent aux espèces contemporaines. À l'une de celles-ci appartient l'ours étrusque (Ursus etruscus), grand ours fossile du pléistocène inférieur (entre 1,5 et 2 millions d'années), ancêtre de l'ours des cavernes européen (Ursus spelaeus). De très grande taille, ce contemporain de l'homme de Neandertal s'abritait du froid hivernal dans des grottes. Il s'est éteint à la fin de la dernière période glaciaire, il y a 12 000 ans, pour des raisons qui restent encore obscures. En Asie, un nouveau type d'ours commence alors à se différencier du reste de la famille, Ursus prearctos, puis d'autres espèces,  ressemblant de plus en plus à l'ours brun actuel. Ce dernier apparaît en Chine il y a 600 000 ans environ. Il colonise toute l'Eurasie et finit par traverser le détroit de Béring, il y a moins de 100 000 ans, pour gagner l'Amérique du Nord. Lors de leur passage dans ces régions polaires, quelques individus restent prisonniers de la banquise et doivent s'adapter à un environnement très rude. Ils tentent de survivre en se nourrissant essentiellement des phoques ; leur organisme évolue et subit certaines métamorphoses, la couleur de leur fourrure change. L'ours polaire, ou Ursus maritimus, est né.

Aujourd'hui, les ours blancs, qui ont été classés par l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature) dans la catégorie « vulnérable »,  sont protégés dans les régions polaires de l'hémisphère Nord où ils vivent, mais sont gravement menacés par le réchauffement climatique.

La vie de l'ours blanc

Un solitaire nomade qui adore la compagnie de ses congénères

Véritable seigneur de l'Arctique, l'ours blanc est un solitaire, mais la femelle est souvent accompagnée de ses jeunes. Des groupes occasionnels (d'environ une quarantaine d'individus) se constituent pourtant autour du cadavre d'une baleine échouée, par exemple, autour des polynies, ces zones où la mer ne gèle jamais en raison de la remontée de courants marins chauds et où les phoques affluent, ou encore, parfois, sur certaines voies de migration, comme sur la côte ouest de la baie d'Hudson, à proximité de Churchill, au Canada. Les ours font alors preuve d'une tolérance qui étonne chez ces solitaires.

Un voyageur au long cours

L'ours peut couvrir de grandes distances – plus de 70 km en une journée. En une année, certains individus du Svalbard, qu'on a pu suivre grâce à leurs colliers émetteurs, ont parcouru jusqu'à 3 200 km. On estime que, au cours de leur vie, ces mammifères explorent une superficie équivalant en moyenne à la moitié de la France. Mais certains restent des années dans une même région.

La recherche de nourriture n'est pas la seule cause de leurs déplacements. Ainsi, à la fonte des glaces, en été, les ours suivent le retrait de la banquise vers le nord. En hiver, au contraire, ils se dirigent vers le sud. En automne, les femelles entreprennent de longs voyages vers les zones traditionnelles de mise-bas. Elles creusent elles-mêmes leur tanière dans des talus de neige et y demeurent près de 5 mois, vivant en léthargie sur les réserves accumulées pendant les mois précédents. Mais la température de leurs corps ne s'abaisse guère de plus de 5 °C, et elles peuvent s'éveiller si elles sont dérangées. Pendant ce long sommeil, elles n'urinent et ne défèquent que rarement, ou avalent leurs excréments, ce qui maintient propre la tanière.

En dehors de la brève période des accouplements printaniers, les deux sexes vivent séparés. Durant l'été arctique, qui ne dure que deux mois, certains ours ne remontent pas vers le nord, mais restent sur les côtes, spécialement dans la baie d'Hudson (Canada), où ils mènent une vie indolente, à la recherche de la maigre pitance offerte par la toundra après le dégel. Ils peuvent alors pénétrer jusqu'à 150 km à l'intérieur des forêts clairsemées du Nord. Mais c'est exceptionnel.

Les mâles et les femelles stériles passent l'hiver sur la banquise ou sur les glaces côtières, dans les zones où les phoques sont nombreux. Les plus jeunes et les plus âgés hibernent, quelques jours ou quelques semaines – jamais plus de deux mois –, dans des tanières semblables à celles des femelles.

Dans les toundras de l'Ontario et du Manitoba (baies d'Hudson et de James), on a également signalé des tanières d'été, simples excavations creusées jusqu'au permafrost (niveau du sol toujours gelé), pour rester fraîches.

La tanière

La tanière



C'est une sorte d'igloo ovale, long d'environ 2,5 m, haut de 1,5 m, et creusé à 2 ou 3 m sous la neige. L'entrée du couloir d'accès aux chambres, en pente, de 0,5 à 1 m de diamètre et de 0,3 à 6 m de long, est à demi fermée par un tas de neige. La chaleur de la femelle y maintient une température de 10 à 20 °C plus élevée qu'à l'extérieur.

Du phoque à presque tous les repas

Sur l'ensemble de l'année, les phoques représentent  l'essentiel de l'alimentation de l'ours blanc, qui est le plus carnivore de tous les ours. D'ailleurs, la répartition mondiale de l'ours blanc se calque sur celle des phoques arctiques.

Les principales espèces qu'il capture sont le phoque marbré (Pusa hispida), puis les phoques du Groenland (Pagophilus groenlandicus), barbu (Erignathus barbatus) et à capuchon (Cystophora cristata). Les morses mâles adultes sont exclus, sans doute à cause de leur masse et de leurs impressionnantes défenses.

Rarement capturés dans l'eau, les phoques sont généralement surpris sur la banquise ou à la surface du trou où ils viennent respirer. Dans ce dernier cas, le plus fréquent, l'ours guette sa proie patiemment, pendant plusieurs heures s'il le faut. Quand un phoque pointe son museau, il bondit et lui assène un formidable coup de patte. Si l'animal ne meurt pas sur le coup, il l'achève par des morsures à la nuque.

Un prédateur discret

D'une force considérable, l'ours blanc peut soulever d'une seule patte des animaux d'une centaine de kilos. Lorsqu'un phoque se repose sur la glace, il s'en approche en se confondant par mimétisme avec les blocs formés ici et là par la glace. Le naturaliste Alwin Pedersen a décrit une autre tactique d'approche : « L'ours est à la dérive sur un radeau de glace, quand il aperçoit sa proie. Celle-ci est à plus de 300 m en train de dormir paisiblement sur le rivage. Le chasseur plonge sans bruit, sans provoquer la moindre éclaboussure ni la plus petite vague. Il reste immergé un moment et réapparaît soudainement tout près du phoque assoupi. Celui-ci n'a pas le temps de voir ce qui lui arrive qu'il est déjà mort. » Pourtant, malgré son habileté et sa patience, l'ours blanc ne réussit à capturer sa proie que dans  moins de 20 % des cas seulement.

À la fin de l'hiver, lorsque les phoques mettent bas, les nouveau-nés deviennent des proies faciles pour les ours. Les jeunes phoques du Groenland et à capuchon sont capturés directement sur la banquise, dans les zones de reproduction ; les jeunes phoques marbrés sont détectés à l'odorat, dans les cavités où a lieu la reproduction, tout au bord de la mer, jusqu'à 1,5 m sous la neige et la glace. Quand il repère un jeune, le chasseur creuse et s'abat sur lui. Il l'attrape, l'extirpe de son trou et le mange sur la banquise.

En hiver, il ne consomme que la peau et la graisse de sa proie. Le reste de la carcasse profite à d'autres animaux, comme le renard polaire, auquel il assure ainsi la subsistance. Ce comportement peut surprendre, mais on peut lui trouver une explication : si l'ours blanc absorbait des protéines lors des froids vifs, il devrait avaler beaucoup d'eau ou de neige pour éliminer les déchets azotés.

En été, avec le retrait de la banquise, les ours blancs se rapprochent des côtes, où les proies sont plus rares. Ils consomment alors des baies, des racines et différentes herbes ou algues. Ils capturent aussi des poissons, des oiseaux aquatiques et leurs œufs, ainsi que des lemmings et des lièvres arctiques. Moins fréquemment, il leur arrive de surprendre des animaux terrestres de grande taille, tels que le renne et le bœuf musqué – des jeunes surtout. Enfin, faute de mieux, ils se nourrissent de déchets alimentaires ou de charognes.

Des jeux qui ressemblent à une danse au ralenti

Les ours blancs ne se battent que rarement. En revanche, ils adorent jouer. Bien sûr, ce sont surtout les oursons qui sont concernés par ces ébats qui leur permettent d'apprendre à mesurer leur force et à développer leurs réflexes. Ces sortes d'exercices les préparent déjà à leur future vie de chasseur. Et, lorsqu'ils avancent en âge, les ours ne perdent pas le goût du jeu, qu'il s'agisse de jeunes animaux proches de l'émancipation ou d'adultes vivant ensemble pour quelque temps. Il faut les voir se faire face, dressés sur leurs pattes arrière (ils sont plantigrades, comme les hommes) et s'empoigner par les pattes avant, chacun cherchant à faire plier l'autre, dans une lutte tout à fait amicale. Les deux ours exécutent ensemble une sorte de danse. Lentement, ils tournent ensemble, la gueule grande ouverte, mais sans se regarder et la tête baissée, comme s'ils craignaient qu'un échange de regard soit perçu comme une intention belliqueuse par leur compagnon de jeu.

Cette danse « embrassée », exécutée d'un pas pesant et lourd, s'accompagne de mordillements dans le cou du partenaire. Lorsqu'il veut faire chuter son adversaire, l'ours se dresse de toute sa hauteur. Campé sur ses pattes arrière, il prend alors lourdement appui, d'une patte, sur l'épaule de son vis-à-vis, ce qui ne manque pas de leur faire perdre l'équilibre, à l'un comme à l'autre. Mais ils se redressent mutuellement et se remettent à lutter, se repoussant et s'étreignant tour à tour. Toujours en se balançant, ils s'envoient des coups de patte. Si l'un d'eux culbute sous le choc, il se couche, ses énormes pattes tournoyant en l'air, tandis que l'autre se jette sur lui la gueule ouverte. Ils s'ébattent alors sur le sol avant de se relever et de recommencer. Le chercheur Terry Domico, qui a observé l'un de ces jeux-combats, a noté que chaque assaut durait un quart d'heure environ et que les ours, conscients de leur force, veillaient à ne pas se faire de mal. « À la fin, écrit-il, les deux lutteurs sont tellement hors d'haleine qu'on peut les entendre a une centaine de mètres. Exténués, essoufflés et échauffés, ils se séparent, s'allongent sur le sol glacé, avalent de la neige pour se rafraîchir et se reposent un moment. »

Des petits peu pressés de s'émanciper

Les brèves et uniques rencontres entre mâles et femelles ont lieu au printemps, sur la banquise, lors des accouplements. Ceux-ci débutent en avril et se poursuivent jusqu'en juin. Les mâles repèrent les femelles en œstrus à l'odeur. Chaque femelle est réceptive pendant trois semaines environ et chaque mâle peut copuler avec une ou plusieurs d'entre elles.

L'implantation des œufs fertilisés dans l'utérus et leur développement n'ont pas lieu tout de suite après l'accouplement : ils sont différés à l'automne. Et, en septembre-octobre, les femelles gestantes gagnent la terre ferme ou des secteurs de banquise à glace épaisse, en prévision des mises-bas. Selon les chercheurs  ayant travaillé sur l'île Wrangel, les femelles sont fidèles à leurs zones de mise-bas et y reviennent d'année en année. En octobre-novembre, elles se retirent dans leur tanière.

Les jeunes y naissent à partir de la fin novembre jusqu'en janvier, après une gestation de 7 à 9 mois (de 200 à 265 jours), la moyenne de la reproduction étant de 2 oursons par portée. Ceux-ci ouvrent leurs yeux à 4 semaines, et, à 3 mois, une fourrure dense les protège déjà. À cet âge, leur poids varie de 5 à 12 kg. En mars ou en avril, la famille peut sortir de l'abri hivernal. Elle ne s'en éloigne guère pendant quelque temps – de 1 à 30 jours – et continue à y passer la nuit.

La première sortie en famille

Pour la première sortie familiale, la femelle explore d'abord les alentours sur 50 à 100 m, avant de venir rechercher ses jeunes. Par beau temps, cette sortie est pour eux un vrai régal, avec des escalades sur les blocs de glace, des glissades sur la neige avec leur mère, sans qu'ils s'éloignent jamais de plus de 1 ou 2 km. À la première alerte, tout ce petit monde réintègre la tanière. Puis, c'est le départ vers la banquise fracturée à la recherche de la nourriture. Le printemps et l'été se passent ainsi en vagabondage sur la banquise ou le long des côtes, à la recherche d'emplacements favorables pour leur initiation à la chasse, sous la conduite de la mère. À l'automne, la famille regagne un secteur où elle pourra se creuser une nouvelle tanière pour hiberner.  Ces abris sont distribués par petits groupes de 2 à 5 et situés à une dizaine de mètres les uns des autres ; sur l'île Southampton, au Canada,  on  a observé des distances de 15 à 30 m entre ces abris.

Les jeunes ont alors la taille d'un grand chien d'une cinquantaine de kilos. Ils perdent et remplacent leurs dents au cours de l'hiver, et sont sevrés à la fin du repos hivernal, ce qui ne les empêche pas, d'ordinaire, de rester encore un an avec leur mère. Mais ils participent activement aux chasses. Certains ne partent qu'après une seconde année passée avec la mère, d'autres la quittent, tout en restant un peu plus longtemps avec leurs frères et sœurs. Les jeunes femelles atteindront la maturité sexuelle vers 3 ou 4 ans, mais la plupart ne mettent bas pour la première fois qu'à 5 ou 6 ans. La maturité des mâles est plus tardive – 6, 8 parfois 10 ans.

Pour tout savoir sur l'ours blanc

Ours blanc (Ursus maritimus)

L'ours blanc est, avec le grizzly et le kodiak, deux sous-espèces américaines de l'ours brun, le plus gros carnivore terrestre. En dépit de sa masse et de sa puissance, il paraît pourtant plus élancé que ces ours bruns, en raison de sa petite tête allongée comme le cou. Son organisme se caractérise par une parfaite acclimatation à la vie polaire et aquatique, et il s'est spécialisé dans la chasse au phoque. Ses pattes sont munies de griffes courtes, mais robustes et surtout très acérées. Le dessous des pattes est couvert de poils. Le museau est noir, comme la peau. La fourrure, dense, limite les déperditions de chaleur. Lorsque l'ours polaire va dans l'eau, seuls les grands poils de sa fourrure (les jarres) sont mouillés : ils se collent et forment une sorte de couverture qui protège la bourre. Au sortir de l'eau, les jarres sont englués et raidis, mais, dès que l'animal s'est ébroué, l'eau s'écoule vite, de sorte que le corps garde sa chaleur, même lorsque la mer commence à geler et que sa température avoisine les – 2 °C.

La couleur – blanche en hiver, jaunâtre en été – de l'ours polaire lui offre un bon camouflage pour la chasse aux phoques sur la banquise. Ses yeux sont protégés de l'intense luminosité de la banquise par un opercule agissant comme un polarisateur de lumière. Des palmures aux pattes jusqu'à la moitié des doigts lui facilitent la nage. Lorsqu'il se déplace, son allure normale est la marche, calme et lente, avec des pattes qu'il soulève peu et qui sont légèrement tournées vers l'intérieur et repliées à chaque pas pour leur éviter de frotter le sol. Mais, à peine se sent-il menacé ou se met-il à poursuivre un intrus ou une proie, qu'on le voit atteindre des vitesses insoupçonnées – de l'ordre de 30 à 40 km/h. À l'aide de ses griffes, il escalade les blocs de glace les plus raides. Dans l'eau, il nage bien et souvent, pour rejoindre la côte ou traverser des bras de mer qui séparent deux plaques de glace. Son endurance est remarquable : il n'est pas rare de voir un ours blanc nager à plusieurs kilomètres de tout refuge flottant. L'animal fait aisément une centaine de kilomètres sans s'arrêter. Il peut aussi nager sous l'eau, les oreilles rabattues en arrière et les narines fermées, sans s'enfoncer toutefois à plus de 1 ou 2 mètres de profondeur. Il garde alors les yeux ouverts et est capable de bien voir. Sa vue et son ouïe sont au moins égales à celles de l'homme, mais son odorat est bien supérieur : l'ours « sent » le phoque à des kilomètres de distance, jusqu'à 30 km selon certains !

Les effectifs mondiaux de l'espèce  étaient estimés à 10 000 individus dans les années 1960. Aujourd'hui, ils sont estimés à environ 20 000 – 25 000 (U.IC.N., 2006)... Mais si le réchauffement climatique se poursuit au rythme actuel, la réduction de l'habitat de l'ours polaire due à la fonte de la banquise pourrait conduire, selon certains scientifiques, à sa disparition complète dans une centaine d'années. Des estimations plus basses du groupe de la Commission sur la survie des espèces de l'U.I.C.N., réunie en juin 2005, laissent entrevoir une réduction de ses effectifs de l'ordre de 30 % en une quarantaine d'années.

          

OURS BLANC

Nom (genre, espèce) :

Ursus maritimus (ou Thalarctos maritimus)

Famille :

Ursidés

Ordre :

Carnivores

Classe :

Mammifères

Identification :

Ours de grande taille, pelage blanc ou blanc jaunâtre ; peau noire ; yeux, truffe et griffes noirs ; long cou, petite tête allongée, oreilles courtes ; petite queue

Taille :

Mâles : de 2 à 2,5 m ; femelles : de 1,8 à 2,1 m ; queue de 7,5 à 13 cm. Haut, au garrot : de 1 à 1,6 m

Poids :

Mâles : 410 kg ; femelles : 320 kg (moyennes)

Répartition :

Régions polaires de l'hémisphère Nord, surtout au nord du cercle polaire ; États-Unis (Alaska), Canada, Danemark (Groenland), Norvège (Svalbard), Russie (Sibérie) et océan Arctique

Habitat :

Côtes et mers couvertes de glace en bordure sud de la banquise permanente

Régime alimentaire :

Omnivore à prédominance carnivore

Structure sociale :

Solitaire et cellule familiale matriarcale

Maturité sexuelle :

Entre 3 et 8 ans ; les femelles plus tôt que les mâles

Saison de reproduction :

Accouplement d'avril à juin, naissance de décembre à janvier

Durée de gestation :

De 7 à 9 mois (200-265 jours), avec implantation différée

Nombre de jeunes par portée :

2, parfois 1, ou 3 exceptionnellement

Poids à la naissance :

De 500 à 700 g

Longévité :

34 ans (maximum connu) ; en moyenne 20-25 ans

Effectifs :

De 20 000 à 25 000 (2006) ; en diminution

Statut de protection :

Protégé dans certaines zones par les législations nationales et par des conventions internationales ; classé comme vulnérable par l'U.I.C.N.

Remarque :

Records : 3,65 m (mâle) et 1 000 kg (mâle)

 

Signes particuliers

Pattes

Le dessous des pattes (sur lequel l'ours marche) est couvert de poils courts et raides, à l'exception des pelotes digitales et plantaires. Cette particularité agit comme des raquettes : elle isole les pattes du froid et permet à l'ours de ne pas glisser sur la glace ou la neige tassée. Comme l'homme, l'ours est plantigrade : il s'appuie sur toute la surface de ses pattes lorsqu'il marche. Les pattes avant sont les plus larges, avec 30 cm de diamètre. Très précieuses pour la capture des phoques, cinq griffes non rétractiles, courtes et robustes, terminent chaque patte et constituent autant de crampons acérés. De plus, les pattes sont palmées jusqu'à la moitié des doigts, ce qui facilite la nage et témoigne de l'adaptation de l'ours blanc au milieu aquatique.

Tête

Elle est assez petite par rapport au corps. Son profil est plus allongé et plus aplati que chez les autres ours, ce qui fait paraître l'ours blanc plus élancé. La longueur du crâne varie de 37 à 41 cm, selon qu'il s'agit des populations de l'est du Groenland – Svalbard – ou de celles de la mer des Tchouktches, en Sibérie : cette variation doit sans doute être mise en relation avec l'existence de sous-espèces.

Poils

Les deux types de poils qui constituent la fourrure de l'ours blanc sont blancs et implantés dans le derme de la peau noire de l'animal : un poil court et dense, la bourre, et un poil plus long, le jarre. En hiver, ce double pelage est plus dense. Une couche de graisse sous-cutanée de 5 à 10 cm d'épaisseur protège aussi l'ours du froid. Les poils sont creux, une structure qui, selon certains, permettrait à l'ours blanc de capturer les rayons ultraviolets du soleil et de les guider jusqu'à la peau noire. La conversion des U.V. en chaleur contribuerait à l'isolation thermique.

Milieu naturel et écologie

Si l'ours brun est essentiellement forestier, l'ours blanc, lui, est associé à la neige, à la glace et au froid. C'est un familier des icebergs comme des banquises. Mais pas de n'importe quelles banquises. Celles-ci sont en effet de différentes sortes.

Le pack

Dans les régions polaires, on distingue la banquise permanente de la banquise saisonnière et de la banquise côtière. La première, centrée sur l'océan glacial Arctique, ne fond jamais, même en été. Elle a de 400 à 500 km de diamètre et une épaisseur qui va de 3 ou 4 m jusqu'à 50 ou 60 m, du fait de l'enchevêtrement des plaques glaciaires, puis de leurs soudures ultérieures, sous l'action des tempêtes et des courants. Cette banquise-là est entourée, sur toute sa périphérie, d'une banquise saisonnière, ou « pack », qui atteint son maximum d'extension en hiver. Sous l'effet des alternances de dilatation ou de contraction des glaces, ainsi que des courants marins et des vents, le pack constitue une banquise très fracturée et  chaotique avec de nombreux chenaux d'eau libre, dont le tracé change de jour en jour. En hiver, le pack soude la banquise permanente aux côtes des îles et des continents. En été, au contraire, il se rétrécit considérablement, jusqu'à disparaître par endroits, et laisse un chenal maritime le long des continents.

Quant à la banquise côtière, elle se forme en automne, avant le pack, les eaux étant le long des côtes plus douces qu'en haute mer, notamment à l'embouchure des fleuves. Elles gèlent ainsi plus facilement. Quand arrivent les grands froids, les deux banquises fusionnent grâce au pack.

De ces trois banquises, celle qui offre les conditions les plus favorables aux phoques, et donc aux ours, est le pack, grâce à la formation de zones d'eau libre entre les plaques de glace qui dérivent, s'entrechoquent ou se chevauchent. On ne voit qu'exceptionnellement l'ours sur la banquise permanente, jusqu'à 88° de latitude nord, car il ne peut guère y trouver des phoques.

Les activités saisonnières de l'ours polaire suivent ainsi directement les variations de ce pack. De l'automne au printemps, la plupart des ours sont sur cette banquise, à l'exception des femelles gestantes, en hibernation sur la terre ferme.

Lors du très bref été arctique, à l'époque de la fonte, les ours se concentrent sur les zones résiduelles ou se déplacent vers la terre ferme, sur les côtes des îles et des continents. Mais, même lorsqu'ils doivent aller sur la terre ferme, ils ne s'éloignent jamais beaucoup des rives. C'est à ce moment que l'on peut trouver les ours polaires très au sud de leur aire de répartition habituelle. À la fin de l'été, lorsque la banquise côtière commence à se former, tous les ours présents sur les côtes s'y rendent. Ils y retrouvent les lieux où la glace est apparue en premier. Plus la mer se fige, plus ils désertent la terre ferme pour s'éparpiller sur la banquise.

Les grands rassemblements

Ainsi se forment les concentrations spectaculaires que l'on observe en automne près de la ville de Churchill, dans la baie d'Hudson, et qui, pour les touristes, constituent l'une des plus grandes curiosités de l'Arctique. À cette époque, en effet, la plupart des ours qui ont passé l'été le long de la côté ouest de la baie rejoignent le cap situé à quelques kilomètres seulement de la ville, dans l'attente de voir la banquise côtière et le pack prendre forme.

Du plancton à l'ours

Sans son étonnante adaptation au milieu aquatique, l'ours blanc n'aurait certes pas pu survivre dans ces régions polaires où les terres sont trop pauvres pour assurer toute l'année la survie d'un tel prédateur. Ce dernier se situe à l'extrémité d'une chaîne alimentaire qui commence au plancton marin et passe par les poissons, puis par les phoques.

Le phytoplancton, composé surtout d'algues unicellulaires, capte l'énergie solaire. Or il ne se développe que grâce à l'existence d'eaux libres (fracturations de la banquise, polynies), et grâce à la semi-transparence de la glace aux rayons solaires. Il est lui-même consommé par le zooplancton, ou animaux microscopiques dont se nourrissent à leur tour les cétacés et de nombreux poissons d'eaux froides. Les poissons constituent la base alimentaire des phoques et des oiseaux de mer. Puis vient l'ours blanc qui mange à la fois les phoques et divers animaux appartenant à cette chaîne trophique. Les débris alimentaires et les cadavres de toutes ces espèces s'accumulent au fond de la mer, permettant la formation d'une riche faune benthique – mollusques, vers, étoiles de mer, etc. – nécessaire à l'alimentation de nombreux poissons et du morse.

Le renard polaire profite également, en hiver, de la présence de l'ours blanc et se nourrit des phoques capturés par ce grand prédateur, qui ne consomme que la peau et la graisse...

Quand l'ours dort debout

Toutes les habitudes des ours polaires ne sont pas encore connues. Et les savants ont encore beaucoup à apprendre de cet habitant du Grand Nord. Ainsi, les chercheurs  ont découvert une autre particularité de l'ours blanc qui lui permet de survivre aux froids les plus rigoureux des régions polaires : son extraordinaire aptitude à passer d'un stade actif à un stade léthargique. On savait, en effet, depuis longtemps que les femelles gestantes hibernaient dans leur tanière de mise-bas, mais on pensait que les mâles et les jeunes qui, en hiver, errent sur les glaces échappaient à cette hibernation et restaient actifs en permanence. Or le chercheur Ralph Nelson s'est aperçu que certains dorment, en quelque sorte, debout, car – dit-il – ils « hibernent en marchant » ! L'ours serait, selon ce chercheur, capable de passer à volonté d'un état à un autre, ce qui lui permettrait de traverser sans problèmes les périodes difficiles...

L'ours blanc et l'homme

Le seigneur de l'Arctique n'est pas farouche

Les Esquimaux ne pouvaient qu'être fascinés par la puissance de l'ours blanc, prédateur dont ils partagent l'environnement et la nourriture. Sans doute celui-ci leur a-t-il même servi de modèle pour la chasse au phoque. Comme l'ours, par exemple, les Esquimaux font le guet aux trous de respiration de leurs proies...

Un être mythique et lunaire

La place importante occupée par l'ours polaire dans la mythologie des Esquimaux Inuit a été mise en évidence par Christian Kempf, du Groupe de recherche en écologie arctique, qui évoque, dans un de ses ouvrages, la puissance surnaturelle de Nanouk : « Pour les habitants de l'Arctique, l'ours Nanouk représente un proche parent, qui est aussi un être idéal [...]. D'où le conseil donné à l'orphelin, ou au chasseur malchanceux, d'aller “faire leur apprentissage chez Nanouk”. »

Les rapports de l'homme avec cet animal ne pouvaient toutefois qu'être conflictuels, tous deux occupant le sommet de la pyramide écologique. En faire une figure mythique, c'était le rendre accessible, dissimuler la crainte qu'il inspire. À tel point que, dans la mythologie esquimaude, les mariages entre hommes et ours n'ont rien d'exceptionnel.

L'ours est tout naturellement associé à l'astre de la nuit : l'homme-lune, sorte de patron des chasseurs, glisse sur la banquise dans un traîneau tiré par les ours.

La mythologie et les croyances esquimaudes font de Nanouk un symbole de force et de puissance : ainsi, le manche du fouet qui était offert au jeune Esquimau en âge de devenir chasseur était l'os pénien d'un ours blanc. La médecine esquimaude traditionnelle attribuait également des vertus curatives à l'animal et soignait la stérilité des femmes en leur faisant absorber un pénis d'ours blanc.

Une coopération internationale

Très vite, il est apparu qu'une coopération internationale était nécessaire pour la préservation d'une espèce répartie tout autour du Pôle. Ce fut l'objectif de la première conférence internationale à l'université de Fairbanks, en Alaska, en septembre 1965. À l'époque, sur les 1 300 ours tués chaque année dans le monde, 300 l'étaient en Alaska. L'U.R.S.S., qui avait interdit cette chasse en 1956, réclamait alors un moratoire mondial de cinq ans pour la chasse à l'ours polaire. Mais les délégués se sont contentés de protéger les oursons et la mère. Toutefois, ils convinrent de considérer les ours blancs, mâles ou femelles, comme une « ressource circumpolaire » placée sous la responsabilité des cinq pays concernés, à savoir les États-Unis (Alaska), le Canada, le Danemark (Groenland), la Norvège (Svalbard et îles environnantes) et l'U.R.S.S.

En janvier 1968, à l'initiative de l'U.I.C.N., un « Groupe de travail mondial sur l'ours blanc »  était créé. Ce qui n'a pas empêché la chasse de se poursuivre. La sophistication des armes et des moyens de transportrendait cette chasse terriblement meurtrière. On comptait encore 1 500 ours blancs tués dans le monde en 1968 et 1969. De nouvelles mesures ont donc été prises localement, d'abord en Alaska (novembre 1970), puis en Norvège (juillet 1973, moratoire de 5 ans imposé au Svalbard).En juillet 1975, la Convention internationale sur le commerce des espèces animales et végétales menacées (Convention de Washington) a stipulé que des permis seraient désormais nécessaires pour l'exportation des ours blancs ou de leur fourrure : un registre permanent de ces exportations serait tenu par les gouvernements des 50 pays signataires et l'espèce a été inscrite à l'Annexe II de la Cites (convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction). L'année suivante, en mai 1976, fut mis en application un accord international qui allait plus loin encore, puisqu'il visait à bannir toute autre chasse que celle pratiquée avec des moyens traditionnels et hors de zones prescrites. Le texte de l'accord appelait également les États à protéger l'écosystème dont l'ours polaire fait partie, et insistait sur la protection des zones de mise-bas et d'alimentation, ainsi que sur celle des voies de migration. Des propositions annexes concernaient l'établissement d'un standard international de marquage, la protection des femelles et de leur portée, et celle des tanières. Par ailleurs, les Esquimaux de l'Alaska et du nord du Canada signaient ensemble, en 1988, un plan commun de chasse. Au Canada cependant, dans le cadre des quotas annuels accordés à chaque village côtier des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, les chasseurs ont aussi l'autorisation d'attribuer un certain nombre de permis à des chasseurs sportifs non résidants. Des Inuits locaux guident ces derniers moyennant des frais allant de 18 000 $ à 20 000 $ par chasse, ce qui représente une source importante de revenu pour ces populations.. Outre la chasse, l'exploitation des régions polaires – mines, bases militaires, observatoires météorologiques, usage de pesticides et de métaux lourds - et, enfin, plus généralement, le réchauffement climatique, ont fait surgir de nouvelles menaces. Depuis la fin des années 1980, d'autres mesures de conservation ont ainsi été prises : en 2006, l'U.S. Fish & Wildlife Service d'Alaska a proposé d'inscrire l'ours blanc à la liste américaine des espèces en danger régie par la loi de 1973, une initiative activement soutenue par le WWF, mais qui était toujours en discussion en 2008.  Par ailleurs, en 2007, est entré en vigueur un accord bilatéral, signé en 2000 par les États-Unis et la Russie, en vue de la protection de l'ours polaire de la région Alaska-Chukotka. Au Canada, où la gestion des ours blancs relève de la compétence des gouvernements provinciaux et territoriaux, deux comités nationaux permanents sur l'ours blanc (l'un composé d'experts techniques et l'autre de gestionnaires de la faune) se réunissent chaque année pour examiner les nouveaux résultats des recherches et les questions de gestion. En 2002, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (C.O.S.E.P.A.C.) a évalué la situation de l'espèce comme « préoccupante ».

Deux avions contre un ours

Au cours du xxe siècle, ce sont les chasses au trophée qui se sont développées, avec l'utilisation d'armes de plus en plus performantes et de moyens de transport ultramodernes – bateaux ou avions munis de skis, permettant de se rendre dans les lieux les plus difficiles d'accès. Ce dernier type de chasse sophistiquée fut particulièrement prisé en Alaska. Il s'effectuait généralement avec deux appareils. Pour la sécurité, disait-on. En fait, c'était pour mieux piéger l'ours : dès que la proie était repérée, l'un des avions atterrissait sur la banquise pour déposer le guide et le chasseur, et l'autre avion continuait à voler pour rabattre l'animal.

La baisse de population due à ce « sport » destructeur n'a pas pu être évaluée. On peut toutefois s'en faire une idée d'après l'évolution des statistiques de chasse. Dans deux zones situées au Groenland et dans la mer de Barents, les chasseurs tuaient 725 ours en 1925, deux fois moins au début des années 1930 et une quarantaine en 1962... Et cela, sans qu'aucune limite ait été mise à leur activité.

En 1955, face à une situation aussi dramatique, l'Union internationale pour la conservation de la nature (U.I.C.N.) demanda que tous les pays de l'Arctique prennent des mesures pour protéger l'ours polaire. L'année suivante, le Parlement soviétique adopta un décret prohibant les tirs dans toutes les zones arctiques de l'U.R.S.S. La capture des jeunes pour les zoos fut également interdite, sauf autorisation spéciale. En 1960, l'île Wrangel, en Sibérie orientale, l'une des plus importantes zones de mise-bas en Russie fut intégralement transformée en réserve. À la même époque, la Norvège a établi à son tour des restrictions pour la capture des jeunes et la chasse des adultes sur la terre du Roi-Charles. Au Groenland, l'interdiction porte sur la période du 1er juin au 31 octobre. Au Canada enfin, des mesures sont prises pour éliminer la chasse sportive depuis le Québec jusqu'aux Territoires du Nord-Ouest. Seuls les indigènes, Esquimaux et Amérindiens, échappent aux interdictions, ainsi que de rares chasseurs pourvus de licences.

Churchill, la capitale mondiale de l'ours polaire

Une importante zone de mise-bas a été découverte en 1969, au sud-ouest de la baie d'Hudson, au Canada, à 60 km de Churchill. Une autre se trouve au sud de la rivière Nelson, avec des tanières dispersées à l'extrême nord-ouest de la baie de James, près du cap Henrietta Maria.

En automne, vers la mi-octobre, tous les ours – à l'exception des femelles gestantes, retenues sur les zones de mise-bas – se concentrent le long de la côte en attendant la formation de la banquise, pour y chasser les phoques. En fonction de la date de l'événement, on assiste à des rassemblements sur certains points de la côte – en particulier sur le cap à l'est de Churchill, où ont été dénombrés jusqu'à 250 ou 300 ours –, tandis qu'au même moment d'autres se trouvent le long de la côte jusqu'à la baie de James. La population actuelle de cette zone oscillerait entre 1 000 et 1 500 individus.

Ainsi, la ville de Churchill, petit port de 800 habitants, est un endroit idéal pour observer des ours blancs. D'un accès facile pour les touristes, elle offre de bonnes conditions de séjour et se trouve juste sur la voie de migration des ours. Des centaines de visiteurs y affluent chaque année, de la fin de septembre à la mi-novembre, dans le seul but d'observer le spectacle de ces rassemblements d'animaux. Pour éviter les accidents, les autorités prennent toutes sortes de mesures – rappels constants aux touristes que ces animaux sont sauvages, signalisations des zones dangereuses, vigilance 24 heures sur 24 de la police locale, mise en place de puissants systèmes d'alarme...

Les animaux les plus dangereux sont capturés et mis en cage. On leur donne à boire, mais pas à manger, pour qu'ils n'aient pas envie de revenir dans cette zone (de toute façon, ils sont capables de jeûner longtemps). Maintenus en captivité jusqu'à ce que la mer gèle, ils sont alors transportés en hélicoptère et relâchés sur la banquise, où ils peuvent se disperser, loin des zones habitées.

De telles mesures s'imposent, car l'ours blanc est un animal fureteur, nullement farouche, aux réactions assez imprévisibles. La plupart du temps, il cherche plutôt à éviter l'homme. Mais il arrive aux bêtes affamées de piller des stocks de nourriture entreposés par les Esquimaux dans la toundra, ou de fouiller les poubelles autour des habitations. Une mauvaise rencontre peut parfois mal tourner, surtout si, comme c'est le plus souvent le cas, l'on a affaire à des individus blessés ou affamés, à des femelles accompagnées de leurs oursons et qui se sentent menacées, ou simplement à de jeunes animaux un peu trop curieux. Les randonneurs sont particulièrement exposés. Bien qu'ils soient tenus à porter un fusil quand ils s'aventurent dans ces régions, on recense néanmoins, dans l'Arctique, un cas mortel tous les deux ou trois ans.

Initiation à la chasse

Dans la cérémonie qui accompagne, selon la tradition esquimaude, la première capture, l'ours polaire occupe tout naturellement la première place. La fête est organisée par la famille du jeune chasseur, avec des chants et des danses. Le héros de la fête mime lui-même son exploit, un fusil à la main, devant un crâne d'ours. Sa mère ou sa femme l'accompagnent, car leur présence évoque les relations des ancêtres avec les ours. Il s'agit, en fait, d'une initiation symbolique du nouveau venu appelé à intégrer la grande famille des chasseurs esquimaux.

Traqué par les chasseurs pendant 200 ans

Si l'on excepte l'action des populations indigènes (Esquimaux et Amérindiens), qui l'ont pratiquée de tout temps, la chasse à l'ours polaire n'est devenue intensive qu'à partir du xviie siècle, c'est-à-dire à l'époque où les eaux arctiques se sont ouvertes à la pêche, notamment à la pêche à la baleine.

Pendant deux siècles, l'ours blanc a été ainsi traqué, au Svalbard, en Nouvelle-Zemble, en mer de Béring, en terre de Baffin, dans la baie d'Hudson et probablement partout. Le déclin de l'industrie baleinière dans la deuxième moitié du xixe siècle a accru la chasse aux phoques et aux ours. Les chasseurs étaient surtout concentrés dans l'est de l'Arctique canadien, au Groenland, sur la terre François-Joseph.