Jotirao Phule

Homme politique et poète indien (Bhamburda, district de Pune, Maharashtra, 1827 ou 1828-Pune 1890).

La famille de Jotirao Phule dut fuir son village d'origine, son grand-père ayant assassiné un brahmane qui le persécutait. En 1840, alors qu'il avait environ treize ans, Phule fut marié à une jeune fille encore plus jeune que lui ; il reçut une éducation anglaise. Il considérait que la société indienne était divisée en deux : d'un côté les « brahmanes », de l'autre les « sudratisudra ». Ceux qu'il appelait les « brahmanes » correspondaient aux trois premières castes (varna) de la société hindoue – c'est-à-dire non seulement les brahmanes au sens strict, mais également les kshatriya et les vaiçya. Les sudratisudra regroupaient les sudra (le dernier des varna) et les hors-castes (dalit). Cette division en deux n'est pas sans rappeler la division marxiste entre bourgeois et prolétaires, et Phule identifie brahmanes et oppresseurs, sudratisudra et opprimés ; il jugeait que le rôle des colonisateurs britanniques pouvait être positif, et pourrait aider les sudratisudra à se débarrasser des brahmanes. Il considérait que les textes hindous qui régissent l'ordre social, textes qui se trouvent dans les Védas, ne sont en réalité qu'une tentative des brahmanes pour perpétuer un ordre (dharma) qui les favorise – il préférait parler de société « brahmanique » plutôt que d'hindouisme.

Certains brahmanes considéraient qu'à l'ère actuelle, Kaliyuga, la dernière et la plus terrible des quatre époques de la mythologie hindoue, la société avait tendance à se polariser, mais Phule ne reprenait cette idée que pour affirmer que les sudratisudra représentaient le pôle positif. Il niait les descentes (avatars) des dieux parmi les hommes, ainsi que la notion de karma, selon laquelle le statut des êtres humains dépend des actes qu'ils ont accomplis dans leurs vies antérieures.

Une autre innovation de Phule fut d'introduire l'idée d'une oppression par sexe, et il considérait que la femme était d'abord une opprimée, quelle que soit sa caste – les lois de Manu considèrent les femmes comme des serviteurs, chacune à l'intérieur de sa propre caste. En 1848, il mit en pratique sa théorie en ouvrant une école pour filles sudratisudra, puis, en 1851, il en créa une autre, cette fois pour les jeunes filles de toutes castes. En 1855, il ouvrit une école du soir pour les travailleurs, et en 1863 un établissement pour mères d'enfants illégitimes.

En 1873, il fonda le Satyashodhak Samaj (« Société des personnes en quête de vérité »), œuvre réformatrice qui reprenait ses théories. En 1888, il reçut le titre de Mahatma (grande âme) au cours d'une réunion publique solennelle à Pune. Il mourut le 28 novembre 1890.

Il composa, en marathi, de nombreuses poésies regroupées dans plusieurs recueils (Shivaji Powada [« la ballade de Shivaji »], 1869) et publia des œuvres politiques (Gulamgiri [« esclavage »], 1873 ; Shetkaryacha Asud (« le fouet du cultivateur »), 1883 ; Sarvajanik Satya Dharma Pustak, « le livre de la véritable foi », 1889).