Firdousi ou Ferdousi
Poète persan (Schabad, près de Tus, vers 932-Schabad, près de Tus, 1020).
Depuis un millénaire, Firdousi jouit en Iran d'une gloire sans égale, qu'il doit au caractère national de son œuvre autant qu'à la magie de son verbe. Aboul Kasim Mansour, celui qui allait devenir l'« Incomparable » (Firdousi), appartenait à un milieu où demeurait vivace le souvenir des traditions zoroastriennes et des événements antérieurs à la conquête de la Perse par les armées de l'Islam.
Très cultivé, connaissant l'arabe et le pehlvi, il mit en vers quelques vieilles chroniques puis commença, à trente-six ans, son poème épique le Livre des Rois (Chah-Nameh) pour célébrer le passé glorieux de sa race, dont le chiisme, à ses yeux de musulman convaincu, préservait la personnalité. Ayant perdu son protecteur, qui périt assassiné, il se rendit auprès du sultan Mahmoud, lequel lui promit autant de pièces d'or que son œuvre, une fois achevée, compterait de vers. Quand vint l'échéance, au bout de douze années, le sultan ne lui octroya que l'équivalent en pièces d'argent, que Firdousi s'empressa de distribuer autour de lui.
Ce geste excita la colère du sultan ; le poète dut prendre la fuite. Après avoir erré de bourg en bourg, il se fixa à Bagdad, où il écrivit sa seconde grande œuvre, Yoûsouf et Zoulaykha, poème de 20 000 distiques où, sur un thème emprunté au Coran, il raconte l'histoire de Joseph et de la femme de Putiphar. À un âge avancé, Firdousi revint au pays natal avec l'espoir (ou l'assurance) d'avoir obtenu le pardon du sultan.
Par ses dimensions, la richesse des épisodes, la pureté de la langue, le Livre des Rois est l'une des œuvres les plus considérables de la littérature mondiale. C'est une gigantesque épopée qui s'inscrit dans la lignée de l'Iliade ou de l'Énéide. L'auteur y rassemble des traditions, légendes et faits mémorables de l'Empire perse, depuis la plus haute Antiquité jusqu'à sa destruction par les musulmans sunnites : histoire de Gayômart, le premier homme, de Rustam, le grand héros, « à la fois l'Héraclès et le Roland de la Perse », que protège l'oiseau fabuleux Simurgh et qui périt, avec son fidèle cheval Raksh, par la trahison de son demi-frère, le roi de Kaboul ; histoire d'Alexandre le Grand (Iskandar), des principaux princes sassanides.
L'auteur, s'il ne fait guère de place à l'imagination, y mêle de nombreuses considérations philosophiques et morales. Cette œuvre de 60 000 distiques harmonieux, d'une constante noblesse de ton, comporte de grandes beautés et ne manque qu'en apparence d'une unité qui repose entièrement sur l'exaltation de l'âme iranienne à travers des siècles de vicissitudes et de splendeurs.