Georg Wilhelm Steller
Naturaliste allemand (Windsheim, Franconie, 1709-Tioumen, Sibérie, 1746).
Après avoir suivi des cours de théologie luthérienne à Wittenberg, Georg Steller s'inscrit en 1731 à la faculté de médecine de Halle, mais il s'intéresse surtout à l'histoire naturelle. En 1734, on le retrouve à Dantzig (aujourd'hui Gdańsk), où il se fait accepter comme médecin par l'armée russe qui occupe alors la Pologne. Il ne reste pourtant pas dans ce pays et gagne Saint-Pétersbourg, où il devient l'assistant d'un botaniste membre de l'Académie des sciences. Au printemps de 1738, il est nommé adjoint de cette même académie, mais il n'occupera pas son poste car il se trouve à Ienisseïsk, en Sibérie. Il a demandé, en effet, à faire partie de la nouvelle expédition dirigée par Vitus Béring, l'explorateur danois au service de la Russie qui a découvert, une dizaine d'années plus tôt, le détroit qui porte son nom, démontrant ainsi que les continents asiatique et américain ne sont pas liés l'un à l'autre.
L'expédition de Béring à laquelle Steller participe est chargée notamment de reconnaître la côte américaine du Pacifique Nord. En 1740, Steller est à Okhotsk. Il se dirige ensuite vers le Kamtchatka avec Béring. En juin 1741, il embarque, avec l'explorateur danois et une partie des membres de l'expédition, à bord du vaisseau le Saint-Pierre, pour procéder à des relevés cartographiques de la côte sibérienne et de la côte américaine qui lui fait face. Le bateau arrive le 15 juillet en vue d'une contrée sauvage et montagneuse, avec des sommets couverts de neige (il s'agit de la région du mont Saint-Hélie, l'une des plus élevées de l'Amérique du Nord). Il mouille au large d'une petite île. Pendant que l'équipage se réapprovisionne en eau douce, Steller se rend à terre. Il y trouve quelques traces humaines et fait une ample moisson de spécimens d'animaux et surtout de plantes, qu'il dessine aussitôt. À son grand désespoir, il a été autorisé à séjourner à terre seulement une dizaine d'heures. Il écrira, amer, dans son journal de voyage, que l'on a fait le voyage uniquement pour rapporter de l'eau d'Amérique en Asie.
En fait, la situation n'est pas favorable. La saison s'avance et le scorbut commence à sévir parmi les passagers du Saint-Pierre. Béring lui-même est atteint. Deux mois durant, le navire longe les îles Aléoutiennes en essuyant de sévères tempêtes. Les réserves de vivres diminuent, le nombre des malades augmente. Le 4 novembre, l'expédition arrive en vue d'une côte qui est d'abord prise pour celle du Kamtchatka, mais il s'agit d'une île inhabitée à laquelle sera donné le nom de Béring. Le bateau étant endommagé et l'équipage très affaibli par le scorbut, il est décidé d'y passer l'hiver. Georg Steller, qui résiste mieux que d'autres à la maladie grâce à un tempérament robuste et à une inlassable activité, rend les plus grands services, par ses connaissances zoologiques et médicales, aux membres de l'expédition. Ceux-ci se nourrissent, pour survivre, de la chair des renards qu'ils chassent et de celle des animaux marins, notamment d'un sirénien inconnu jusque-là que l'on appellera la « rhytine de Steller » mais qui disparaîtra au xixe s. (la dernière capture de cet animal interviendra en 1863).
Vitus Béring et une trentaine de ses compagnons succombent au scorbut pendant ce terrible hiver 1741. Les survivants de l'expédition construisent un nouveau bateau avec les débris du Saint-Pierre. Ainsi, ils peuvent finalement quitter l'île au début d'août 1742. Le 27 août, ils rejoignent leur point de départ, le port de Petropavlovsk, sur la côte sud-est du Kamtchatka. Georg Steller choisit de rester momentanément dans cette presqu'île au climat très rude pour étudier les mœurs des autochtones et poursuivre ses travaux sur la faune et la flore de Sibérie. En 1746, il se décide à regagner la Russie. Il est arrêté en route sur l'ordre du tsar pour insubordination. Relâché peu après, il meurt des fièvres. Pionnier de l'étude de l'histoire naturelle et de la géographie de l'Alaska et de la Sibérie, il a laissé des manuscrits qui furent publiés après sa mort.