loutre d'Europe

Loutre
Loutre

Plus à l'aise dans l'eau, où elle évolue comme une petite acrobate, que sur terre, où son allure est quelque peu lourdaude, la loutre d'Europe, à la riche fourrure et au museau fureteur, est un animal discret, furtif et trop peu connu, bien que sa répartition couvre cinq continents. Présente autrefois sur presque toute la planète, l'espèce est aujourd'hui en régression.

Introduction

L'histoire des origines de la loutre est difficile à retracer, en raison de recherches insuffisantes et surtout de la rareté des  fossiles. La loutre d'Europe, Lutra lutra, dite aussi « loutre d'Eurasie », car sa population est plus importante encore sur le continent asiatique, appartient au genre Lutra, lui-même classé dans la sous-famille des lutrinés et dans la famille des mustélidés, apparue sans doute au début de l'oligocène.

Potamotherium serait un ancêtre des loutres ; on en a retrouvé, en France, des restes datés de la fin de l'oligocène et du miocène, il y a environ 30 millions d'années. Sa dent carnassière supérieure, proche de celle du phoque, n'est pas typique des mustélidés modernes, mais elle a pu changer ultérieurement. Certains chercheurs pensent donc que Potamotherium pourrait être également un ancêtre du phoque. Le genre Lutra est apparu d'abord en Europe, puis, plus tard, en Amérique et en Afrique du Nord. En Europe, la loutre contemporaine a été précédée par d'autres espèces, comme la loutre de Reeve au pléistocène, il y a environ un million d'années. Lutra lutra n'est connue sous sa forme actuelle qu'à partir du pléistocène supérieur, soit de moins de 200 000 à moins de 90 000 ans. À cette époque, celle de l'homme de Neandertal, la loutre cohabitait sur la planète avec le rhinocéros laineux et le lion des cavernes, et elle a peut-être côtoyé des loups, des renards, des cerfs, des chevaux et des bisons.

L'homme connaissait déjà la loutre à l'époque préhistorique, puisque dans les grottes de Lascaux, en Dordogne, ont été retrouvés des bois de rennes gravés de représentations de cet animal. L'identification en est d'autant plus facile que, sur ces gravures rustiques, les loutres portent un poisson dans la gueule.

Au début du xxe siècle, la loutre était présente dans tous les pays européens, excepté l'Islande, et occupait tous les milieux aquatiques, depuis les lacs de montagne jusqu'aux bords de mer, mais également, comme aujourd'hui, tous les principaux continents : Afrique, Asie et Amérique.

Aujourd'hui, la loutre est encore répandue, mais en régression : son extension est limitée au nord par le cercle arctique et au sud par l'Afrique, d'un côté, et par Java et Sumatra, de l'autre.

La vie de la loutre

Un domaine en bordure d'eau

La loutre, qui vit au bord des rivières, est en général un animal solitaire. Mis à part le groupe constitué par les femelles et leurs jeunes de l'année, une population de loutres comprend des mâles adultes dominants et des jeunes animaux erratiques à la recherche d'un territoire. Ces trois catégories se répartissent en des tiers sensiblement égaux.

Mâles dominants et femelles reproductrices sont des résidents permanents qui occupent chacun un territoire ou un domaine vital délimité. Le territoire, espace très régulièrement parcouru, abondamment marqué, est vigoureusement défendu par la femelle, surtout durant les premiers mois de l'éducation des jeunes. Si la femelle se cantonne aux alentours immédiats de sa catiche (« terrier ») de reproduction avant et après les naissances, les autres loutres ne cessent de se déplacer quotidiennement.

L'étude du déplacement des animaux, grâce à des colliers émetteurs, par les chercheurs J. et R. Green, en Écosse, et, en France, dans le Marais poitevin, par René Rosoux a permis de constater que les loutres circulent la nuit sur plusieurs kilomètres et selon des trajets précis, alternant alors les phases de chasse et de repos.

Elles changent très souvent, pour ne pas dire quotidiennement, de gîte. Ainsi, dans le Marais poitevin, une femelle suivie pendant 200 nuits a-t-elle eu recours à 56 gîtes différents, dont 34 ne furent que des abris provisoires d'un jour. Durant cette période, elle a occupé une zone de marais de 25 km2.

Les gîtes sont de trois types : simple couche à ciel ouvert, légèrement camouflée dans la végétation des rives ; abri mieux dissimulé dans des excavations, sous des pierres ou des branchages ; enfin, véritable catiche, dont l'entrée est étroite et soigneusement cachée.

Territoires et domaines vitaux

Territoires et domaines vitaux



Chaque territoire de femelle, d'une dizaine de kilomètres environ en Grande-Bretagne, France et Suède, s'étend le long d'un cours d'eau courante et parfois aussi au bord d'étangs ou de marais. Le mâle possède un territoire plus grand, englobant ceux de plusieurs femelles reproductrices.

Un menu adapté àchaque saison

Les loutres se nourrissent le plus souvent de poissons. Mais elles consomment aussi des batraciens et tous autres animaux se trouvant près des rivières, des étangs, des lacs ou de la mer.

Contrairement à ce que l'on prétend souvent, elles ne sont nullement voraces au point d'absorber jusqu'à 10 kg de nourriture par jour. Elles mangent chaque jour environ 10 % de leur poids corporel seulement, soit de 500 g à 1 kg d'aliments, même en captivité, alors qu'elles ne risquent pas de manquer de ressources.

Dans la nature, les poissons représentent, suivant les régions et sur l'ensemble de l'année, de 50 % à 90 % des proies consommées par les loutres.

Plus opportuniste que spécialiste

Dans les petites rivières aux eaux courantes du Massif central, de Bretagne ou d'Irlande, la truite constitue l'essentiel du repas des loutres. La lotte, en Suède, et l'anguille, dans les canaux du Marais poitevin, tiennent aussi une place prépondérante dans leur alimentation variée.

La recherche de ces proies est l'occasion de déplacements fréquents, car l'animal exploite tour à tour les différentes parties du territoire. Ainsi, quand les étangs sont gelés, il se rabat sur les rivières où les eaux sont restées libres. Inversement, lorsque les cours d'eau débordent et qu'une partie de son territoire est inondée, il l'abandonne momentanément au profit de plans d'eau où le niveau est plus stable.

Un chasseur rusé

Les performances aquatiques de ce mammifère lui permettent d'attraper ses proies à la nage, en eau profonde, où elle sait habilement les neutraliser. La loutre connaît parfaitement les ressources de son domaine et les périodes favorables pour chasser telle ou telle proie. C'est pourquoi l'alimentation de cet animal connaît d'importantes variations locales et saisonnières, et comprend des poissons, des batraciens, des petits mammifères, et même des insectes et des oiseaux.

La loutre se nourrit aussi de crustacés en bord de mer.

La chasse sous l'eau

La chasse sous l'eau



Pour saisir ses proies, la loutre les attaque par-dessous, profitant d'un angle mort dans leur champ de vision. Le plus souvent, elle accule sa victime sous la berge ou sous des pierres.

La loutre et le crapaud

Au printemps, la loutre s'attarde plusieurs semaines près des mares et des étangs, à l'époque où les batraciens s'y rassemblent pour la ponte. Elle dévore la grenouille tout entière, mais ne mange qu'une partie du crapaud, car ce dernier est protégé par toute une série de glandes à venin. Afin de ne pas être empoisonnée, elle pratique une ouverture sous la tête de l'animal, puis le dépouille avant de l'avaler. Elle abandonne la peau sur la berge, ne consommant que les parties charnues de l'animal.

De brèves rencontres dans une vie solitaire

Vivant de façon solitaire et évitant plutôt les autres adultes de leur espèce la majeure partie de l'année, les loutres ne connaissent ni vie de couple ni fidélité au partenaire. Chaque animal se cantonne dans son territoire, et la rencontre entre les sexes ne dure qu'un très court moment.

Le langage des « épreintes »

Une certaine vie sociale se manifeste tout de même à travers des rencontres directes lors des déplacements, ou grâce aux informations transmises par les fientes, ou « épreintes », mot du vieux français épreindre : « déféquer en plusieurs fois, par petites quantités ».

Des expériences effectuées en captivité et des analyses extrêmement sophistiquées ont montré que, grâce à ces épreintes, les animaux sont capables de se reconnaître entre eux.

De fait, la défécation, l'urine mais aussi le musc émis par les deux glandes anales jouent un rôle primordial dans les relations entre mâles et femelles.

Pas de saison pour l'accouplement

Chez les loutres il n'y a pas de périodes de chaleurs, ni d'accouplements, ou de naissances à dates fixes, comme chez la plupart des autres carnivores. La reproduction peut intervenir à n'importe quel moment de l'année entre animaux ayant atteint la maturité sexuelle, c'est-à-dire âgés de deux ou trois ans au moins.

L'accouplement a, en général, lieu une seule fois dans l'année. Durant les préludes nuptiaux, le mâle et la femelle font « connaissance » dans une série de jeux endiablés. Le chercheur Philip Wayre, fondateur au début des années 1970 en Angleterre (Earsham, Suffolk) de l'Otter Trust, le plus ancien centre de conservation des loutres dans le monde, a observé le cérémonial qui accompagne la copulation. Lorsqu'il rencontre une femelle sur le territoire de celle-ci, le mâle la poursuit et l'entraîne dans l'eau, plongeant et nageant avec elle. Après quelques minutes de jeux, la femelle s'immobilise, son dos effleurant la surface, tandis qu'elle maintient sa queue arquée hors de l'eau. À ce signal, « le mâle monte par-derrière en tenant les reins de la femelle entre ses pattes avant et en saisissant le bas de son cou entre ses dents ». L'ensemble de ce cérémonial ne dure que de 10 à 20 minutes.

Dès la fin de l'accouplement, le mâle s'écarte et déserte le secteur occupé par la femelle, la laissant seule élever les jeunes.

Quelques mois pour apprendre l'essentiel

La loutre choisit très soigneusement la catiche où elle mettra bas ses petits. Pour que l'élevage des jeunes soit mené à bien, le plus important est la tranquillité : le nid doit se trouver dans un secteur peu fréquenté et d'accès difficile pour les éventuels prédateurs. C'est pourquoi la plupart des catiches sont inviolables, profondément enfouies dans des éboulis rocheux, sous des tas de bois ou entre les racines d'un gros arbre de la berge, où la loutre elle-même ne peut pénétrer que par un conduit étroit, l'entrée se situant parfois même sous l'eau.

Deux mois au creux de la catiche

Après une gestation qui dure 62 jours, la femelle donne naissance à 1 ou 2 loutrons, rarement 3 et très exceptionnellement 4 ou 5. Ses petits naissent aveugles, mais ils sont déjà revêtus d'une fourrure fine, gris pâle. Ils mesurent une douzaine de centimètres, et grandissent vite. À un mois, ils pèsent environ 700 g et ils dépassent nettement le kilogramme au bout de deux mois.

Jusqu'à cet âge, parfois même un peu plus longtemps, les jeunes ne sortent pas de leur catiche. Ils tètent leur mère, mais, très vite, celle-ci leur apporte des proies qu'ils ne parviennent pas toujours à consommer entièrement. D'où l'odeur pestilentielle, due aux restes, qui se dégage du terrier et permet souvent de le repérer.

Le chercheur René Rosoux, qui suivait une femelle par radiopistage dans le Marais poitevin, a eu la chance que l'animal mette bas pendant l'observation. Cette mère a changé quatre fois de gîte durant le premier mois après la naissance, sur un espace d'environ 300 m, chaque fois transportant ses jeunes.

Lorsque les loutrons ont trois mois, ils commencent à se promener avec leur mère tout autour du gîte. C'est l'époque où ils sont le plus vulnérables, et commencent à apprendre à plonger.

La première plongée n'est pas spontanée, loin s'en faut, même pour un animal aussi aquatique que la loutre, au point que, la plupart du temps, la mère est obligée de pousser du nez les récalcitrants ou, s'ils sont trop farouches, de les mettre à l'eau en les prenant doucement dans sa gueule.

Afin de leur apprendre à pêcher et à chasser, la femelle apporte d'abord à ses petits des grenouilles et des poissons, qu'elle a capturés pour eux et qu'elle dépose sous leur nez après les avoir partiellement neutralisés. Rapidement, ils prennent eux-mêmes goût aux jeux aquatiques et à la chasse, et la petite famille s'aventure de plus en plus loin, couvrant souvent en une nuit plusieurs kilomètres.

La lassitude de la mère

Lorsque les loutrons ont atteint l'âge de huit ou neuf mois, la femelle supporte de moins en moins leur présence et fait même preuve à leur égard d'une certaine agressivité. Il est donc temps pour les jeunes de quitter le territoire maternel et de partir à la recherche d'un nouveau domaine.

Les premières années, ces jeunes, qui ont atteint la taille adulte, se déplacent beaucoup en périphérie des territoires de leurs parents avant de se fixer sur leur propre domaine.

Pour tout savoir sur la loutre

Loutre d'Europe (Lutra lutra)

Un corps long et souple, des pattes courtes et une allure ondulante : la physionomie générale de la loutre rappelle celle des autres membres de la famille des mustélidés, à laquelle elle appartient.

Mais, à la différence de la belette qui se glisse dans le moindre trou, ou de la martre qui saute de branche en branche, c'est en nageant que la loutre exploite le mieux ses capacités physiques. Elle est même le plus aquatique des carnivores sauvages d'Europe.

Tout chez elle témoigne en effet de sa parfaite adaptation à l'eau : son museau fin, sa tête plate et ses petites oreilles dissimulées dans la fourrure lui assurent une excellente pénétration dans l'élément liquide. Son cou épais, bien dans la continuité des épaules, son corps fuselé et sa queue large, pointue et puissante, surtout à la base, les cinq doigts de ses larges pattes reliés par une palmure épaisse lui permettent d'évoluer dans l'eau avec une aussi grande facilité qu'un poisson.

La fourrure, soyeuse et ferme, est enduite d'une graisse protectrice de forte densité, indispensable pour un animal qui doit chasser dans l'eau été comme hiver. Elle est composée de deux sortes de poils : la bourre, fine et courte, qui assure une excellente protection thermique à la fois par son épaisseur et par les bulles d'air qu'elle retient, et les jarres, poils plus longs et bruns, sur lesquels glisse l'eau.

Le pelage est brun sur la tête et sur le dos, gris clair sous le cou, la poitrine et le ventre. Mâles et femelles ont le même aspect et les mêmes couleurs, mais les premiers sont beaucoup plus grands, puisqu'ils mesurent en moyenne 1,20 m de long, queue comprise, pour un poids de 7 à 12 kg, tandis que les femelles mesurent de 1 à 1,10 m et pèsent de 5 à 8 kg.

À terre, bien qu'elle soit mobile et très résistante à la marche et à la course, la loutre avance le dos bombé et la queue légèrement relevée.

Quand elle se glisse dans l'eau, elle est moins bruyante qu'une grenouille, malgré sa taille, et c'est à peine si on entend son plongeon et les remous qu'il provoque. Une fois dans l'eau, l'animal se transforme en une admirable acrobate, dont les prouesses aquatiques sont inégalées chez les mammifères terrestres. Quand elle nage en surface, en s'aidant de ses pattes puissantes, sa tête et son dos dépassent légèrement. De ses pattes palmées, elle bat alors l'eau sous elle. En plongée, la loutre imprime à son corps et à sa queue une série de mouvements ondulatoires rapides, de bas en haut lorsqu'elle avance en ligne droite, ou de gauche à droite, un peu comme une godille, lorsqu'elle veut virer. Les pattes collées contre son corps et le museau pointé vers l'avant accentuent sa forme hydrodynamique et augmentent sa vitesse.

Sous l'eau, les oreilles et les narines se ferment hermétiquement, et le cristallin de l'œil se déforme pour donner à l'animal une vision beaucoup plus nette. Il est facile de suivre son parcours subaquatique en observant les bulles s'échappant de sa fourrure.

La loutre peut rester une minute sous l'eau sans remonter à la surface pour reprendre sa respiration, mais la durée moyenne de ses plongées varie de 20 à 30 secondes.

Les sens de cet animal sont remarquablement performants. Le plus développé est certainement l'odorat. Mais la vue et l'ouïe sont aussi excellentes. Ainsi, la loutre perçoit, même dans une rivière aux eaux courantes, le bruit d'un corps étranger.

Les sous-espèces

Les onze sous-espèces se différencient par leur pelage.

Lutra lutra lutra, la plus répandue, vit en Europe et en Asie du Nord, dans toute la zone paléarctique ; L. l. barang occupe la Thaïlande, le Viêt-nam, la Malaisie, Sumatra et Java. Les autres ne se rencontrent que dans une seule région : L. l. aurobrunnea au Népal ; L. l. chinensis et L.l, hainana en Chine ; L. l. kutab au Cachemire, L. l. monticola en Inde du Nord ; L. l. meridionalis en Iran et dans le sud de l'ex-U.R.S.S. ; L. l. seistanica en Afghanistan et au Pamir ; L. l. nair au Sri Lanka et dans le sud de l'Inde ; L. l. angustifrons, en Afrique du Nord. La sous-espèce (ou espèce) japonaise, L. l. whiteleyi ou Lutra nippon, est probablement éteinte.

          

LOUTRE D'EUROPE

Nom (genre, espèce) :

Lutra lutra

Famille :

Mustélidés

Ordre :

Carnivores

Classe :

Mammifères

Identification :

Corps long et souple, fuselé ; fourrure marron et gris ; pattes palmées ; longue queue

Taille :

De 1 m à 1,37 m, queue comprise

Poids :

De 5 à 12 kg

Répartition :

Europe, Asie, Afrique du Nord, Indonésie

Habitat :

Rivières, lacs, marais, bord de mer

Régime alimentaire :

Poissons, batraciens, mammifères, oiseaux

Structure sociale :

Solitaire ; mère avec ses jeunes pendant 9 mois à 1 an

Maturité sexuelle :

2 à 3 ans

Saison de reproduction :

Toute l'année

Durée de gestation :

62 jours

Nombre de jeunes par portée :

1 ou 2, exceptionnellement 3 ou 4

Longévité :

10 ans à l'état sauvage ; plus de 15 ans en captivité

Effectifs :

Inconnus précisément ; 10 395 individus au Royaume-Uni (2004). Population en régression

Statut :

Espèce protégée : inscrite à l'Annexe I de la Cites (Convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction), à l'Annexe II de la Convention de Berne (Conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe) et aux Annexes II et IV de la directive Habitats de l'Union européenne. Protégée dans plusieurs pays d'Asie comme l'Inde, le Pakistan, le Bangladesh, la Birmanie et la Thaïlande. Classée par l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature) dans la catégorie « quasi menacé » depuis 2004

 

Signes particuliers

Palmure

Les cinq doigts des pieds avant et arrière sont reliés entre eux à leur extrémité par une large palmure, ou membrane natatoire. Cette peau foncée, épaisse et nue, est bien vascularisée. Elle permet de repousser l'eau lors des mouvements de nage.

Empreintes

L'identification des empreintes est capitale pour l'étude de cette espèce. Il faut de très bonnes conditions – de la neige ou une vase fine, par exemple – pour que les traces de l'animal soient visibles au sol. Le pied avant laisse une marque presque circulaire, d'environ 6 cm de diamètre, où se distinguent la voûte plantaire et au-dessus les doigts en éventail. Le pied arrière, quant à lui, est sensiblement plus long et développe une empreinte un peu plus large. Le talon est marqué sous la voûte plantaire. La plupart du temps, la trace des griffes ne se voit absolument pas.

Moustaches ou vibrisses

Blanches et d'une vingtaine de centimètres de long, elles encadrent la gueule de l'animal. Des expériences ont été faites par le chercheur écossais Jim Green, qui a comparé en bassin le taux de réussite des loutres en coupant les moustaches de deux animaux. En eau claire, le taux de réussite est le même avec ou sans moustaches. Mais, en eau trouble, les loutres privées de vibrisses mettent 20 fois plus de temps pour attraper un poisson que dans l'eau claire, alors que la proportion est de quatre fois plus pour celles dotées de moustaches, qui détecteraient les ondes émises par les poissons.

Les autres loutres

La sous-famille des lutrinés comporte13 espèces de loutres réparties, selon l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature),  dans 6 genres : Lutra (3 espèces), Lontra (4 espèces), Lutrogale (1 espèce), Aonyx (3 espèces), Pteronura (1 espèce) et Enhydra (1 espèce). Parfois les différences sont biologiques ; ainsi la loutre du Canada, Lutra canadensis, diffère-t-elle de la loutre d'Europe par le mode de reproduction : elle est sujette à l'ovo-implantation différée qui retarde de 8 mois l'implantation de l'embryon et la gestation réelle. Ce qui amène certains spécialistes à penser que les loutres d'Europe et du Canada descendent d'ancêtres différents. Réunies par continents, les 12 espèces sont, outre la loutre d'Europe :

Loutre du Canada (Lontra canadensis)

Identification : de 1 m à 1,50 m de long dont 31,5 à 40 cm de queue. Poids : de 8 à 12 kg. Fourrure brun sombre sur le dessus. Gorge et ventre plus clairs.

Répartition : lacs, rivières, marais et côtes marines rocheuses ; Alaska et Canada.

Alimentation : poissons, écrevisses et amphibiens.

Effectifs et statut : population stable à la suite de réintroductions aux États-Unis et au Canada. Inscrite à l'Annexe II de la Cites (Convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction).

Loutre de mer (Enhydra lutris)

La plus grosse de toutes les loutres, excepté la loutre géante.

Identification : de 57,5 cm à 1,63 m de long. Poids : de 20 à 45 kg. Pied postérieur très large faisant penser à une nageoire. Fourrure dense : jusqu'à 800 millions de poils pour un adulte.

Répartition : côtes et îles du Pacifique nord, Californie, Alaska, péninsule du Kamchatka et Japon.

Alimentation : poissons, mollusques, crabes, oursins (brisés avec des pierres).

Effectifs et statut : environ 107 000 individus contre 150 000-300 000 autrefois ; espèce très menacée par les pollutions ; classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « en danger » en 2008 ; inscrite à l'Annexe I de la Cites.

Loutre à longue queue (Lontra longicaudis)

Identification : de 90 cm à 1,30 m dont 37,5 à 57 cm de queue. Poids de 9 à 15 kg. Fourrure brun cannelle sur le dos ; ventre et cou crème ou gris argenté.

Répartition : habitats variés, depuis les rivières forestières jusqu'aux marais côtiers ; Amérique centrale et Amérique du Sud.

Alimentation : poissons, crabes.

Statut : espèce mal connue, probablement menacée,  disparue de nombreuses régions ; très chassée pour sa fourrure. Inscrite à l'Annexe I de la Cites. Protégée dans les pays d'Amérique latine.

Loutre du Chili (Lontra provocax)

Identification : de 1 à 1,16 m de long dont 35 à 45 cm de queue. Poids : de 5 à 9 kg. Fourrure très foncée, presque noire, cannelle dans les parties inférieures du corps.

Répartition : espace compris entre 36° de latitude sud et 52° de latitude nord ; Argentine, Chili. Confinée dans les régions les plus inaccessibles. Rivières, lacs et quelques estuaires.

Alimentation : crustacés et bivalves.

Effectifs et statut : en déclin ; espèce totalement protégée (Parcs nationaux Nahuel Huapi et Tierra del Fuego notamment). Classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « en danger » depuis 2004. Inscrite à l'Annexe I de la Cites.

Loutre marine (Lontra felina)

Identification : de 87 à 115 cm de long dont 30 à 36 cm de queue. Poids : de 3 à 6 kg. Fourrure brun foncé sur le dessus, du fauve au gris-brun dessous.

Répartition : rivages rocheux battus par les vents ; zone littorale et îles côtières ; Chili et Pérou. A quasiment disparu d'Argentine (populations isolées autour du détroit de Magellan et dans l'île des États).

Alimentation : crustacés, mollusques ; poissons (30 % de son alimentation).

Comportement : activité diurne.

Effectifs et statut : espèce protégée ; pas plus de 1 000 individus. Classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « en danger » depuis 2004. Inscrite à l'Annexe I de la Cites.

Loutre géante du Brésil (Pteronura brasilensis)

Identification : de 1,50 à 1,80 m de long. Poids : de 22 à 34 kg. La plus grande loutre de cette espèce jamais vue mesurait 2,40 m de long. Fourrure chocolat, sauf cou tacheté.

Répartition : surtout dans les grandes rivières et dans l'Amazonie brésilienne; Bolivie, Brésil, Colombie, Équateur, Guyane française, Paraguay, Pérou, Surinam, Venezuela.

Alimentation : poissons, parfois jeunes caïmans et anacondas.

Comportement : diurne, très sociable.

Effectifs et statut : 1 000-5 000 individus ; espèce très menacée, victime d'un braconnage intensif à cause de sa fourrure, très recherchée, et de la déforestation. Classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « en danger » depuis 2004.

Ses principaux prédateurs sont les caïmans, les anacondas adultes, parfois les jaguars.

Loutre cendrée (Aonyx cinerea)

Identification : petite loutre, de 65,2 à 94 cm dont 24 à 35 cm de queue. Poids : de 3 à 6 kg. Doigts ronds, griffes rudimentaires.

Répartition : petites rivières et canaux d'irrigation des rizières, dans les hautes terres comme sur les côtes ; Inde, Bangladesh, Sud-Est asiatique, Indonésie.

Alimentation : crabes, mollusques, poissons variés.

Effectifs et statut : population en déclin, classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « vulnérable » en 2008 ; inscrite à l'Annexe II de la Cites afin de contrôler le commerce de sa fourrure. Protégée dans la plupart des pays mais victime du braconnage.

Depuis un millénaire, cette loutre fait l'objet d'un élevage et d'un dressage pour la pêche, en échange d'une récompense.

Loutre d'Asie (Lutrogale perspicillata)

Identification : de 1,06 à 1,30 m de long dont 40 à 50 cm de queue. Fourrure gris-brun sur le dessus, plus claire sous le ventre et le cou.

Répartition : estuaires, côtes, marais à mangroves et grandes rivières ; Pakistan, Inde, Asie du Sud-est.

Alimentation : poissons.

Effectifs et statut : tendance de la population inconnue ; menacée surtout par la détérioration de son habitat due à la construction de barrages hydroélectriques, à l'agriculture et à la pollution des eaux ainsi que par le braconnage. Espèce classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « vulnérable » depuis 2004 et inscrite à l'Annexe II de la Cites. .

Loutre de Sumatra (Lutra sumatrana)

Identification : de 1,05 à 1,35 m de long dont 35 à 50 cm de queue. Pelage brun sombre sur le dos, légèrement plus pâle sur le ventre ; tache blanche aux lèvres et au cou ; pattes bien palmées.

Répartition : rivières de montagne et côtes ; Asie du Sud-est (Myanmar, Cambodge, Viêt Nam, partie malaise de l'île de Bornéo),

Effectifs et statut : espèce rare ; population en déclin ; classée par l'U.I.C.N. dans la catégorie « en danger » en 2008 et inscrite à l'Annexe II de la Cites. Protégée dans tous les pays de son aire de répartition. Chasse totalement interdite au Viêt Nam.

Loutre à joues blanches (Aonyx capensis)

Identification : de 1,17 à 1,62 m de long dont 40 à 67 cm de queue. Poids : de 15 à 20 kg. Fourrure brune ; museau, joues et cou blancs.

Répartition : lacs et rivières ; tous les pays d'Afrique au sud du Sahara.

Alimentation : crabes, batraciens et poissons, en ordre décroissant.

Effectifs et statut : population stable (21 500 individus en Afrique du Sud) ; espèce protégée presque partout.

Loutre à cou tacheté (Lutra maculicollis)

Identification : de 95 cm à 1,20 m de long dont 35 à 44,5 cm de queue. Poids : de 3 à 9 kg. Fourrure noire, avec des taches blanches irrégulières sur le cou.

Répartition : comme Aonyx capensis.

Alimentation : poissons.

Effectifs et statut : population en déclin ; espèce protégée dans presque tous les parcs nationaux.

Loutre à joues blanches du Congo (Aonyx congicus)

Considérée comme une sous-espèce d'Aonyx capensis par certains, mais classée comme espèce par l'U.I.C.N.

Répartition : forêts pluvieuses du bassin du Congo ; Guinée équatoriale, Gabon, Congo, République démocratique du Congo, sud du Cameroun jusqu'au Rwanda, au Burundi et en Ouganda.

Effectifs et statut : tendance de la population inconnue.

Milieu naturel et écologie

On peut distinguer quatre grands types de milieux occupés par la loutre : les rivières et les fleuves, les lacs et les étangs, les canaux et les marais, les estuaires et les côtes marines. Il y a, bien entendu, de multiples interférences entre ces différents biotopes : un mâle adulte peut, par exemple, englober dans son domaine vital une rivière qui en constitue l'axe principal sur quelques dizaines de kilomètres, mais également des étangs et des ruisseaux affluents. En Irlande ou en Écosse notamment, des loutres vont chasser les poissons et les crabes au bord de la mer, alors que leur catiche de reproduction se trouve à quelques kilomètres à l'intérieur des terres.

En France, dans le Massif central, les loutres, qui passent tout l'été sur les hauteurs près des lacs situés à plus de 1 300 m d'altitude, redescendent dans les vallées en hiver, quand les plans d'eau sont pris par la glace.

Une préférence pour le bord de mer

La quantité des ressources alimentaires et des abris disponibles explique que les bords de mer soient un milieu privilégié pour la loutre. Sur les côtes écossaises, par exemple, les chercheurs ont enregistré la présence d'une femelle reproductrice tous les 2 ou 3 km. Viennent ensuite les grands marais et les fleuves, qui hébergent également de grandes populations. Malheureusement, ces types de milieux sont aussi les plus pollués et les plus dévastés. C'est pourquoi la répartition de la loutre aujourd'hui en Europe reflète moins son habitat naturel que le degré de salubrité de son environnement.

Une espèce en forte régression

De ce point de vue, on peut distinguer en Europe trois types de pays : ceux où la loutre se maintient (Irlande, Écosse, Portugal, Albanie, Grèce, ex-Yougoslavie, Finlande) ; ceux où sa répartition est de plus en plus clairsemée (Norvège, Suède, Angleterre, Allemagne, Espagne, Pologne, France) ; enfin, le grand axe au centre de l'Europe, d'où l'animal a presque totalement disparu (Hollande, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse, Autriche et Italie). Des programmes de réintroduction ont été effectués avec succès au Royaume-Uni, en Suède et aux Pays-Bas.

Repeuplement dans le mMassif central

Il existe cependant en France une enclave de recolonisation dans le Massif central – le Limousin et l'Auvergne notamment –, où la loutre avait été éliminée par piégeage intensif, mais où un mouvement de repeuplement a été amorcé depuis que la chasse sous toutes ses formes est interdite. Aujourd'hui, ce mammifère peut reconquérir une région où l'urbanisme sauvage et la pollution industrielle n'ont pas encore détruit les milieux aquatiques.

Répartition en Asie

La loutre d'Europe est également appelée « loutre d'Eurasie », car son aire de répartition est encore plus vaste en Asie qu'en Europe. La distribution de Lutra lutra va, en effet, de l'Irlande, à l'ouest, jusqu'au Japon, en Extrême-Orient, et elle est présente sur quatre continents : en Afrique du Nord, au Moyen-Orient, mais aussi dans les anciennes républiques soviétiques, en Asie et en Indonésie. En Russie, il semble que la population soit distribuée dans l'ensemble du pays, à l'exception de la toundra et des régions les plus septentrionales. En Asie, sa présence est attestée en Corée du Sud, en Chine du Sud, au Viêt Nam, au Cambodge, au Laos, en Birmanie, en Inde et au Bangladesh. L'espèce est probablement éteinte au Japon.   

Les experts se posent aussi la question du chevauchement entre les aires de distribution des différentes espèces de loutres.

En Afrique, Lutra lutra n'est présente que dans les trois pays du Maghreb – Maroc, Algérie et Tunisie –, tandis que la répartition de la loutre à joues blanches et de la loutre au cou tacheté ne commence qu'au sud du Sahara.

En Europe et dans le nord de l'ex-U.R.S.S., Lutra lutra ne partage ses territoires avec aucune autre loutre. Les zones de chevauchement les plus importantes se trouvent en Inde, en Asie du Sud-Est et en Indonésie, où cohabitent, ici ou là, jusqu'à quatre espèces : Lutra lutra, Aonyx cinerea (loutre cendrée), Lutrogale perspicillata (loutre d'Asie) et Lutra sumatrana (loutre de Sumatra).

Protecteur de l'équilibre écologique

Lutra lutra est considérée comme un super-prédateur dans la chaîne alimentaire, puisqu'elle n'a pas d'autres prédateurs que l'homme. En revanche, elle est elle-même un prédateur redoutable pour toute la faune des milieux aquatiques. Pourtant, en s'attaquant de préférence aux poissons les plus faibles et aux espèces les plus nombreuses, elle protège tout un écosystème, freinant le développement des épidémies ou l'expansion d'une catégorie de poissons aux dépens des autres. La loutre en fait ses principales proies. Elle débarrasse en outre les étangs des rats musqués, ces rongeurs envahissants qui minent les digues en y creusant des galeries.

Au sommet de la chaîne alimentaire, la loutre d'Europe est, comme de nombreux super-prédateurs, menacée indirectement par la pollution de son environnement. Ce lent empoisonnement se fait chaque fois qu'elle absorbe une proie, qui condense déjà dans ses tissus des éléments nocifs provenant de sa propre nourriture. Cela explique pourquoi la présence de loutres dans une région est considérée par les scientifiques et les spécialistes de l'environnement comme une preuve de « bonne santé » du milieu.

La loutre et l'homme

Décimée par les uns, apprivoisée par les autres

Depuis la préhistoire, la loutre a eu avec l'homme une cohabitation facile, se faisant même, comme en Asie, l'auxiliaire du pêcheur au lieu d'en devenir l'ennemie. Plus récemment, chasse, piégeage et destruction du milieu naturel ont été à l'origine du déclin de l'espèce. Aujourd'hui, elle fait l'objet d'études très suivies, car elle est un bon indicateur de la qualité des eaux.

Longtemps la cible du pêcheur et du chasseur

Jusque dans les années 1960, le piégeage de la loutre était encore régulièrement pratiqué sur nombre de rivières et de plans d'eau. Dévoreuse de poissons, Lutra lutra apparaissait comme l'ennemi numéro un du pisciculteur, et les sociétés de pêche organisaient contre elle une lutte acharnée.

En France, au début du xxe siècle, s'est constituée une société, la Loutrerie française, qui se proposait d'éliminer l'espèce du territoire en partant de principes analogues à ceux appliqués pour les loups. Des récompenses étaient remises pour les belles prises et pour le maximum de captures effectuées. Une prime substantielle était versée en sus pour la fourrure : une peau de loutre pouvait valoir de deux à quatre fois le salaire mensuel d'un ouvrier.

À la suite de ces campagnes de destruction, chaque année, de 3 000 à 4 000 loutres étaient tuées. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, tous les pays européens, l'Allemagne et l'Italie notamment, pratiquaient alors le piégeage et, occasionnellement, la chasse. Aujourd'hui, la loutre est partout protégée en Europe.

Facile à apprivoiser

Les très jeunes animaux, notamment les mammifères, provoquent toujours un sentiment de sympathie. Espèce strictement protégée, la loutre ne peut plus être détenue en captivité en Europe aujourd'hui, si ce n'est par des organismes agréés, mais de nombreux témoignages anciens rapportent des histoires d'amitiés entre la loutre et l'homme. Le plus souvent, il s'agissait de très jeunes loutres abandonnées par la femelle ou devenues orphelines, leur mère ayant été capturée au cours d'une chasse.

Lorsque les loutrons recueillis ne sont pas encore sevrés, ils s'attachent pour la vie à l'homme qui les soigne et les élève et se substitue ainsi à leur mère, en vertu du phénomène d'imprégnation.

Tous ceux qui ont apprivoisé des jeunes loutres assurent que ce sont des animaux très joueurs et espiègles susceptibles d'attachement et de fidélité, suivant leur maître dans ses promenades sans chercher à s'échapper et attrapant à l'occasion des poissons pour lui.

En Asie, les hommes capturent des petites loutres qu'ils élèvent et dressent à pêcher.

La pollution des rivières

La pollution des eaux, le recalibrage des rivières, le bétonnage des berges, la construction de barrages, l'assèchement des marais, l'aménagement touristique des lacs et des bords de mer ont considérablement modifié la nature et le fonctionnement des zones humides, privant la loutre de la liberté de circulation qui lui est nécessaire.

Les diverses formes de pollution ont des conséquences directes et indirectes sur la vie des loutres, soit en les empoisonnant, soit en réduisant la faune piscicole dont elles se nourrissent en grande partie. Les détergents déversés dans les rivières détruisent les graisses protectrices contenues dans la fourrure des loutres, qui ne peuvent plus alors résister au froid. Les micropolluants, tels que les métaux lourds ou les polychlorobiphényles (P.C.B.), s'accumulent dans les plantes aquatiques, puis dans les tissus des poissons et finalement dans l'organisme des loutres. Celles-ci, après les avoir consommés, deviennent stériles ou meurent. Des recherches scientifiques menées en Scandinavie ont montré que les P.C.B., à base de chlore, libérés par la combustion dans les décharges, montent dans l'atmosphère. Les pluies les font ensuite retomber sur d'autres régions où les eaux de ruissellement les entraînent vers les rivières et les lacs, y provoquant une plus forte concentration. Dans certains pays comme la Suisse, cette pollution des eaux de rivière était telle que l'idée d'une éventuelle réintroduction de l'espèce, disparue dans les années 1970, a été abandonnée.