William Molyneux

Physicien et philosophe irlandais (Dublin 1656-Dublin 1698).

Représentant de l'université au Parlement de Dublin (1692-1695), il se rendit célèbre en publiant en 1698 un pamphlet, The Case of Ireland being bound by acts of Parliament to England Stated. Évoquant les affaires les plus inquiétantes qui, selon lui, portaient atteinte à l'autonomie de l'Irlande, Molyneux, y arguait que, après la soumission volontaire des rois, de la noblesse et du clergé irlandais à Henri II, les droits et libertés anglaises avaient été étendus à l'Irlande, et il contestait donc au Parlement d'Angleterre le droit de légiférer pour l'Irlande au motif que l'Irlande était un royaume séparé, qu'elle possédait son propre Parlement et n'était pas représentée au Parlement d'Angleterre. Cet ouvrage, considéré aujourd'hui comme la première revendication de l'indépendance irlandaise, fit sensation et fut brûlé en place publique par les autorités.

Molyneux s'intéressa à la philosophie - il traduisit en anglais les Méditations de Descartes, à l'astronomie - son ami Flamsteed lui avait fait parvenir un télescope au moyen duquel il se livra à de nombreuses observations, et il communiqua à la Royal Society, dont il était membre (1685), plusieurs communications sur des sujets divers : cadrans solaires, gyroscope… - et à l'histoire naturelle ; mais ce furent surtout les questions d'optique qui retinrent son attention (Dioptrica nova, 1692).

Le problème de Molyneux

Dans une lettre de 1688 à son ami et correspondant John Locke, que ce dernier reproduisit en 1690 dans son Essai sur l'entendement humain, William Molyneux souleva la question suivante :
« Supposez un aveugle de naissance, qui soit présentement homme fait, auquel on ait appris à distinguer par le seul attouchement un cube d'un globe, du même métal et à peu près de la même grosseur, en sorte que lorsqu'il touche l'un et l'autre il puisse dire quel est le cube et quel est le globe ; supposez que le cube et le globe étant posés sur une table, cet aveugle vienne à jouir de la vue. On demande si en les voyant sans les toucher, il pourra les discerner, et dire quel est le globe et quel est le cube. » (II, ix, 8).

Le problème de Molyneux fascina le siècle des Lumières et les plus grands esprits du temps - notamment Locke, Berkeley, Hume, La Mettrie, Condillac, Diderot, ou encore Voltaire - s'y intéressèrent de fort près, affûtèrent des arguments pour ou contre une réponse positive à la question posée, proposèrent des variantes de celle-ci et en dégagèrent les présupposés. Diderot, en particulier, se signala par l'originalité de ses conceptions et l'acuité de ses analyses : reprenant dans sa Lettre sur les aveugles à l'usage de ceux qui voient (1749) la comparaison introduite par Descartes dans la Dioptrique entre ce qui a trait à la lumière et ce qui a trait au bâton de l'aveugle, il replaça son analyse des qualités sensibles à l'articulation de la géométrie et de la métaphysique.