Pavel Nikolaevitch Philonov ou Pavel Nikolaevitch Filonov
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre russe (Moscou 1883 – Leningrad 1941).
L'œuvre de Philonov, l'une des plus fortes personnalités de l'avant-garde russe, n'est pas encore suffisamment connue, ni étudiée. Il apprend d'abord la peinture dans un atelier privé et fréquente les cours de l'Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg en 1908-1910. En 1910-1914, il participe aux expositions du groupe Soiouz molodeji (" Union des jeunes "), l'une des premières associations de peintres d'avant-garde de Pétersbourg, fondée par les frères Bourliouk avec O. Rosanova, N. Gontcharova, M. Larionov, K. Malevitch, K. Petrov-Vodkine. Ses contacts avec les cercles futuristes littéraires et artistiques, surtout avec le poète V. Khlebnikov, ont joué un grand rôle dans l'élaboration de son langage pictural. Ses voyages en Italie et en France (1911-12) ont pour lui une importance aussi importante que l'étude de la peinture russe (surtout des icônes et de l'œuvre de Vroubel). La peinture de Philonov a une forte tendance expressionniste ; elle se fonde en grande partie sur les expériences du Futurisme ; son côté fantasmagorique fait penser aux tentatives surréalistes ; cependant, elle frappe par sa forte originalité. Dans ses écrits théoriques, Philonov oppose ses recherches aussi bien à l'art traditionnel qu'à l'art de l'avant-garde, en opérant, selon lui, par deux concepts — forme et couleur ; il définit sa méthode de création comme " analytique ", affirmant qu'" un objet [...] n'a pas seulement une forme et une couleur, mais contient tout un monde de phénomènes visibles et invisibles, leurs émanations et leurs réactions [...], des qualités connues et secrètes ", et proclame " le principe biologique " de la peinture, qui permettrait au peintre de préserver l'intégrité des choses et de redonner à l'expression picturale toute sa magie et son éclat primordial. En pratique, à l'aide de formes de cristaux, indestructibles, dans des couleurs fabuleuses, transparentes et scintillantes comme des pierres précieuses, avec des lignes rigides et cassantes, il crée un monde de figures immobiles et mystérieuses (la Famille paysanne, 1912, Saint-Pétersbourg, coll. part.), d'images extatiques et inquiétantes, qui se multiplient sur la surface de ses peintures comme les reflets d'une multitude de miroirs (le Vainqueur de la ville, 1914, Musée russe, Saint-Pétersbourg). Un important groupe d'élèves se groupa autour de lui ; ils ont su traduire les particularités de sa méthode dans l'illustration de livres (pour Kalevala). Fanatiquement dévoué à son art (ses proches racontent qu'il préférait dormir sur un lit sans matelas pour ne pas trop dormir et ne pas perdre un temps précieux qu'il pouvait consacrer à la peinture), Philonov continue ses recherches dans les conditions difficiles et l'isolement au cours des années 30, sans avoir la possibilité d'exposer ses œuvres. Il meurt de faim pendant le siège de Leningrad par les Allemands. La plus grande partie de son œuvre (env. 400 huiles et grandes aquarelles), appartenant à la famille du peintre, est déposée au Musée russe de Saint-Pétersbourg.