sir Thomas Lawrence
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre britannique (Bristol 1769 – Londres 1830).
Ce fils d'un aubergiste malchanceux en affaires manifesta des dons précoces, que l'on exploita très tôt. En 1782, sa famille s'installa à Bath, où ses portraits au pastel furent vite prisés par la société élégante de Londres. Il partit pour cette ville en 1787, où, à l'exception de quelques mois passés comme élève à la Royal Academy, il continua d'obtenir des commandes, pratiquant surtout la peinture à l'huile. En 1789, il présenta le portrait de Lady Cremorne (1789, coll. part.) à la Royal Academy, ce qui lui valut la commande du portrait de la Reine Charlotte (1789, Londres, N. G.), exposé l'année suivante.
En dépit d'une réputation déjà solide de peintre mondain, ce fut le portrait de Miss Farren (1790, Metropolitan Museum), présenté la même année, qui captiva le public : l'exécution nerveuse, la vivacité de l'attitude du modèle annonçaient l'orientation nouvelle que l'artiste allait donner à la conception du portrait établie par Reynolds. Au cours des années 90, la réputation de Lawrence dans les salons à la mode comme dans les milieux artistiques ne fit que croître. Il fut nommé A. R. A. en 1791, peintre ordinaire du roi en 1792, à la mort de Reynolds, et R. A. en 1794, à l'âge minimal requis. C'est pourtant au cours de cette période qu'apparaissent les limites de son art. Tout en continuant à produire des portraits de la plus haute qualité, comme ceux de John Angerstein avec sa femme (1792, Louvre), d'Arthur Atherley (1792, Los Angeles, County Museum of Art), Lawrence était obsédé par le désir de peindre dans le " grand style " préconisé par Reynolds (Satan rassemblant ses légions, 1797, Royal Academy, œuvre très proche de Füssli). Il exécutait parallèlement les portraits de théâtre de Kemble, où il apparaît que le manque de formation traditionnelle nuit à la profondeur de l'expression. Ces préoccupations et les ennuis financiers dus à un mode de vie supérieur à ses moyens portèrent alors préjudice à la qualité de ses portraits et le firent souvent tomber dans une excessive facilité technique.
Après 1800, son style, cependant, acquiert plus de sobriété. L'abandon de la peinture d'histoire lui permit de concentrer ses efforts sur le portrait, comme en témoignent Francis Baring (1807, coll. part.) et les Enfants de John Angerstein (1808, Louvre). La mort de son rival Hoppner, survenue en 1810, le confirma comme chef de file du portrait anglais et lui attira les faveurs du prince régent, qu'il peignit à plusieurs reprises. Ce dernier le fit chevalier en 1815, distinction qui devait faciliter le séjour de l'artiste sur le continent afin d'y exécuter les portraits des dirigeants responsables de la chute de Napoléon. Ce projet fut réalisé en 1818, quand Lawrence se rendit à Aix-la-Chapelle, à Vienne et à Rome (Portrait de Pie VII, 1819, Windsor Castle, comme l'ensemble de la série). Il revint en Angleterre en 1820 et fut élu président de la Royal Academy à la mort de Benjamin West. Son charme personnel lui avait donné accès à toutes les cours et son style brillant l'avait consacré premier portraitiste d'Europe. Dans ses œuvres tardives, on décèle quelques tendances à la sentimentalité (Master Lambton, 1825, coll. part.), mais il réussit à sauvegarder l'aspect le plus original de son art, par exemple dans le portrait de Lady Blessington (1822, Londres, Wallace Coll.), où forme et facture unissent avec bonheur charme et sophistication, ou encore dans celui de John Nash (1827, Oxford, Jesus College), empreint d'une familiarité sincère.
Il figura avec succès au Salon de 1824 à Paris parmi d'autres artistes anglais, fut décoré de la Légion d'honneur et fit suffisamment impression sur Delacroix pour que celui-ci exécute un portrait dans son style (le Baron Schwiter, 1826, Londres, N. G.). Il fut d'ailleurs reçu aux Tuileries en 1825 pour exécuter le portrait de Charles X (Windsor Castle). Il fit aussi les portraits d'autres personnalités françaises de la Restauration (la Duchesse de Berry, le Duc de Richelieu [musée de Besançon]). Il s'intéressa vivement à l'œuvre d'autres artistes et demeura toujours accessible, même aux plus jeunes et aux moins connus de ses contemporains. Sa carrière fut particulièrement brillante, mais l'œuvre, en dépit de sa séduction, n'atteignit jamais au niveau qu'elle avait laissé entrevoir. Suivant le mot de Haydon : " Lawrence était fait pour son époque et son époque pour lui... " En effet, si ses portraits mondains baignent dans une aura romantique, celle-ci flatte le modèle, mais ajoute rarement à la pénétration de sa psychologie.
Passionné de dessins, Lawrence réussit une des plus belles collections de son temps, sans égale sans doute depuis celle de Crozat.