éclectisme

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

La démarche éclectique n'était nullement entachée, autrefois, de la note péjorative qu'amateurs et historiens lui confèrent le plus souvent de nos jours. Les jeunes artistes étaient encouragés dans une telle attitude par les conseils qu'ils recevaient de leurs professeurs : copier les anciens, suivre inlassablement la voie des maîtres. Ainsi, le critique italien Lomazzo écrivait à la fin du xvie s. que la perfection en peinture serait atteinte par un tableau sur le thème d'Adam et Ève dont l'Adam serait dessiné par Michel-Ange et colorié par Titien, l'Ève dessinée par Raphaël et coloriée par Corrège. Cette démarche, si tentante qu'elle fût, ne pouvait qu'aboutir à une impasse puisqu'elle était coupée d'un phénomène inhérent à toute œuvre d'art : la création. Aussi bien est-ce à tort que le théoricien néo-classique Winckelmann a taxé l'art des Carrache d'éclectisme.

L'éclectisme a été pratiqué de tout temps, mais spécialement au cours du xixe s., en Europe. À partir des années 1830-1850 et jusqu'aux premières décennies du xxe s., alors que des conventions figées remplacent dans l'art officiel l'idéal vivant des périodes classiques et baroques, l'éclectisme prend une grande place en peinture et en sculpture, adaptant les préceptes de l'académisme à un certain goût du jour : métier scrupuleux, fini léché, fidélité au modèle, thèmes en honneur dans la bourgeoisie dominante. Le dessin d'après l'antique, l'étude du modèle vivant, les références à la Renaissance, aux xviie et xviiie s., ainsi que les " recettes " des maîtres professant dans les écoles des beaux-arts et les académies constituent la base du métier, tandis que les sujets, dans les tableaux de genre comme dans la peinture d'histoire, voire dans les allégories ou la peinture religieuse, sont essentiellement anecdotiques. C'est un naturalisme sans audace (mais parfois excessif) et sans beaucoup de vie (mais conforme aux valeurs considérées comme sûres) qui triomphe, notamment en France, en peinture (Delaroche, Couture, Meissonier, Cabanel, Gérôme, Bouguereau, Baudry, etc.) comme en sculpture (Frémiet, P. Dubois, Falguière, etc.).