James Ramsay MacDonald
Homme politique britannique (Lossiemouth, Grampian, 1866-en mer 1937).
Fils illégitime d’une fille de ferme écossaise, MacDonald connaît une enfance pauvre et dure. Remarqué par l’instituteur du village, il devient élève-maître, puis s’en va chercher fortune en Angleterre, à Londres notamment, où il exerce divers métiers en menant une existence difficile. Sa volonté de parvenir l’emporte : secrétaire d’un politicien libéral, il écrit dans plusieurs journaux et entre en contact avec les milieux fabiens. En 1894-1896 se produisent deux événements qui marquent un tournant décisif pour son avenir : sa conversion au socialisme (il adhère à l’Independent Labour Party) et son mariage avec la fille du riche et célèbre physicien John Hall Gladstone (ce qui lui ouvre les portes de la bourgeoisie).
En 1900, lorsqu’est créé le Labour Representation Commitee, MacDonald en est élu secrétaire, car il commence à être connu pour ses talents de propagandiste et son sens tactique du compromis. Adroitement, il conclut un pacte électoral avec le parti libéral, ce qui permet de faire élire en 1906 vingt-neuf députés du nouveau Labour Party (lui-même devient député de Leicester). Au milieu de militants honnêtes et dévoués, mais ternes et peu doués pour la parole, il s’impose de plus en plus par la diversité de ses qualités : une allure distinguée, une belle voix sonore et profonde, du discernement et de l’acuité dans le jugement, de la capacité pour s’exprimer d’une manière aussi habile que généreuse (que ce soit par l’écrit ou par la parole). Mais surtout, chez cet homme ambitieux et conscient de sa valeur, de surcroît travailleur acharné, le réalisme politique est la marque dominante. Pour MacDonald, avant de réaliser la Jérusalem socialiste, il faut d’abord assurer les progrès quotidiens du mouvement, utiliser toutes les ressources de la procédure parlementaire, savoir rédiger des motions de conciliation sans pour autant décourager les enthousiasmes, introduire les compromis opportuns qui triomphent des obstacles et rallient les opposants.
Son socialisme, tel qu’il l’expose dans plusieurs ouvrages théoriques, est fortement teinté par l’évolutionnisme darwinien : la société se développe à l’image d’un organisme vivant ; le socialisme correspond donc au progrès de l’espèce. Il s’imposera de lui-même par une sorte de processus biologique : « Solvitur ambulando », aime-t-il à dire, ou encore : « Le laboratoire, non la révolution. » C’est donc un tenant d’une socialisation graduelle. Son idéal le porte vers un socialisme de type démocratique et fort modéré : d’où une large audience en Angleterre. En dépit de l’opposition violente des socialistes avancés et des syndicalistes révolutionnaires, Ramsay MacDonald fait prévaloir cette conception dans les rangs du Labour, dont il est le président de 1911 à 1914.
L’entrée en guerre de l’Angleterre en 1914 introduit une cassure dans sa carrière. Tout de suite, MacDonald prend position contre la guerre : non pas qu’il soit, comme on l’a dit par erreur, un pacifiste, mais plutôt par horreur du militarisme et des massacres. Ce qu’il réclame, c’est l’ouverture de négociations pour une paix de compromis sous le contrôle du Parlement (il est l’un des fondateurs de l’Union pour le contrôle démocratique) afin de mettre sur pied un nouvel ordre international qui supprimerait à la racine tout danger de guerre. Une telle attitude, jugée antipatriotique, lui vaut de furieuses attaques pendant toute la guerre et même bien au-delà. Mais c’est bien à tort que ses ennemis le présentent comme germanophile, extrémiste et révolutionnaire. Néanmoins, MacDonald se trouve poussé vers la gauche ouvrière et socialiste, dont l’appui va lui permettre d’être porté de nouveau à la tête du Labour Party en 1922.
Lorsque les élections de décembre 1923 donnent 191 sièges aux travaillistes, il est appelé à former le gouvernement, avec le soutien des 158 libéraux. Ce premier ministère travailliste, qui ne dure que quelques mois (22 janv. - 4 nov. 1924), se heurte à l’intérieur à de graves difficultés économiques et sociales sans parvenir à la moindre solution ; à l’extérieur, l’action de MacDonald (qui cumule les fonctions de ministre des Affaires étrangères avec la charge de Premier ministre) s’exerce en faveur de la détente, de la coopération internationale et de la S. D. N., en liaison avec E. Herriot et le gouvernement du cartel des gauches en France (accord sur les réparations allemandes).
Les élections d’octobre 1924 ramènent au pouvoir les conservateurs, et MacDonald se retrouve leader de l’opposition. Mais, pour le Labour Party, la preuve a été faite que le parti ne craignait pas d’assumer les responsabilités du pouvoir. Une nouvelle expérience travailliste commence en 1929, quand, lors du renouvellement de la Chambre, le groupe travailliste devient le premier en nombre aux Communes. Mais, cette fois-ci encore, le gouvernement de MacDonald doit faire appel à l’appui des libéraux pour disposer d’une majorité, ce qui est une source constante d’affaiblissement. Surtout la crise mondiale de 1929, en aggravant subitement le problème déjà redoutable du chômage, amène les travaillistes à se diviser en deux camps : d’un côté ceux qui, avec Philip Snowden, le chancelier de l’Échiquier, appuyé par MacDonald, peu au fait des problèmes économiques et méfiant des experts, songent à des solutions plus orthodoxes que socialistes ; de l’autre côté ceux qui voient dans le chômage le mal social par excellence sécrété par le capitalisme et donc se refusant à toute réduction des allocations versées aux chômeurs. La crise atteint son point culminant en août 1931. Un effondrement complet menace l’économie britannique. Le gouvernement fait appel sans succès aux banques et à l’Amérique. Devant cette situation catastrophique, le 24 août, MacDonald remet au roi la démission du gouvernement travailliste, mais, à la stupéfaction de ses amis, il entreprend aussitôt de former un nouveau gouvernement de coalition avec les conservateurs et les libéraux. Les travaillistes, dont seule une petite minorité, avec P. Snowden et J. H. Thomas, suit MacDonald, crient à la trahison. Le parti est ébranlé jusqu’à la base ; c’est la scission entre « travaillistes » et « travaillistes nationaux ». Néanmoins, grâce à ses alliés conservateurs, MacDonald obtient le soutien massif du pays aux élections de 1931. Il reste Premier ministre jusqu’à juin 1935, continue sur le plan international de négocier en vue du désarmement, prône la conciliation à la S. D. N. et l’« apaisement » face à l’Allemagne, mais son influence ne cesse de décliner.